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Chronique : La livraison chez les commerçants de quartier, une bonne idée ?

Bien que j’achète souvent dans les magasins « physiques », je suis un client régulier et plutôt satisfait des sites de e-commerce, notamment les grandes enseignes du déstockage et de la vente privée.

Mais, depuis quelques semaines, un constat s’impose à moi : la livraison « en points relais » est très souvent délicate, quand elle n’est pas de temps en temps catastrophique ! Et pourtant je travaille dans l’est de Paris et habite en proche banlieue, pas au fond de la Lozère ou du Cantal…

Je travaille au sein d’une société de services spécialisée dans l’e-commerce et l’intégration de plateformes pour des grands noms de la distribution. Je sais donc qu’un projet e-commerce et sa gestion au quotidien est d’une grande complexité.

Reste que certains acteurs – au premier rang desquels l’incontournable Amazon – ont su rendre plus simples et plus pertinents leurs services – prise de commande, paiement, suivi de commande, livraison, etc.

Tandis que  d’autres au contraire, dans l’univers du e-commerce français (le seul que je connaisse bien), n’ont pas encore fait tous les efforts qui s’imposent pour faciliter la vie des consommateurs et rendre l’achat en ligne à la fois facile et pratique.

Là où le bât blesse…

Un constat s’est particulièrement imposé à moi au cours des dernières semaines: la livraison est vraiment là où, le plus souvent, le bât blesse… Il y a le coût bien sûr, souvent incroyablement élevé quand on le rapporte à la valeur des produits expédiés ou aux temps de livraison imposés (particulièrement pour les sites de déstockage et ventes privées).

Mais, au-delà, il y a un point tout à fait préjudiciable pour les consommateurs : la livraison en points relais et autres commerce de proximité.  Si l’idée est excellente sur le papier (c’est à dire permettre de retirer son ou ses colis dans un commerce proche de chez soi ou de son travail, à moindre coût et dans un espace horaire assez large), la réalité « du terrain » m’a montré qu’il y avait loin de la coupe aux lèvres.

Voici une petite liste des désagréments subis au cours des dernières semaines (non exhaustive) :

•    La livraison d’un colis au nom de mon entreprise, là où il s’agissait d’un achat personnel et l’impossibilité qui m’est faite (même en appelant le site vendeur) de récupérer le colis sans extrait Kbis, le commerçant se montrant très agacé (euphémisme) par mon insistance. J’abandonne !

•    Le patron d’un bar faisant office de « point relais », d’abord bougon puis insultant, qui m’explique que je ne suis pas SON client et qu’il ne veut rien savoir de MOI quand j’essaye de lui dire aussi calmement que possible que le colis reçu à mon nom est une erreur du site et que je souhaite un retour du colis à l’expéditeur. « Ça n’est pas mon problème » me répète-t-il à plusieurs reprises en guise de conclusion !  Devant tant de compréhension et de savoir-vivre, j’abandonne !

•    Un point relais prévu à 200 mètres de mon travail se retrouve soudainement fermé et le site  « reroute » alors (après une enquête « interne » de 15 jours !) mon colis sans qu’une nouvelle date de livraison ne me soit jamais fournie. Plusieurs jours après, je reçois un SMS de la société de transports mandatée par le site m’informant que le colis a été livré dans une épicerie exotique d’une ville de banlieue distante de quelques kilomètres de chez moi… Arrivé sur place, l’épicier me dit « je ne peux pas vous donner votre colis, je travaille pour mon magasin, revenez dans 1 à 2 heures ». J’abandonne !

•    Le site e-commerce a fractionné en deux colis distincts une commande qui aurait dû être livrée en un seul… Rien de grave ? Non, mais le comble c’est que la livraison s’effectue du coup sur deux points relais différents (l’information ne me sera donnée qu’à postériori par le service téléphonique surtaxé du vendeur alors que je m’étonne de n’avoir reçu qu’une livraison partielle, la moins urgente…) ! Comme cette commande comportait des produits pour mes vacances d’été et que le tout est arrivé le 28 août : j’abandonne !

•    Cerise sur le gâteau: ce commerçant qui, alors que je lui tends ma pièce d’identité dont il regarde seulement apparemment la photo, me tend la liste des colis reçus pour que je  tente de retrouver mon nom car… Il « ne sait pas lire en français » (authentique) ! Bon, là je suis plus triste qu’autre chose : je n’abandonne pas et l’aide à me retrouver dans sa liste…

Une sorte d’ubérisation à marche forcée

En y réfléchissant bien, il semble que le problème soit dans une large part lié à l’appel des e-commerçants à une sous-traitance massive auprès de sociétés logistiques pas toujours suffisamment dimensionnées ou bien organisées…

Entreprises qui, elles-mêmes, dans une sorte d’ubérisation frénétique et à bon compte, se rabattent sur des commerces de proximité en guise de points relais un peu partout dans les grandes villes.

L’idée pour elles est de disposer du maillage le plus serré possible pour optimiser leurs livraisons et imposer leur marque face à la concurrence…

Reste que le mouvement a été réalisé à grande vitesse et sans grand discernement, auprès de commerçants pas toujours des plus motivés (on n’ose pas dire formés), sans doute pour cause de rémunération trop faible rapportée au temps de travail effectué et à la pénibilité de la tâche.

Malgré mes anecdotes un peu cruelles sur le manque de sérieux des commerçants de proximité en matière de délivrance de colis, on ne peut leur jeter totalement la pierre car ils se sentent parfois piégés, ou au bas mot frustrés, le passage au sein de leur point de vente se traduisant très rarement par des ventes in situ.

C’est pourtant un argument massue qui a été utilisé par nombre de sites e-commerce et de sociétés de logistique pour les convaincre de se transformer en supplétifs de leurs livraisons et d’accepter un pourcentage indigne sur chaque colis délivré…

Sur le papier, ce mode de livraison à trois bandes apparaissait comme une alternative intéressante à une livraison à domicile pas toujours envisageable (ou souhaitable) et à une livraison aux heures de bureau dans son entreprise là encore pas toujours possible.

Hélas, on l’a vu, elle a au contraire pris pour moi ces derniers temps l’allure d’un parcours du combattant, et je ne pense pas être le seul concerné (il suffit de lire les forums et les avis consommateurs sur les réseaux sociaux, voire directement au sein des sites e-commerce, pour en être convaincu)…

Ma conclusion personnelle provisoire est que je vais me passer de ce type de livraisons à l’avenir. Cela devrait freiner aussi un peu mes achats d’impulsion, si souvent agacé que je suis déjà par les temps de livraison extrêmement longs annoncés (notamment par Vente-privée.com, Showroomprivé.com ou encore BrandAlley).

Cela pourrait bien aussi défavoriser mes e-commerçants français préférés au profit du seul acteur (ou presque) avec qui je n’ai pas eu de souci à ce jour en matière de livraisons sans pour autant avoir souscrit son offre Premium : Amazon…

* Notre chroniqueur David Hugues est un pseudonyme.

Relire sa première contribution sur ITespresso.fr : La distribution omni-canal, c’est pas gagné ! (mars 2015)

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