AOL Time Warner, c’est le nom officiel de la nouvelle entité, « pèse » plus de 350 milliards de dollars sur le marché boursier américain. Même s’il ne s’agit pas d’un rachat mais d’une fusion, les rênes de Time Warner ont bien changé de mains. Steve Case, président d’AOL, prendra la direction de l’ensemble. Selon les termes du communiqué conjoint des deux sociétés, Gerald Levin, président de Time Warner, « travaillera étroitement avec Steve Case et s’occupera de la gestion de la société ». Signe qui ne trompe pas, les actions cotées sur le marché américain porteront l’unique mention « AOL ». Le plus étonnant de l’histoire, c’est que l’on a vraiment l’impression que, pour une fois, le pot de terre a terrassé le pot de fer. Alors qu’en 1998 AOL réalisait un chiffre d’affaires d’un peu moins de 5 milliards de dollars, celui de Time Warner atteignait presque 27 milliards sur la même période. Mais, l’équilibre se renverse si l’on considère les bénéfices :762 millions de dollars pour AOL contre… 168 millions pour Time Warner. Les nouvelles technologies semblent bien prendre le pas sur les « dinosaures ».
Financièrement parlant, la transaction doit encore être approuvée par la totalité des actionnaires des deux sociétés. Pour l’heure, selon le communiqué, les dirigeants ont unanimement donné leur accord pour apporter leur portefeuille personnel dans l’affaire. Y compris le très médiatique Ted Turner, vice-président de Time Warner qui en détenait à lui tout seul environ 9 %. Au final, l’ensemble des actionnaires actuels d’AOL détiendra environ 55 % de la totalité.
Même si AOL n’a jamais été qu’un simple fournisseur d’accès, cette fusion transforme la société de Steve Case, créée en 1985, d’un seul coup en un géant des médias tous azimuts. Tombent en effet dans son escarcelle des marques aussi prestigieuses que CNN, Warner Bros., Warner Music Group, Time ou People. D’autres, moins connues en Europe, complètent ce tableau telles Looney Tunes, HBO (un des grands réseaux de télé américains), etc. Time Warner avait tenté de s’engouffrer dans la brèche Internet en créant un site portail, Pathfinder, qui n’a finalement pas rencontré le succès escompté.
En devenant maître du contenu et des moyens de le distribuer, les possibilités de synergies deviennent presque infinies pour AOL. En fait, la galaxie AOL devient plus étendue que jamais. Les domaines englobés par le nouveau géant touchent à la distribution de la musique en ligne, de nombreux médias d’informations, pourquoi pas la téléphonie et, au final, toutes les formes de réseaux numériques. Car un des aspects les plus importants pour AOL, semble être l’accès aux réseaux haut-débit déjà détenus par Time Warner, qui doit permettre au nouveau géant de « fournir de l’accès à Internet à grande vitesse sur tout le territoire américain » tel qu’il a été annoncé pendant la conférence de presse qui s’est déroulée aujourd’hui. Le fournisseur de services avait d’ailleurs déjà signé des accords en ce sens avec AT&T, géant des télécommunications américain. De quoi passer dans un avenir proche à la télévision à la demande ? Time Warner s’enorgueillit de toucher plus d’un milliard de téléspectateurs de CNN à travers le monde. Autant de clients potentiels qui seront certainement bientôt démarchés par AOL.
Steve Case ne s’est d’ailleurs pas privé de faire remarquer la toute nouvelle omniprésence d’AOL. « Nous avons toujours dit que la mission d’America Online était de rendre l’utilisation d’Internet aussi centrale dans la vie des gens que le téléphone et la télévision » a-t-il déclaré. Et d’ajouter :« En unissant nos forces avec Time Warner, nous allons fondamentalement changer la façon qu’auront les gens d’accéder à l’information et de communiquer entre eux ». Des gens qui paieront tous leur écot, bien entendu, AOL étant déjà une des principales sociétés de commerce électronique sur le Web.
Et on peut faire confiance au patron d’AOL, et maintenant de Time Warner : il fera tout pour que ses abonnés ne sortent pas du domaine qu’il contrôle. Les déclarations conjointes sont d’ailleurs très claires à ce sujet. AOL et Time Warner ont, en même temps que la fusion, annoncé de nouveaux accords marketing. Par exemple de nombreux contenus en provenance de Time Warner seront directement accessibles en ligne pour les abonnés AOL, qu’il s’agisse de contenus de magazines mais aussi de morceaux de musique directement téléchargeables. Il y aura aussi des réductions sur les abonnements pour certaines publications Time Warner, toujours réservées aux abonnés AOL.
L’annonce de la fusion a plutôt été bien reçue par le marché boursier américain si l’on en croit la variation du cours des actions des deux sociétés. Celle de Time Warner est passée, à l’ouverture, de 30 à 95 dollars, tandis que celle d’AOL passait de 13 à plus de 85 dollars !
Géant peut-être, mais, pour l’instant, la valorisation boursière de Microsoft est encore plus considérable que celle de la nouvelle entité AOL Time Warner. Plus de 550 milliards de dollars contre 350. On se souvient que la firme de Seattle s’était servie du rachat de Netscape pour démontrer qu’elle subissait bien une concurrence acharnée. Peut-être que cette fusion lui donne raison. Même s’il est difficile aujourd’hui de déterminer si les deux sociétés font aujourd’hui le même métier.
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