Cegetel porte plainte contre France Télécom
Cegetel et sa filiale AOL ont déposé une plainte contre France Télécom devant le Conseil de la Concurrence. L’objet du litige est l’offre de promotion des forfaits « Intégrales » lancée par Wanadoo, la filiale de France Télécom. Mais comment se débrouille donc AOL ?
Cegetel et sa filiale AOL ont déposé mardi 16 novembre une plainte auprès du Conseil de la Concurrence. Les deux entreprises considèrent que la promotion menée par Wanadoo constitue un abus de position dominante.
Les concurrents de Wanadoo accusent régulièrement France Télécom de favoriser sa filiale, profitant du monopole qui lui reste sur la boucle locale, les derniers mètres de fils téléphoniques qui pénètrent chez les abonnés. Aussi, quand l’opérateur historique avait lancé, il y a deux mois, son offre « Intégrales Wanadoo », incluant, pour 99 francs, l’abonnement au service plus 10 heures de communication téléphonique, ou, pour 159 francs, l’abonnement plus 18 heures, les prix avaient-ils été calculés au plus juste, pour éviter de déclencher les foudres de l’Autorité de Régulation des Télécommunications (ART) ou du Conseil de la Concurrence. La tandem Cegetel/AOL avait démarré, le 20 octobre dernier, une expérience de forfait sur des bases presques identiques réservée à 5000 clients tirés au sort.
Seulement voilà. Pour doper ses abonnements, Wanadoo a décidé de casser les prix, doublant le nombre d’heures de communications incluses dans ses forfaits le temps d’une promotion de fin d’année. Cette fois, la ficelle est trop grosse, estiment AOL et Cegetel, qui ont immédiatement porté plainte devant le Conseil de la Concurrence. « Attention », nous a bien précisé un porte-parole de l’opérateur, « nous n’attaquons pas le forfait de base, mais sa promotion. Il est impossible pour nous, comme pour tout autre fournisseur de suivre ce rythme, sauf à vendre à perte. » Le porte-parole ne mâche pas ses mots.« Une telle opération n’est possible pour France Telecom que grâce à son monopole, et c’est pour ça que nous attaquons en abus de position dominante ».
Du côté de France Télécom Interactive, on semble plutôt serein. Stéphane Marcovitch, juriste à FTI, parle d’une tentative de « pression médiatique plus qu’autre chose », et ajoute que si le Conseil de la Concurrence estimait les prix de l’offre promotionnelle trop bas, « il faudrait bien revoir les prix à la hausse ». Une manière de jouer la carte du consommateur… Mais il n’exclut pas non plus que le Conseil de la Concurrence fasse droit à la demande de baisse des coûts d’interconnexion.
Curieusement, ni AOL, ni Cegetel n’ont manifesté de réaction à l’annonce, il y a plusieurs semaines, de forfaits « tout compris » chez Club-Internet et Infonie. Sans promotion, ils rivalisent avec l’offre à durée limitée de Wanadoo.
Entre AOL qui affirme ne pas pouvoir suivre sans vendre à perte et Infonie ou Club-Internet qui semblent indifférents à la querelle, il est difficile de démêler le vrai du faux. Sur le papier, AOL semble avoir raison puisque les fournisseurs doivent reverser à France Télécom une somme qui peut dépasser 10 francs de l’heure de connexion. Multiplié par 20 heures, cela fait une dépense pour le founisseur d’accès de 200 francs par mois et par abonné pour les seules communications et on est loin du tarif de 97 francs « tout compris » de Club-Internet. Mais les fournisseurs d’accès à Internet qui s’appuient sur des concurrents de France Télécom peuvent réduire leurs frais.
Selon Franklin Bohbot, directeur développement et télécommunications à Infonie, les performances tarifaires du fournisseur d’accès ont une explication logique: « Infonie travaille avec l’ensemble des opérateurs du marché, sans être lié avec un seul en particulier ». Ainsi, 50% de son trafic transite par Worldcom, et 50% par Transpac.
AOL, lui, travaille avec son actionnaire Cegetel et devrait donc pouvoir réduire ses coûts. Finalement, l’explication est peut-être ailleurs: Infonie semble avoir fait un pari. Franklin Bohbot: « Infonie s’est indexé sur le catalogue 2000, l’ensemble des propositions tarifaires qu’a fait France Telecom à l’ART. On sait dans quelle mesure certaines propositions seront retenues ou non, et, grâce à notre connaissance du marché, on a fait des hypothèses d’anticipation. »Autrement dit, Infonie anticipe des baisses attendues des tarifs d’interconnexion. La publication officielle des tarifs pour 2000 est prévue pour le 1er décembre, alors qu’elle était attendue pour le 16 novembre. Hasard ou coïncidence, AOL et Cégétel portaient plainte le même jour.
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