Brevets : un grain de sable dans la machine Apple
La requête en injonction permanente sollicitée par Apple à l’encontre de Samsung pour violation de brevets technologiques n’a pas abouti. Vingt-trois terminaux étaient concernés dans ce dossier dont les origines remontent à 2011.
La fenêtre de tir ouverte en décembre dernier contre Samsung s’est subitement refermée au nez d’Apple.
Pour mettre la pression sur son concurrent sud-coréen dans la guerre des brevets, le fabricant de l’iPhone avait relancé un dossier dont les origines remontent à 2011. S’appuyant sur une décision de justice rendue en sa faveur le 18 novembre 2013 après une procédure d’appel, il avait renouvelé une demande d’injonction permanente visant à faire interdire la commercialisation, sur le sol américain, d’une vingtaine de terminaux Android de son rival.
Tous ces appareils d’ancienne génération – des smartphones et des tablettes – ne sont plus sur le marché actuellement. Le préjudice lié à leur vente est donc quasi nul. Pourquoi « la marque à la Pomme » s’obstine-t-elle à éterniser les démarches ? Pour mieux saisir les subtilités du contentieux et ses implications sur les prochains conflits entre les deux sociétés high-tech, il faut revenir au premier temps fort, qui date du 17 décembre 2012.
Au nom de l’innovation, Apple explorait toutes les pistes pour mettre un frein à l’importation de produits Samsung à l’échelle des États-Unis. Les terminaux incriminés avaient auparavant été reconnus en infraction vis-à-vis de plusieurs brevets déposés sous l’ère Steve Jobs. Mais ce 17 décembre, la juge Lucy Koh, chargée d’instruire le recours, avait évoqué « les nombreuses différences qui [subsistaient] entre les produits des deux fabricants, […] malgré l’utilisation de certaines technologies brevetées« .
Impossible, par conséquent, de décréter une interdiction de commercialisation, « tant qu’Apple [n’aurait] pas constitué un argumentaire plus probant » , prouvant en l’occurrence que les éléments de propriété intellectuelle violés par Samsung avaient effectivement influé les intentions d’achat des consommateurs.
En se prononçant ainsi, la magistrate rejetait l’ensemble des chefs d’accusation (plus d’une demi-douzaine) retenus en août 2012 contre Samsung lors d’un procès à l’issue duquel le numéro un mondial des smartphones avait écopé de plus d’un milliard de dollars de dommages-intérêts. Les experts qui s’étaient procuré un exemplaire de la motion soulignaient qu’Apple avait toutes les chances d’inverser, en appel, ce jugement « sans précédent dans l’histoire de la justice américaine ».
L’hypothèse s’est vérifiée en le 18 novembre dernier : la Cour d’appel pour le circuit fédéral inversait le verdict et retransmettait le dossier à une cour de district de San José (Californie). Il suffisait alors, pour Apple, de prouver que l’ajout d’une fonctionnalité brevetée rendait un produit Samsung plus attractif, à une condition : qu’il s’agisse uniquement d’éléments technologiques et non relatifs au design.
Dans sa plainte, la firme de Cupertino mettait l’accent sur le contrôle tactile multipoint avec les techniques de « rubber-banding » (défilement à deux doigts sur un écran tactile), de « tap-to-zoom » (agrandissement d’un contenu par double tapotement) et de « pinch-to-zoom » (même principe, mais en écartant les doigts).
Au-delà de l’impact commercial, négligeable au vu de l’âge des produits, son département juridique entrevoyait plutôt des conséquences sur le long terme. Il espérait notamment pouvoir alimenter le procès qui se tiendra fin mars autour de terminaux plus récents, comme le smartphone Galaxy S3.
Samsung, qui disposait de moyens pour retarder la procédure, n’en avait pas fait usage, illustrant une certaine confiance. Le vent a finalement tourné en sa faveur, Apple n’étant pas, selon Lucy Koh, « parvenu à démontrer une atteinte effective à sa propriété intellectuelle [pouvant justifier] une injonction permanente« . Apple a cependant, comme le note Foss Patents, la possibilité d’interjeter appel et de solliciter une nouvelle expertise.
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