Comment élargir le champ des expérimentations de véhicules autonomes ? En leur ouvrant certaines voies publiques et en permettant leur circulation sans personne derrière le volant.
La future loi pour la croissance et la transformation des entreprises contient des dispositions dans ce sens. Tout du moins d’après plusieurs médias qui ont eu accès à une première version du texte, dont la présentation en Conseil des ministres est prévue pour le mois de mai.
Avec l’objectif de poser un cadre pour 2019, le gouvernement compte également autoriser la circulation d’engins roulants « à délégation partielle ou totale de conduite affectés au transport de colis […] sur des parcours pouvant comporter des parties de trottoir et des parties de chaussées ».
La responsabilité pécuniaire et pénale n’incomberait pas aux conducteurs, mais aux titulaires des autorisations. En l’occurrence, les constructeurs ou les sociétés chargées des expérimentations.
Pour ce qui est de la circulation sur des routes publiques, elle est aujourd’hui soumise à des dérogations. Un ordonnance d’août 2016 permet, sous un strict encadrement, la circulation expérimentale de véhicules « à délégation partielle ou totale de conduite », sous réserve d’un décret en Conseil d’État et d’un arrêté interministériel.
Emmanuel Macron s’était exprimé sur ce point la semaine passée, dans le cadre de la présentation de la stratégie nationale en intelligence artificielle. Il avait affirmé que des véhicules de niveau 4 (autonomie quasi totale) pourraient, dès 2019, évoluer sur certaines voies – notamment les autoroutes – dans des conditions météo favorables.
En toile de fond, la mise en place d’un « cadre de régulation » qui permette la circulation des véhicules autonomes en France d’ici à 2022. Soit l’année que les constructeurs visent* pour un lancement commercial.
Le président de la République avait aussi souligné l’importance d’une coopération avec l’Allemagne, face à la Chine et aux États-Unis.
Le Sénat dresse le même constat dans un rapport d’information présenté fin 2017 : pour être entendus à l’échelle de la planète, notamment sur les questions de vie privée et de traitement des données personnelles, les États membres de l’UE devront « rester groupés ».
Ledit rapport pose aussi la question du cadre juridique. Dans l’Union, la circulation automobile est régie par le droit international, et plus particulièrement la Convention de Vienne.
Cette dernière, adoptée en 1968, dispose, en son article 8, que « tout véhicule en mouvement ou tout ensemble de véhicules en mouvement doit avoir un conducteur ». Ce qui semble difficilement compatible avec la conduite autonome.
Cinq pays de l’Union européenne (Chypre, Espagne, Irlande, Malte, Royaume-Uni), tout comme la Chine, les États-Unis, le Japon et l’Australie, n’ont pas ratifié cette convention et s’en tiennent à celle votée en 1949 à Genève… sans les dispositions susmentionnées.
Il en résulte, estime le Séant, « une incontestable distorsion de concurrence dans la recherche ». Les États-Unis ont d’ailleurs pris de l’avance avec le Self Drive Act, qui permet la circulation à titre expérimental de 100 000 véhicules sur toutes les voies du pays.
En Californie, les autorités ont récemment approuvé une révision réglementaire qui ouvre la voie à l’expérimentation de véhicules autonomes sans volant ni pédales. Les premières licences sont accordées depuis cette semaine.
* Le Premier ministre Édouard Philippe estime que l’échéance 2020 peut être envisagée moyennant un aménagement des territoires, une adaptation des compétences et une « transformation profonde » du cadre réglementaire.
Crédit photo : landrovermena via Visualhunt.com / CC BY
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