Le Sénat aura généreusement remodelé la proposition de loi Grandguillaume, relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public de personnes.
Il était déjà ressorti, du passage en commission le 19 octobre dernier, des modifications substantielles par rapport à la version transmise par l’Assemblée nationale.
Le texte a encore nettement évolué avec l’examen en séance publique, réalisé ce mercredi 2 novembre 2016.
Sur les 61 amendements présentés, 18 ont été adoptés.
Parmi eux, les nos 2 rectifié bis et 8 rectifié, qui visaient à exclure le covoiturage du champ de la proposition de loi en tant que transport privé routier de personnes.
L’article 1, qui consiste en l’ajout, au livre 1er de la troisième partie du code des transports, d’un titre IV « Les activités de mise en relation », est modifié en conséquence. Disparaît ainsi la disposition selon laquelle les plates-formes de covoiturage doivent fixer « un montant maximum exigible par le conducteur au titre du partage des frais ».
Dans ce même article 1 s’ajoute, en vertu de l’amendement no 62 déposé par Jean-François Rapin (LR, Pas-de-Calais ; désigné rapporteur), l’obligation, pour les plates-formes, de demander aux chauffeurs un justificatif d’assurance du véhicule, en plus du permis de conduire, de l’assurance responsabilité civile et, le cas échéant, de la carte professionnelle requise.
Ce même amendement no 62 implique, pour les « déplacements réalisés en voiture de transport avec chauffeur », l’adéquation des véhicules aux conditions techniques et de confort mentionnées à l’article L. 3122-4 du code des transports.
Plusieurs autres amendements déposés par Jean-François Rapin ont été adoptés, dont le no 59, qui suppose une modification de l’article 3 de la proposition de loi pour habiliter des fonctionnaires assermentés par le ministre des Transports à rechercher et à constater des infractions, en plus des officiers et agents de police judiciaire.
Parmi les infractions en question figurent les irrégularités en matière de déclaration d’activité à l’autorité administrative. Elles restent punissables de 15 000 euros d’amende, mais la peine d’un an d’emprisonnement, jugée « inadaptée », disparaît, au profit d’un renvoi vers l’article 131-39 du code pénal.
L’amendement 56, déposé par le gouvernement, relève de 15 000 à 75 000 euros le montant de l’amende encourue par une centrale qui empêcherait un taxi de marauder ; soit la même sanction que pour celles qui empêcheraient un taxi de s’affilier à une autre centrale. Le tribunal peut par ailleurs ordonner que sa décision soit publiée intégralement ou par extraits, aux frais du condamné.
Avec l’amendement no 58, c’est l’article 2 qui refait surface, avec davantage de garanties juridiques, selon son dépositaire… qui n’est autre que Jean-François Rapin.
Ledit article doit permettre à l’autorité administrative d’imposer aux acteurs du secteur la transmission périodique de données. La commission l’avait supprimé, considérant que le champ des données concerné était défini « de façon très large et qu’il existe des procédures moins intrusives ».
La nouvelle rédaction est censée limiter l’obligation de transmission aux seules données nécessaires au respect de la réglementation, en excluant explicitement les données relatives aux passagers (celles-ci devant être anonymisées). Pour obtenir des informations générales, le gouvernement est invité à recourir à la loi no51-711 du 7 juin 1951 sur l’obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques.
Sur l’article 3, l’amendement no 49 du gouvernement rétablit la rédaction de l’Assemblée nationale concernant les dérogations à l’interdiction des exclusivités entre plates-formes et conducteurs.
En d’autres termes, il existe des situations dans lesquelles les clauses d’exclusivité « sont justifiées et bénéficient à la fois aux conducteurs et aux consommateurs ». Par exemple lorsqu’une centrale lance son activité ou quand elle exige d’un chauffeur qu’il reste plusieurs jours à la disponibilité d’un client, typiquement dans le cadre d’un service de luxe.
L’article 4, qui porte réforme du statut LOTI issu de la loi du même nom votée en 1982, évolue lui aussi, tout particulièrement au travers de l’amendement no 50.
Le principe reste le même : empêcher le détournement du statut en rendant illégale la proposition de prestations de transport LOTI dans des véhicules de moins de 10 places pour des trajets entièrement situés dans le périmètre géographique d’une agglomération de plus de 100 000 habitants.
Dans la rédaction du Sénat, on parle de véhicules comprenant « plus de 8 places assises, outre le siège du conducteur ». On oublie surtout les dates fixes au profit d’un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi ; temps laissé aux LOTI pour se conformer à la réglementation du transport public particulier.
À souligner l’adoption de l’amendement no 16 rectifié, qui entraîne l’ajout d’un article 4 ter autorisant les associations loi 1901 à faire du transport de personnes à titre non onéreux. Principales cibles : les familles en situation de précarité ou d’isolement.
On notera également l’amendement no 18 et la modification de l’article 8 qui en résulte. L’obligation de présence d’un terminal de paiement électronique dans les taxis imposée par la loi Thévenoud est transformée en obligation de résultat prévoyant que le passager doit pouvoir payer par carte bancaire.
Le texte a été transmis ce 3 novembre à l’Assemblée nationale en vue d’une deuxième lecture.
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