On ne badine pas avec la musique chez Apple ! Si le constructeur de Mac était bien à la traîne au tournant de l’an 2000 avec l’intégration tardive de graveurs de CD dans les Mac et la sortie surprise d’iTunes, il a mis les bouchées double pour faire de la musique une activité forte du Mac. L’iPod initial (voir édition du 23 octobre 2001), de 5 Go vient de disparaître du catalogue, et il y a fort à parier qu’Apple prépare la relève. Un modèle de 40 Go est logiquement évoqué puisque le fournisseur de la Pomme dispose déjà d’un disque de cette capacité. Mais l’iPod, c’est aussi le summum de ce qui se fait en lecteur MP3. Si l’éventail de ses fonctionnalités est moindre que sur d’autres baladeurs, la mise en oeuvre est quant à elle sans équivalents sérieux. La clientèle d’Apple l’a bien compris et le petit baladeur détient, en janvier aux Etats-Unis, la cinquième place en volume de ventes sur ce marché qui reste pour le moment en émergence. Sur l’année, Apple décroche même la troisième place, avec près de 11 % de part de marché. En Europe aussi, le petit baladeur s’avère très bien positionné, décrochant la première place dans sa catégorie. Mais c’est en valeur que l’iPod s’avère loin devant, comptant pour pas loin de 27 % des revenus de ce secteur. « Ce que la plupart des gens ont compris, c’est qu’ils y ont davantage intérêt à dépenser 200 à 400 dollars dans un baladeur basé sur un disque dur plutôt que reposant sur de la mémoire flash », a ainsi indiqué l’analyste de NPDTechworld Stephen Baker à nos confrères de Mac Observer. « Et ce sont justement les modèles à disques qui tirent la croissance des ventes ». L’iPod tient la dragée haute aux machines des autres fabricants surtout en raison de sa déclinaison pour Windows. Apparue en juillet 2002, elle a presque immédiatement représenté la majorité des ventes du lecteur ! Face à lui, SonicBlue et ses Rio, RCA et ses Lyra tiennent des places similaires à l’iPod en volume. Pour creuser l’écart, l’iPod pourrait bénéficier de l’association avec un service de vente de musique en ligne destiné au Mac.
Car c’est là où Apple semble avoir loupé le coche ! Les portails musicaux avec distribution légale de morceaux ! Aujourd’hui, seul un PC ouvre l’accès aux discothèques existantes, comme PressPlay, MusicNet ou Listen.com. La raison : l’absence chez Apple d’un support de gestion des droits numériques, le DRM (Digital Right Management). Le DRM doit permettre d’empêcher la copie sauvage de titres. Pire, Apple fut pointée du doigt par les maison de disques après la sortie d’une publicité pour ses iMac, graveurs de CD et à iTunes, et dont le slogan était évocateur : « rip, mix, burn » à savoir encodez, compilez, gravez ! Un affront pour les majors, qui ont reproché à Cupertino son laxisme. Steve Jobs lui même est monté au créneau, en proclamant qu’il faisait confiance à l’immense majorité de ses clients pour agir de façon légale avec les oeuvres musicales. Conséquence directe ou non, le Mac et l’iPod restent interdits de musiques provenant de ces portails musicaux. La situation pourrait toutefois s’inverser sous peu : quatre des cinq majors (EMI, BMG Corp, Sony Music, Warner Music et Universal Music) soutiendraient une initiative de vente de titres en ligne, préparée en grand secret. C’est le Los Angeles Times qui s’en est fait l’écho il y a quelques jours, citant des sources anonymes proches des négociations. Pour obtenir pareil soutien, il faut vraiment que la solution d’Apple ait convaincu les barons du disque qui ne cessent de hurler sur les ravages financiers occasionnés par la copie et les téléchargements pirates. Dans l’attente d’une confirmation de ce projet et de ses détails, il apparaît toutefois que la firme pourrait utiliser le format audio AAC, déjà présent sur Mac, et dont Steve Jobs lui-même fait la promotion depuis de longs mois (voir édition du 6 juin 2002). Surtout, c’est iTunes qui devrait être au coeur de cette révolution (voir édition du 24 juillet 2002).
Les conséquences pour le modèle économique d’Apple risquent de changer fortement : il s’agirait en fait d’un flux de revenus supplémentaires pour l’entreprise qui pourrait induire de nouvelles ventes de ses propres produits (Mac et iPod en tête). « Le Macintosh serait plus attractif pour des acheteurs potentiels, s’il disposait d’un service de ce niveau », a indiqué en substance Tim Bajarin à nos confrères de Sunspot. Et la firme ne lésinera sans doute pas sur la qualité, ainsi qu’elle sait le faire par ailleurs. Surtout, elle va sans doute faire l’effort de trouver un mécanisme pour permettre tant aux artistes de ne pas être lésés par les fans du téléchargement, qu’à ses clients de pouvoir disposer de droits d’utilisation étendus à la sphère privée… Et aux majors, prompts à envoyer leurs avocats, de ne plus louper de ventes. Mais chacun aura sans doute à y mettre du sien : les tarifs par chanson devront à priori être abaissés, tandis que les utilisateurs ne pourront pas échanger de titres, ni graver de CD sans verser une obole. La solution de vente en ligne d’Apple sera-t-elle une alternative au piratage de la musique sur l’Internet ? Il y a fort à parier qu’elle contournera en tout cas quelques difficultés.
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