Marie Ekeland n’a pas résisté à la pression subie par la recomposition du collège du Conseil national du numérique.
A peine nommée à la tête de cette instance consultative chargée d’éclairer le gouvernement sur les questions liées à l’usage des technologies, la fondatrice du fonds d’investissement Daphni annonce sa démission dans une contribution dense en date du jour sur le site Internet du Conseil national du Numérique.
Une polémique avait éclaté juste après la présentation officielle de la nouvelle configuration survenue la semaine dernière.
Les nominations de deux personnalités de la « société civile » du collège CNNum ont suscité des remous dans le monde politique et sur les réseaux sociaux : Rokhaya Diallo (« déconstruit les mécanismes de la construction de la haine en ligne et défend les droits des afro-descendants et des minorités au sens large » selon la description de Marie Ekeland) et Hicham Kochman aka Axiom (« rappeur engagé pour l’égalité des droits secoue les musiques urbaines avec sa startup »).
Des profils atypiques transformés en « caricatures » selon la présidente du CNNum.
« La violence de cette réaction a profondément déstabilisé le projet dans son ensemble. Nous avons beaucoup travaillé de concert cette dernière semaine avec Mounir Mahjoubi et les membres du CNNum à trouver une solution qui permette d’en conserver son intégrité et son entièreté. Nous n’y sommes pas arrivés », constate Marie Ekeland.
« J’ai donc présenté aujourd’hui ma démission à Mounir Mahjoubi afin de laisser la place à une autre vision au CNNum. »
Le secrétaire d’Etat chargé du Numérique avait demandé à la nouvelle présidente de revoir la composition du CNNUm pour « travailler plus sereinement » mais l’exercice s’est révélé plus délicat dans un contexte survolté.
Marie Ekeland en ressort amère. « La violence de cette réaction a profondément déstabilisé le projet dans son ensemble. Nous avons beaucoup travaillé de concert cette dernière semaine avec Mounir Mahjoubi et les membres du CNNum à trouver une solution qui permette d’en conserver son intégrité et son entièreté. »
Dans cette contribution intitulée « Demain est un autre jour« , Marie Ekeland souligne des points de crispation dans le débat public.
« Les réactions qui ont suivi cette nomination me font mesurer à quel point mon pari était osé et innovant. À quel point, dans notre pays, nous ne voulons pas entendre des voix dissonantes. À quel point nous ne savons plus débattre sereinement de nos divergences de vue. À quel point nous avons du mal à nous mettre à la place des autres. À quel point réseaux sociaux et immédiateté du jeu politique alimentent la violence de la parole et la stigmatisation. »
L’éphémère présidente du CNNum souligne également un déficit de gouvernance.
« D’une part, il est indispensable que des instances comme le CNNum existent pour protéger des espaces de discussion, d’échanges, longs, complexes et contradictoires, dégagés du jeu médiatique. D’autre part, la forme actuelle de nomination et de fonctionnement du CNNum portent à confusion et ne peuvent pas garantir son indépendance. »
Sur les six derniers jours, Twitter a permis de marquer son soutien à Marie Ekeland face à l’épreuve ou d’enfoncer le clou.
Les tergiversations ont suscité aussi des réactions de la part d’organisations professionnelles qui s’estimaient non représentées dans la nouvelle configuration comme Cinov IT.
Le « syndicat des TPE-PME et indépendants du numérique » regrettait que la nouvelle composition « ne reflétait pas la diversité des acteurs de la transformation numérique ».
Dans la foulée de la démission de Marie Ekeland à titre individuel, les membres du CNNum semble avoir pris une décision similaire dans un mouvement collectif, à en croire un tweet officiel.
La refonte du CNNum, désormais sous la supervision du gouvernement (avec Mounir Mahjoubi en première ligne), se transforme en débat passionnel.
C’est sans doute le moment opportun pour renforcer le socle ou tourner la page.
(Crédit photo : Marie Ekeland, Présidente du CNNUm, et Mounir Mahjoubi, secrétaire d’Etat chargé du Numérique, à la conférence de presse du 12 décembre 2017)
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