La polémique, qui a éclaté cette semaine avec AppGratis bannie de l’App Store et qui a pris une tournure politique avec l’intervention de Fleur Pellerin (ministre de l’Economie numérique), laisse des traces dans le secteur de la recommandation d’applications.
Antoine Buffet , co-fondateur d’AppsFit (moteur de recommandations d’applications), tient à souligner que le business n’est pas enterré pour autant sur l’App Store d’Apple. Si l’on ne dépasse pas la ligne rouge…
(Entretien téléphonique réalisé le 12 avril 2013).
ITespresso.fr : Pourquoi réagissez-vous à la polémique « AppGratis banni de l’App Store » ?
Antoine Buffet : Nous sommes un peu surpris de la tournure des débats et que des ministres s’en mêlent. Tout ce débat risque de faire du tort à beaucoup de monde. Nous sommes en pleine levée de fonds et je veux rassurer des investisseurs qui pourraient exprimer certaines réserves après cette histoire.
Certes, des services de recommandations d’applications vont peut-être disparaître définitivement mais ce ne sera pas l’intégrité de la profession. La recommandation d’applications n’est pas morte, à condition de ne pas franchir certaines limites.
On pense qu’Apple est dans son rôle. Il nous semble que la firme de Cupertino se sert d’AppGratis pour en faire un exemple.
Simon [Dawlat, fondateur d’AppGratis, ndlr] a dû faire des démonstrations de puissance maladroites.
Ce qui est important de souligner, c’est qu’il faut protéger tout un écosystème. Quand on se rend sur l’App Store d’Apple, on télécharge des applications sans risque d’infection de virus.
En lançant notre service AppsFit, nous avons tout fait pour respecter les règles d’Apple. Nous sommes revendeurs d’Apple car nous lui emmenons du business. Apple nous paie 4% sur toutes les applications payantes que les utilisateurs sélectionnent via notre propre application AppsFit. C’est encadré dans un programme d’affiliation contractuelle.
ITespresso.fr : Quelles sont les pratiques qui dérangent Apple ?
Antoine Buffet : Ce n’est pas notre rôle d’imputer ces pratiques à AppGratis. C’est Apple qui juge. Mais Apple semble vouloir faire le tri dans les bonnes et les mauvaises pratiques.
Un éditeur d’applications qui dispose de 50 000 euros est en mesure de monter de manière artificielle dans un classement.
Ceux qui arrivent à squatter les premières positions des classements App store aux dépens d’Apple. Ceux qui rémunèrent des utilisateurs pour télécharger des applications. Ceux qui ne font pas de distinctions entre applications sponsorisées et recommandations éditoriales. C’est un peu l’équivalent des publi-reportages que l’on voit fleurir dans la presse.
Les fausses promotions restent aussi un gros problème sur l’App Store. On peut baisser le prix d’une application comme on le veut. On bénéficie d’effets d’aubaine : un jour, on met une application à quatre euros, le lendemain, on la propose gratuitement.
Toutes ces pratiques gênent Apple. Parfois, elles se révèlent très efficaces pour monter dans les classements thématiques de l’App Store.
Apple veut chasser aussi les gros crawlers. Ceux qui captent tout le store et le restituent de manière différente mais sans réelle valeur ajoutée (tests, dimension éditoriale, etc.).
ITespresso.fr : Considérez-vous AppGratis comme un vilain petit canard ?
Antoine Buffet : Je ne peux pas me permettre de dire cela. Libre à AppGratis de monter son business et d’interpréter les règles d’Apple comme il le souhaite. Nous apportons notre soutien à Simon et il a raison de se battre car son business n’est pas fini. Cette affaire sera peut-être l’occasion de changer de modèle. Mais je ne pense pas qu’AppGratis soit en mesure de faire changer d’avis Apple.
De notre côté, nous ne voulons pas entendre que c’est la fin du monde de la recommandation d’applications. Tout cela à cause d’une sanction. Il y a eu un antécédent : AppShopper a été viré d’App Store il y a six mois.
Mais nous allons le souligner à travers un communiqué : nous n’adhérons pas aux pratiques visant à gonfler de manière artificielle le volume de téléchargements et de modifier les classements. La philosophie de notre moteur, c’est de mettre en avant les applications avec des notes calculées à partir des commentaires des gens. Cette note ne peut pas être achetée ou modifiée. Si les gens n’aiment pas une application, on peut le dire et comprendre pourquoi en lisant les commentaires.
ITespresso.fr : Craignez-vous qu’Apple fasse vraiment le ménage ? En lançant une opération « mains propres » dans votre domaine de prédilection ?
Antoine Buffet : Je pense qu’Apple va continuer à surveiller les pratiques mais sans éradiquer un écosystème complet. Cela contrarierait nos plans mais on a beaucoup moins à perdre que certains. Je pense à AppGratis et à Appsfire [qui vient d’ailleurs de communiquer via son blog qu’elle est en totale conformité avec les guidelines d’Apple, ndlr].
Donc oui, Apple va faire le ménage mais sur des critères flagrants qui nuisent vraiment à son activité.
Si Apple nous sort, nous serions vraiment surpris car nous avons étudié à fond notre positionnement et nous avons tout fait pour apporter de la valeur à Apple.
Nous sommes là pour faire découvrir des applications que les gens n’auraient peut-être pas pu repérer à travers l’App Store.
Nous avons un volume d’affaires assez conséquent : depuis quatre mois, les gens ont trouvé 100 000 applications sur les stores grâce à nous. Est-ce que les gens auraient trouver ces applications sans nous ? C’est une question qu’Apple doit se poser.
(Lire la fin de l’interview page 2) : Le but réel d’Apple ? Quels avertissements ? Quel business chez AppsFit ?
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