A tous les Français : vive le logiciel libre !
Des pétitions circulent pour défendre, auprès de la Commission Européenne et des élus français, à la fois Linux, l’abandon des standards propriétaires et la non-brevetabilité du logiciel. Parodiant l’appel du 18 juin du général de Gaulle, un collectif appelle même à la manifestation dans la capitale…
C’est le branle-bas de combat en faveur du logiciel libre. Encore inconnu il y a quelques jours, le collectif des « bérets bleus » vient de lancer un appel au rassemblement le 18 juin 2000 à Paris, place du Trocadéro. Parodiant avec humour l’appel du général de Gaulle, le collectif entend manifester sur la place publique pour défendre le logiciel ouvert et gratuit, et empêcher en même temps le dépôt de brevets en Europe pour les logiciels. On pourra y signer une pétition qui réclame (à l’initiative de l’alliance EuroLinux) l’abandon d’un projet de directive européenne favorable aux brevets, et donc susceptible d’empêcher l’essor de Linux.
Soutenu par une cinquantaine de personnes, le collectif des « bérets bleus » prononcera un discours pastiche de celui du défunt général. « Nous allons placarder 3 000 affiches dans Paris d’ici deux jours », s’enthousiasme le porte-parole du mouvement Alexandre Zapolsky. Selon lui, l’affiche reprend mot pour mot les phrases de la version imprimée il y a 60 ans…
A vrai dire, cette manifestation est soutenue du bout des doigts par les autres organisations militantes, traditionnellement moins tournées vers le grand public. Au sein de l’Association des Utilisateurs de Logiciels Libres (AFUL), on préfère se tourner vers les autorités politiques pour bloquer l’adoption cet été d’une directive européenne inspirée du modèle américain et largement favorable au dépôt de brevet pour les logiciels. « Les brevets peuvent tuer Linux, ou en tout cas l’empêcher de devenir un acteur dominant sur le marché des systèmes d’exploitation », défend Stéphane Fermigier, président de l’AFUL. En exigeant systématiquement une licence pour l’utilisation d’un principe de fonctionnement (le copier-coller par exemple) ou d’un algorithme, les éditeurs privés empêcheraient rapidement les développeurs indépendants d’innover.
Pourtant, paradoxalement, les politiques français se sont mobilisés en faveur du logiciel libre, c’est-à-dire dont le code source est ouvert. Un projet de loi a été déposé en début d’année par les trois sénateurs Pierre Laffite, Guy-Pierre Cabanel et René Trégouët, pour imposer l’utilisation des standards ouverts et des logiciels libres dans l’administration (voir édition du 7 janvier 2000). « Le projet de loi a été enterré », juge Stéphane Fermigier de l’AFUL. Ce dernier considère que, dans les faits, le texte aurait été difficile à appliquer. De leur côté, les trois députés socialistes Jean-Yves Le Déaut, Christian Paul et Pierre Cohen ont rédigé un autre projet de loi pour rendre disponible (mais pas pour tout le monde) le code source de n’importe quelle application, et mettre fin à l’incompatibilité des fichiers utilisés par les services de l’Etat (voir édition du 26 avril 2000).
« Notre texte est plus réaliste », défend Jean-Yves Le Déau. « Il serait difficile d’obliger l’administration à adopter tout de suite le logiciel libre », poursuit-il. Selon le député, le texte parlementaire pourrait être intégré d’ici la fin de l’année dans le cadre de la loi sur la Communication. « Les lois déjà existantes permettraient déjà de mettre en pratique ce que propose le texte », avance toutefois Frédéric Couchet de l’APRIL.
En réaction, le gouvernement a récemment créé une mission parlementaire, dirigée par le député Thierry Carcenac, pour remettre d’ici six mois un rapport consacré au logiciel libre. Reste à savoir si ses conclusions auront un effet.
Pour en savoir plus :
* L’Aful