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Affaire Danone : le Réseau Voltaire contre-attaque

Hier, mercredi 2 mai, le Réseau Voltaire a dénoncé publiquement, à l’Assemblée Nationale, l’attitude de Danone dans l’affaire du site « www.jeboycottedanone.com ». L’occasion notamment de rendre publique la plainte que l’association de défense de la liberté d’expression, en association avec Valentin Lacambre, représentant de la société Gandi, ont déposée contre X le 26 avril dernier. Cette plainte, qui fait suite à « la désactivation illégale » du site du Réseau Voltaire (qui édite le site « jeboycottedanone.net »), a été déposée pour « entrave à la liberté d’expression, à la liberté du travail, menaces et chantage », selon Thierry Meyssan, président du Réseau Voltaire. Thierry Meyssan a reçu le soutien de l’association Attac (Association pour la taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens), des Verts, du Parti Radical de Gauche et la Ligue Communiste Révolutionnaire, qui se sont portés partie civile. « Nous ne pouvons pas rester inertes face à de telles attaques. Tout ce qui porte atteinte au moindre segment de la liberté d’expression est une atteinte à la démocratie », a indiqué Noël Mamère, des Verts, cité par l’AFP.

Petit rappel des faits. Suite à l’annonce par Danone de fermer les usines du pôle Biscuit, Olivier Malnuit, journaliste à Technikart dépose le nom de domaine « Jeboycottedanone.com » et ouvre le site du même nom le 11 avril parallèlement aux mouvements syndicalistes qui appellent à la grève et au boycott. Le site est édité par le Réseau Voltaire à l’adresse « www.reseauvoltaire.com/jbd » vers laquelle pointe le nom de domaine en « .com ». Le 13 avril, le Groupe Danone et la Compagnie Gervais Danone assignent au fond Olivier Malnuit ainsi que deux intermédiaires techniques, les sociétés ELB multimédia et 7 Ways enregistreurs du nom de domaine incriminé. L’audience est fixée au 30 mai. Le 18 avril, Danone assigne les mêmes acteurs pour les mêmes raisons, en référé cette fois. Le 23 avril, le juge des référés rend sa décision. Il écarte la demande de Danone d’interdire l’usage du nom de domaine « jeboycottedanone.com » mais leur accorde l’interdiction de faire usage de la marque et des logos Danone. Un point sur lequel Olivier Malnuit ne pouvait gagner. « On ne peut pas être satirique vis-à-vis d’une marque », confirme Murielle-Isabelle Cahen, avocate à la Cour spécialisée dans le droit des technologies de l’information et de la communication.

Le site du réseau Voltaire attaqué

Entre temps, le 16 avril, le Réseau Voltaire dépose le nom de domaine « Jeboycottedanone.net » auprès du registrar Gandi. Dépôt qui vaut à l’association et à Valentin Lacambre, gérant de Gandi, une nouvelle plainte de Danone le 25 avril. L’audience est fixée au 30 mai. La veille, vers 3 heures du matin, une attaque informatique par saturation place le site Reseauvoltaire.net hors service. Selon Thierry Meyssan, l’attaque est perpétrée par une société d’intelligence informatique qui travaillait pour Danone deux ans auparavant. C’est l’objet de la plainte contre X déposée le 26 avril, jour de relance du site qui héberge « Jeboycottedanone.net ». Quant au nom de domaine « jeboycottedanone.com », il a purement et simplement été désactivé le 20 avril par les prestataires techniques 7 Ways et ELB Multimédia qui n’ont pas pris la peine de prévenir son propriétaire. ELB Multimédia n’a pas souhaité s’exprimer à ce sujet. Et 7 Ways ne possède apparemment aucun contact en France. « Il n’y a pas un seul précédent dans toute l’histoire du Web », fait remarquer Thierry Meyssan qui met ainsi en évidence la fragilité de l’édition en ligne. Signalons enfin que, le 27 avril, Danone assigne en référé le Réseau Voltaire en sa double qualité d’éditeur et de propriétaire du nom de domaine « jeboycottedanone.net » ainsi que la société Gandi et Valentin Lacambre. L’audience est fixée au 7 mai.

Une affaire qui dépasse de loin les frontières du Web

Cette plainte contre X déposée devant le doyen des juges d’instruction du tribunal de Grande Instance de Paris est donc une contre-attaque en règle devant l’avalanche de référés que déploie Danone contre le Réseau Voltaire coupable d’éditer un site web qui appelle au boycott. Car, malgré les arguments du groupe industriel qui s’appuie sur le Code de la propriété intellectuelle, c’est bien la liberté d’expression qu’on cherche à museler. C’est en tout cas l’avis du sénateur PRG Gérard Delfau qui ne comprend pas « qu’une grande firme comme Danone veuille museler le débat », selon des propos repris par l’AFP. « On s’en fout du droit à pasticher des marques ou non, ce qui est intéressant c’est le droit des citoyens de pouvoir s’exprimer et débattre librement, et pour cela, nous sommes obligé de nommer Danone et sa marque pour la désigner », renchérit Thierry Meyssan. Le président de l’association fait d’ailleurs remarquer que le site héberge un forum où s’expriment également les pro-Danone. « Leur action en justice est un prétexte pour museler le débat et est révélateur de ce que pense Danone du droit des citoyens qui, selon eux, dépend du Code de la propriété intellectuelle alors que nous pensons qu’il relève de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen. Nous estimons que le pays est encore gouverné par un peuple et non par des marques », poursuit Thierry Mayssan, d’autant plus remonté qu’il réussit à obtenir le soutien de parlementaires. « J’ai reçu une dizaine de fax d’élus, je pense en convaincre une cinquantaine. Ne nous trompons toutefois pas de combat. Notre adversaire, ce n’est ni une compagnie en particulier, ni son Pdg, c’est un système qui détruit l’avenir industriel de notre pays pour fournir une rémunération usuraire immédiate à des actionnaires » précise-t-il sur son site.

Pour Thierry Meyssan l’affaire va donc au-delà de Danone et pointe du doigt les intérêts des grandes firmes soumises aux exigences de leurs actionnaires. Il n’empêche que la politisation du débat pourrait se retourner contre le groupe de Franck Riboud. A l’heure où nous bouclons, nous n’avons pas réussi à joindre les portes paroles de Danone. Déposée au pénal, sitôt qu’un juge sera désigné, la plainte du Réseau Voltaire retardera toutes les procédures civiles. L’affaire pourrait alors durer plusieurs mois avec, à la clé, une jurisprudence qui viendrait combler un trou dans le droit français. Celui du droit de caricature des marques.

Pour en savoir plus :

* Le site du Réseau Voltaire

* Le site Jeboycottedanone.net

* Le site de Danone

* Le site de l’avocate Murielle Cahen

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