Comment le mobile bouleverse l’e-marketing
Après des années d’attente, le mobile s’impose enfin dans les usages. Mais comment réaliser du business sur cet écran ? Quelles sont les bonnes pratiques ?
15 ans après l’apparition du WAP, les professionnels du numérique ont longtemps attendu le décollage de l’Internet mobile. Après plus d’une décennie de déceptions et de faux départs, cette année devrait néanmoins marquer une rupture : Selon l’Union internationale des télécommunications (UIT), l’année 2014 devrait non seulement voir le nombre de mobinautes (2G+, 3G, 4G) dépasser celui des internautes (environ 2,5 milliards) mais également le nombre d’abonnés au téléphone, dépasser symboliquement la population mondiale avec plus de 7 milliards de cartes SIM en circulation.
Côté équipement, les ventes de smartphones ont dépassé depuis déjà 5 ans celles des ordinateurs. Mais l’année 2014 devrait voir ces ventes franchir allègrement le cap du milliard annuel, et peut-être également voir les ventes de tablettes (tous OS confondus) dépasser celles des ordinateurs traditionnels.
Une ère « Post PC » qui se traduit également dans les usages. Selon une récente étude AT Internet, la consommation de l’internet mobile explose (+40%) quand celle du Web recule de plus de 10%. Conséquence, le mobile est devenu le premier média.
Selon ComScore, les américains âgés de 18 à 24 ans y consacrent 20% de leur temps. Et selon le consultant Tomi Ahonen, l’écran du mobile est consulté plus de 150 fois par jour, représentant un total de 116 minutes, passant symboliquement devant les 113 minutes quotidiennes consacrées à la télévision.
Même si le succès des smartphones a surtout fait la fortune des opérateurs cellulaires ou des constructeurs de smartphones, les success stories se multiplient depuis peu dans l’univers des contenus et des services.
En quelques années, un service en ligne comme Facebook est devenu « Mobile First » et estime qu’il réalise déjà plus de 57% de son chiffre d’affaires trimestriel de 2,5 milliard de dollars sur son application qui réunit, il est vrai, plus d’un milliard de mobinautes chaque mois.
« Le succès de Facebook masque néanmoins les difficultés des éditeurs pour monétiser leurs applications. Il ne faut pas hésiter à combiner un modèle publicitaire avec un modèle premium pour maximiser ses sources de profit, tout en investissant massivement dans le CRM et des scénarios marketing avancés, pour fidéliser les mobinautes » explique Mathieu Treutenaere, directeur de Smart&Soft, une agence marketing mobile co-éditant une vingtaine d’applications et une plate-forme de notifications baptisée PushR.
Un modèle freemium, particulièrement efficace dans l’univers du gaming, depuis les succès d’Angry Birds ou plus récemment de King Digital avec Candy Crush. Encore inconnu début 2012, cet éditeur britannique a réalisé un chiffre d’affaires de près de 2 milliards de dollars en 2013 en profitant du gigantesque parc de 2 milliard de smartphones en circulation, près de 20 fois supérieur à celui de consoles « historiques » telles que la Game Boy (Nintendo) ou la PlayStation (Sony).
Mais le mobile ne bouleverse pas que le commerce immatériel. Dans le commerce électronique « physique », le mobile représente déjà de 10 à 20% des échanges, en croissance rapide. Mais selon un pure player comme Vente-Privée.com, spécialisée de la vente événementielle, le m-commerce représenterait déjà plus de 40% de son activité, et pourrait très prochainement devenir majoritaire.
Notification push et Internet mobile : ne pas en abuser
Concevoir et promouvoir une application n’est toutefois pas suffisant pour rencontrer le succès et se démarquer du million de références de l’App Store d’Apple ou de Google Play.
« Les mobinautes téléchargent des dizaines d’applications mais n’en utilisent que 5 ou 6. Pour améliorer les taux d’activité, il faut solliciter les utilisateurs au travers de notifications push. Mais il faut veiller à éviter une communication trop intrusive en ciblant la bonne personne, au bon moment et sur le bon écran. Autrement, on prend le risque d’une désinstallation ou d’une mauvaise note sur un App Store« , explique Youssef Faury, co-fondateur de Capptain, un éditeur proposant une plate-forme de marketing automation et d’analyse d’audience sur mobile et comptant plusieurs centaines de références.
Des bonnes pratiques qui ont par exemple permis à Ahead Solution, éditeur d’un jeu de pendule, de quadrupler ses revenus et de rentabiliser son application. « Malgré plus de 7 millions de téléchargements, nous n’arrivions pas à dégager un revenu suffisant. Nous avons pris le temps de bien comprendre le comportement des joueurs, de mettre en place les bons indicateurs, de tester de nouveaux formats publicitaires, de nouveaux modèles de revenus. L’équilibre est fragile mais nous sommes parvenus à satisfaire nos utilisateurs tout en rentabilisant nos investissements », explique Sébastien BOTTALICO, Directeur de Ahead Solutions et de la régie AdDeals.
Après plus d’une décennie de « search engine optimisation » et autres achats de liens sponsorisés, l’avenir du e-marketing ne repose donc plus uniquement sur les outils de recherche comme Google mais impose également la maitrise de nouveaux leviers tels que les réseaux sociaux mobiles et les magasins d’applications. Reste à savoir si tous les acteurs du marketing digital répondront présents à cette « mobilisation générale ».