A moins de s’être retiré dans un monastère tibétain depuis un an, difficile de passer à côté du phénomène chatbots. Ces bouts de code qui génèrent des messages ou des réponses automatiques dans des messageries instantanées comme Messenger, WeChat, Telegram ou Skype connaissent un vif engouement.
Au printemps dernier, ces agents conversationnels étaient les invités d’honneur des conférences développeurs de Google, Facebook et Microsoft. Les chatbots ne datent pourtant pas d’hier. Au milieu des années 60, le professeur Joseph Weizenbaum avait conçu Eliza, un programme informatique qui simulait une conversation, le plus souvent en reformulant les propos de son interlocuteur. Il avait déjà passé le test de Turing. A savoir parler à un humain sans que ce dernier ne s’aperçoive qu’il s’agit d’une machine.
Depuis les technologies d’intelligence artificielle et de machine learning ont progressé tout comme les usages de plus en plus tournés vers le mobile.
« En 2018, 4 milliards d’hommes seront connectés et, parmi eux, 3,6 milliards utiliseront une messagerie », a prophétisé Laurent Solly, directeur général de Facebook France, lors du Hub Forum organisé le 4 octobre dernier.
« Sur les dix applications les plus téléchargées sur les app stores, six sont des messageries », a-t-il poursuivi. Dont deux du groupe Facebook, Messenger et WhatsApp, qui ont dépassé le milliard d’utilisateurs.
Davantage de messages instantanés que de SMS échangés
« Depuis le 1er janvier 2016, on échange plus de messages instantanés en France que de
Un changement générationnel qui ne peut laisser indifférent les marques. Les chatbots leur permettent de s’insérer dans le fil de la conversation et de nouer une relation personnelle. Mais bien plus que de converser, le bot doit apporter un service.
Avec celui de KLM, le voyageur a son billet électronique dans sa poche, sait où s’enregistrer, est alerté du numéro de la porte d’embarquement et d’un éventuel retard de son vol.
Le bot de Pizza Hut permet, lui, de commander une pizza en moins d’une minute.
Plutôt RD2D que C3PO
Pour Patrice Bonfy, Creative Technologist de The Social Client, un bot doit davantage ressembler à RD2D qu’à C3PO, le duo de robots de Star Wars. Le choix est vite fait entre « un robot qui ne parle pas mais interagit efficacement et un robot bavard et pénible qui ne sert à rien ».
Patrice Bonfy prend l’exemple d’une prise de rendez-vous chez un garagiste. En quatre écrans, le client se géolocalise ou saisit une adresse, choisit la date et valide. « Cela évite une discussion longue et pas forcément rassurante ».
Ce qui n’empêche de jouer sur une note ludique. Lors du dernier Euro, le « coach bot » de La Française des Jeux aidait les joueurs de ParionsSport à devenir de meilleurs parieurs via des quizz portant sur les matchs à venir.
En fait, avec les chatbots, le champ des possibles semble infini. Patrice Bonfy prend l’exemple d’un bot pour une marque de luxe qui pourrait reconnaître un article en vitrine ou acheté par une copine à partir d’une photo et pousser la fiche produit, la vidéo et les accessoires associés.
Dans un magasin de bricolage, un pourrait scanner les codes-barres des trois produits de sa sélection et recueillir les avis des consommateurs déposés sur le site de l’enseigne. Le bot agit en fonction du contexte. Si dans le fil d’une conversation deux rendez-vous, le bot d’Uber est appelé, il va proposer un VTC entre ces deux adresses.
Un bot peut être aussi appelé par la voix avec Siri d’Apple ou l’enceinte connectée Echo d’Amazon. Et demain, on peut imaginer qu’il s’insérera dans nos univers immersifs avec notamment Oculus Rift, autre propriété de Facebook.
Si le bot est appelé à devenir un canal de relation client prioritaire, il ne devrait pas se substituer aux contacts humains d’un live chat ou d’un centre d’appel.
« Il ne remplacera pas l’homme mais l’augmentera, plaide Vanessa Boudin-Lestienne. Nous pensons que 80 % des contacts seront automatisés, les 20 % restant qui exigent un niveau de service élevé sera dévolu aux conseillers. »
Facebook en tête, Microsoft et Google dans sa roue
Du côté de l’offre, si Facebook fait la course en tête avec 11 000 bots créés en deux mois pour Messenger, il ne faudrait pas oublier la concurrence. Dans son approche « conversation as a platform », Microsoft entend « passer d’un mode transactionnel à mode relationnel » comme le formule Michel Rousseau, évangéliste pour les expériences interfaces et utilisateur chez le groupe américain. « Comme inviter l’assistant personnel Cortana dans une conversation sur Skype pour réserver un billet. »
Microsoft a lancé son Bot Framework qui permet aux développeurs de concevoir leurs propres bots fonctionnant dans Skype, Slack, Telegram ou Messenger. Et pour les enrichir, la firme de Redmond propose ses Cognitive Services, des services intelligents de reconnaissance d’images, d’analyse sémantique ou de retranscription speech-to-texte.
A la dernière convention printanière Google I/O, Google a présenté deux nouvelles applications conversationnelles, Allo pour les messages et Duo pour la visioconférence. Début octobre, Google annonçait qu’Assistant, son agent intelligent, s’invitait dans son enceinte connectée Google Home et dans sa nouvelle gamme de smartphones Pixel.
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