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Concurrence : l’épineuse question des véhicules de tourisme avec chauffeur

Dans une communication – document PDF, 24 pages – transmise le 16 décembre 2013 au gouvernement et au Conseil d’État, l’Autorité de la concurrence rend un avis défavorable à l’égard du projet de décret qui vise à modifier l’article D. 231-1-1 du code du tourisme.

La disposition centrale consiste à imposer aux exploitants de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC*) un délai obligatoire de 15 minutes entre la réservation d’une voiture et la prise en charge d’un client. Inscrit dans un contexte de forte tension vis-à-vis des sociétés de taxis, cet amendement introduirait, selon l’Autorité, « une double distorsion de concurrence sur le marché de la réservation préalable […] au détriment du consommateur » (temps d’attente allongé, prix des courses plus élevé).

L’avis rendu en ce sens la semaine passée suppose une segmentation du secteur du transport particulier de personnes à titre onéreux en deux marchés : la réservation préalable… et la maraude, en d’autres termes la prise en charge de clients sur la voie publique. Sur ce dernier point, les taxis « jouissent d’un monopole légal […] qui découle de l’autorisation de stationnement dont ils sont titulaires et qui est la contrepartie de la réglementation à laquelle ils sont assujettis« .

Pas de monopole légal

La cohabitation se complique vis-à-vis des des radio-taxis, qui, via les centrales de réservation, fonctionnent sur le principe même des VTC. Mais l’Autorité de la concurrence estime qu’en la matière, les taxis « n’ont jamais disposé d’un monopole légal« , étant positionnés sur le créneau des voitures de petite et grande remise. En outre, après l’annonce, cet été, d’une série de mesures parmi lesquelles l’obligation aux exploitants de VTC de justifier d’une réservation préalable, les comportements illicites qui persisteraient « ne relèvent pas de la concurrence, mais de la fraude« .

Et d’en conclure que les distorsions en question ne sont « ni nécessaires, ni proportionnées aux impératifs d’intérêt général qui sont poursuivis« . Elles sont mêmes « potentiellement contraires à l’objectif affiché de faciliter la fluidité de la circulation« , les véhicules disponibles à proximité étant en l’occurrence obligés de rouler à vide jusqu’à l’écoulement du délai de 15 minutes, « alors qu’à Paris, ils sont capables de répondre à une demande en 7 à 8 minutes« .

Les sociétés de VTC ont par ailleurs mis en avant le fait que leur fonctionnement rend, en pratique, la maraude très difficile : leur logiciel sait à chaque instant quels véhicules sont libres et leur affecte des courses à mesure qu’il enregistre des réservations. Par conséquent, si l’un des chauffeurs a chargé un client hors de toute réservation, il apparaîtra toujours comme disponible, mais ne pourra, par définition, par charger le client qui lui est affecté.

Dans un contexte où la demande en prestations de transport particulier est supérieure à l’offre à certaines heures et dans certains lieux, l’Autorité de la concurrence préconise au gouvernement de renoncer à son projet de décret ou bien de l’assortir d’exceptions beaucoup plus larges. Cités pour l’exemple, les réservations de clients déjà abonnés à une société de VTC, les demandes émanant d’hôtels ou d’organisateurs d’événements dès lors qu’ils disposent de services de voituriers ou de parkings privés…

Autre pistes explorées : permettre aux taxis d’appliquer une tarification plus libre en matière de réservation préalable et mettre en place un outil statistique destiné à mesurer l’offre et la demande de taxis pour documenter les études d’impact que justifie tout changement apporté aux règles de cette profession.

En France, le marché de la réservation préalable est dominé par le groupe G7, qui, par l’intermédiaire de ses filiaes G7 et Taxis Bleus, compte près de 10 000 taxis affiliés à Paris. Leur tarification est fixée, au contraire de celle des VTC, qui exploitent plusieurs modèles économiques : LeCab et Chauffeur-Privé fonctionnent avec des chauffeurs indépendants et se rémunèrent par une commission sur le prix de chaque course. Voitures Jaunes est propriétaire de ses 60 véhicules et salarie ses 90 conducteurs.

* VTC est l’appellation officielle des voitures de grande remise depuis la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009, qui a assoupli les conditions d’exercice de cette activité en supprimant notamment la ‘licence de grande remise’, ainsi que le contingentement départemental de leur nombre. En décembre 2013, 6515 entreprises de VTC – dont près de 50% en Ile-de-France – étaient immatriculées au registre tenu par Atout France. Elles exploitaient 12 404 véhicules et employaient 13 962 chauffeurs.

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Crédit photo : Brian A Jackson – Shutterstock.com

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