Des « angoisses excessives », des « peurs […] irrationnelles », des « représentations biaisées », des « visions catastrophistes sans fondement »… L’enjeu d’acceptabilité sociale est au cœur du rapport* sur l’intelligence artificielle que l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) du Sénat a approuvé à l’unanimité le 14 mars dernier.
Le document est « en cours de publication », mais la synthèse – document PDF, 4 pages – est accessible.
Y figurent quinze recommandations qui ne sont pas sans rappeler les propositions contenues dans un autre rapport : celui que la mission France IA, chargée par le gouvernement d’esquisser une stratégie nationale dans l’intelligence artificielle, a présenté la semaine passée.
Illustration sur les problématiques de sensibilisation du grand public. Pour l’OPECST, la démarche doit être amorcée dès le plus jeune âge, dans le cadre des formations à l’informatique dispensées en cycles primaire et secondaire.
Estimant qu’il faut aborder l’intelligence artificielle et la robotisation sous l’angle des « conséquences pratiques », la délégation parlementaire en appelle à la vigilance « sur les usages spectaculaires et alarmistes ».
Elle fait, dans cette optique, référence à une lettre de janvier 2015 signée par 700 chercheurs et entrepreneurs. Mettant en garde sur les risques de dérive malveillante, le document aurait « contribué à renforcer les peurs et les angoisses […] ».
Au-delà de ce travail de démystification et d’objectivation, l’OPECST prône une intelligence artificielle « maîtrisée », avec des algorithmes et des robots sûrs, transparents et justes. Recommandation à cet égard : prévoir une charte.
Pour animer le débat public sur le volet éthique, il est suggéré de créer un institut national. Tout en formant à ces questions au sein de certains cursus spécialisés de l’enseignement supérieur.
L’OPECST va plus loin en conseillant d’élargir l’offre de cursus et de modules de formation à l’IA, en montant, en parallèle, au moins un pôle d’excellence international et interdisciplinaire.
Cette dimension d’interdisciplinarité s’illustre dans le panorama du secteur en France : 21 % des chercheurs travailleraient dans le raisonnement et la représentation des connaissances ; 20 %, dans l’apprentissage automatique ; 13 %, dans le traitement des signaux ; 12 %, dans le traitement du langage naturel, etc.
Insistant sur le potentiel de rupture multisectorielle, mais déplorant les atouts « sous-estimés » de la France, l’OPECST redoute un « décrochage » par rapport à la recherche internationale. Son rapport fait déjà état de la « domination des entreprises américaines et potentiellement chinoises ». Non sans pousser, en conséquence, à revaloriser la place de la recherche publique en encourageant une coopération avec le privé.
Structurer et mobiliser la communauté française de l’IA impliquera aussi d’organiser des concours primés et de se donner l’objectif de constituer des « champions européens », en sachant « se garder d’une contrainte juridique trop forte ».
* Claude de Ganay (député LR du Loiret) et Dominique Gillot (sénatrice PS du Val-d’Oise) en sont les rapporteurs.
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