Dans le vivier de start-up dédiées à la FinTech, beaucoup ont envahi la catégorie « crédit » en France.
Mais le succès qu’elles ont tous en tête est localisé aux Etats-Unis : Lending Club, la plateforme de prêts entre particuliers dont la création remonte à 2007 et dont la cotation au NYSE a démarré en décembre 2014.
Belle reconnaissance : son fondateur – le Français Renaud Laplanche – se classe 28ème du top 50 des personnalités les plus influentes dans le monde économique selon Bloomberg.
Alors de quelles pépites disposons-nous en France ? Lors d’une série de tables rondes organisées mardi dernier par l’ACSEL sous la houlette de Laurent Nizri (Alteir Consulting), on découvre encore un peu plus la génération montante de services de crédit en mode crowd à destination des internautes français.
A commencer par Prêt d’Union, la plateforme de crédits entre particuliers pour acquérir des biens de consommation.
Selon son directeur des ventes Frédéric Chaignon, l’activité connaît une accélération : c’est un volume de 230 millions d’euros qui a été octroyé en crédit depuis la création de la société en fin d’année 2011. Dont la moitié en 2015.
Prêt d’Union recense entre 25 000 et 30 000 emprunteurs d’un côté et 2500 « investisseurs qualifiés » de l’autre (c’est-à-dire disposant de connaissance assez fortes de placement financiers : personnes physiques, sociétés de gestion de placement, family office…). « En moyenne, ils prennent entre 5 et 10 % de leur épargne », précise notre interlocuteur.
Sachant que Prêt d’Union garantit aux investisseurs un rendement situé entre 3 et 5% par an (mais « jusqu’à 6% par an » en rendement annuel estimé selon le site Internet)
Toujours selon Frédéric Chaignon, les taux d’intérêt des crédits octroyés par Prêt d’Union sont plus modérés que ceux avancés par les banques traditionnelles (« Comptez entre 0,5% et 1% moins cher »).
Le service en ligne recense environ 100 000 demandes d’emprunteurs par mois. Un quart des dossiers sera validé avec le scoring (appréhension du niveau de solvabilité d’un emprunteur par le biais du calcul d’un score). « Finalement, 2000 à 3000 seront acceptés par mois. »
Le marché est « gigantesque » : 40 milliards de crédits (correspond à la production annuelle des crédits à la consommation). « Notre objectif est de capter entre 0,5 et 2% de part de marché », affiche le directeur des ventes.
« On ne marche pas sur les plates-bandes des banques mais on va grappiller à la marge ». Certes, des établissements spécialisés comme Cetelem (filiale de BNP-Paribas) ou Sofinco (filiale de Crédit agricole) risquent de grincer davantage des dents.
Et le choix des prestations s’élargit : à travers son partenaire Empruntis.com, le service de la catégorie « P2P lending » s’adresse aussi aux ménages pour la souscription à un crédit immobilier.
Autre témoignage d’un acteur FinTech : Crédit.fr a pris d’emblée position sur le crowdlending (prêts de particuliers aux TPE-PME). Quelles différences de prestations par rapport à une banque traditionnelle ?
Thomas de Bourayne, CEO de Crédit.fr, distingue l’expérience utilisateur, la capacité de sélectionner les bons projets, une réponse rapide de pré-éligibilité (« 15 secondes ») donnée aux entreprises qui cherchent à emprunter.
« La réponse définitive est donnée en moins de 48 heures. On tend vers 24h00 », assure notre interlocuteur. Quand au rendement annuel des emprunteurs, il se situerait entre 4 et 8,78%.
Invité à cette même table ronde ACSEL, Jean Rognetta, Délégué général de PME Finance / Croissance Plus, considère que Crédit.fr s’adresse en priorité aux « papiers gris » c’est-à-dire les dossiers des PME refoulées par les banques traditionnelles.
Thomas de Bourayne préfère considérer que les PME viennent voir son service de crowdlending pour « lever les contraintes bancaires » et disposer « d’un accès rapide » à une source de financement pour acquérir des actifs immatériels, accélérer le développement ou satisfaire des besoins en fonds de roulement.
Profil type de la société qui vient frapper à la porte de Crédit.fr (propriété de Truffle Capital*) : « Les PME réalisent entre 500 000 à 3 millions de chiffre d’affaires. Et elles ont moins de quatre ans d’existence. »
Selon « Mr Crédit.fr », la société reçoit entre 40 et 70 demandes de projets par jour. Mais seule une proportion de 1 à 2% des dossiers est mise en ligne et proposée au cercle des prêteurs.
Dans ce monde du financement participatif pour prêter de l’argent aux entreprises (crowdlending), Grégoire Dupont, Secrétaire général de l’Organisme pour le registre des intermédiaires en assurance, banque et finance (ORIAS), est un observateur avisé.
Outre l’agrément d’établissement de crédit auprès de l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution), les acteurs prenant position doivent disposer du statut d’Intermédiaire en Financement Participatif (IFP).
Et l’association ORIAS rattachée à la Direction générale du Trésor se charge de leur immatriculation.
« On recense une cinquantaine de plateformes qui ont le droit de se lancer, dont une trentaine qui sont actives », précise Grégoire Dupont. « C’est un métier de banquier avec une analyse du risque en prêtant à une entreprise. Il faut rechercher un effet de volume (…) On tend vers une économie oligopolistique. »
La confiance entre maillons de la chaîne du crowdlending (plateforme – emprunteurs – prêteur) est essentielle. Quitte à essuyer les plâtres en cas de défaut de paiement ?
En décembre 2014, le pionnier Unilend annonce la mise en redressement judiciaire de Smok-It (commercialisation de cigarettes électroniques en grande distribution).
Trois mois plus tôt, cette société avait emprunté 75 000 euros auprès de 329 prêteurs via la plateforme de crowdlending à un taux de 9,6%.
Mauvaise pioche avec Smok-It qui tombe finalement en liquidation judiciaire en avril 2015. En cas de défaut de paiement, le prêteur risque de perdre définitivement sa mise de départ sur une plateforme de crowlending.
« Prêter présente un risque de non-remboursement », avertit Unilend. Mais il faudra se montrer plus rigoureux pour éviter ce genre de désagrément susceptible de nuire à l’image du secteur en France.
D’autant plus que l’ouverture du crowlending en France (et du financement participatif au sens large), ce n’était pas gagné d’avance, se rappelle Grégoire Dupont, en raison des puissants lobbys financiers qui se sont activés.
« Les banquiers ont tout fait pour dézinguer le projet », balance-t-il de manière assez cash.
Dorénavant, des passerelles entre les deux mondes commencent à s’ériger : Allianz – SmartAngels, Groupama Banque – Unilend ou Bolden – BPCE.
*Full disclosure : Truffle Capital est actionnaire de NetMediaEurope, éditeur d’ITespresso.fr.
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