Le conflit Apple – Qualcomm déteindra-t-il sur la 5G ?
Des craintes émergent quant aux conséquences que la guerre judiciaire entre Apple et Qualcomm pourrait avoir sur les États-Unis dans la course à la 5G.
Interdire la vente de l’iPhone aux États-Unis aurait des effets néfastes sur le marché des modems cellulaires et serait susceptible de freiner le pays dans la course à la 5G.
Cet avis émane de l’organe d’enquête de l’ITC (International Trade Commission).
L’agence fédérale chargée d’examiner les pratiques commerciales sur le territoire américain auditionnait, ce 17 septembre 2018, Apple et Qualcomm.
Ces derniers livrent bataille depuis près de deux ans sur fond de pratiques anticoncurrentielles. Leur conflit a pris une dimension mondiale.
L’élément déclencheur fut une plainte de la FTC (Federal Trade Commission) contre Qualcomm. En janvier 2017, le gendarme américain de la concurrence avait dénoncé, devant la justice californienne, un abus de position dominante sur le marché des modems 3G (CDMA) et 4G (LTE).
Les deux firmes se sont rendu coup pour coup* et le litige a fini par rebondir à l’ITC. Qualcomm y avait déposé plainte le 7 juillet 2017. Son angle d’attaque : la violation présumée, par Apple, de six brevets ayant essentiellement trait à la gestion du trafic de données et à l’optimisation de la consommation d’énergie sur les terminaux mobiles.
La firme de Cupertino avait riposté le 29 novembre, déposant plainte devant un tribunal californien au nom de huit brevets relatifs à la consommation d’énergie.
Le lendemain, Qualcomm avait ouvert un deuxième front auprès de l’ITC, sur la base de cinq brevets. La commission d’enquête s’est saisie de trois d’entre eux… et n’a conclu – en plus de ses remarques sur le volet concurrentiel – à aucune infraction de la part d’Apple.
Qualcomm a eu davantage de succès dans le cadre de l’examen de sa première plainte. La commission d’enquête a considéré qu’Apple avait bien violé un des brevets incriminés. Elle a toutefois recommandé à l’ITC de ne pas interdire, au nom de l’équilibre concurrentiel, la vente des iPhone qui seront dotés de modems 5G.
La crainte d’un monopole
Sur ce premier volet, une décision de justice – que devra valider l’ITC – est attendue dans les prochains jours.
Du côté d’Apple, on affirme que Qualcomm ne s’appuie sur l’agence fédérale que pour mieux évincer son rival Intel. Les avocats de « la marque à la pomme » en veulent notamment pour preuve le fait que la demande d’interdiction de vente ne porte que sur les iPhone équipés de puces Intel, alors même, assurent-ils, que les infractions dénoncées toucheraient aussi les iPhone dotés de puces Qualcomm.
La CCIA (Computer Communications Industry Association) est sur la même ligne. Le groupement, qui dit représenter les intérêts d’une trentaine de sociétés technologiques, estime que la firme de San Diego se sert de l’ITC comme d’un « outil pour asseoir son monopole ».
La basculement de Qualcomm à Intel pour la fourniture des modems cellulaires de l’iPhone est récent. En Europe, il a fait l’objet d’une enquête… et d’une lourde sanction.
Qualcomm a, en l’occurrence, écopé d’une amende de près d’un milliard d’euros pour avoir signé un accord impliquant le versement de « milliards de dollars » à Apple afin qu’il n’utilise pas de modems fournis par d’autres sociétés.
À en croire Steve Mollenkopf, l’avenir est déjà écrit. Le patron de Qualcomm se dit persuadé qu’Apple mettra bientôt un terme au conflit, son seul objectif étant d’obtenir « des tarifs plus avantageux » sur les licences technologiques.
* Apple avait été le premier à s’engouffrer dans la brèche. Sa plainte reprenait pour partie les observations de la FTC, notamment sur la question des brevets dits « essentiels », car relatifs à des technologies ayant fait l’objet d’une standardisation.
Crédit photo : Vodafone Enterprise Plenum e.V. via Visualhunt / CC BY-NC-SA