Lionel Jospin a officiellement installé, mercredi 11 avril, le Conseil stratégique des technologies de l’information (CSTI). Initiative du Comité interministériel pour la société de l’information (CISI) du 10 juillet 2000, « le CSTI est investi d’une mission de conseil du Premier ministre, auquel il peut adresser toute proposition dans le domaine des technologies de l’information et formuler des recommandations », rapporte le communiqué. Autrement dit, cet organisme sera chargé d’émettre des avis et des projets d’orientation sur les enjeux technologiques, de formation, d’information et de société. Avis que suivra ou non le gouvernement.
Le Conseil est constitué de 23 personnalités dont, en majorité, les dirigeants de grands groupes privés et publics (Alcatel, ARCO, Thomson, France Télécom, Ilog, Infogrames, Dassault Systèmes, Vivendi, La Poste…) ainsi que des représentants de start-up (LiberaFilms, Mandrakesoft, Aufeminin.com…) et des chercheurs ; il se réunira trois fois par an. Sous l’égide du Conseil Général des Technologies de l’Information (CGTI) présidé par Didier Lombard, la première réunion a été consacrée aux infrastructures et réseaux, aux applications et services, aux besoins en hommes et en spécialistes ainsi qu’à la recherche et au développement.
Des courants associatifs faiblement représentés
Parmi tous les membres, on pourra s’étonner de la faible représentativité des représentants des courants associatifs citoyens et « non-marchands ». Jacques Le Marois, président de Mandrakesoft et membre de l’Aful, l’association qui défend l’usage du logiciel libre, semble bien seul parmi les industriels et les chercheurs. « Cela ne m’étonne pas trop », relève Laurent Chemla, directeur de Gandi et membre du Gitoyen (voir édition du 16 février 2001). « D’abord parce que les membres des associations ont généralement un emploi du temps assez chargé, mais surtout parce qu’ils ne souhaitent pas légitimer, par leur présence, un organisme qui risque avant tout de servir à cautionner les orientations des industriels. Ce conseil est une façon très franco-française de légitimer les lobbies. Et ce ne sont pas les associations citoyennes qui vont équilibrer le rapport de force. ». Laurent Chemla préfère lutter à coups de recours constitutionnels pour invalider une loi inadaptée. « Je ne dis pas qu’il ne sortira que des mauvaises choses de ce conseil, mais je constate qu’Internet fait peur. » Peur aux industriels qui voient leur modèle déstabilisé par la suppression des intermédiaires qu’induit le fonctionnement du réseau peur au gouvernement qui perd le contrôle de son rôle de représentant officiel de la voix citoyenne. « Le gouvernement censé représenter les citoyens représente, de fait, de plus en plus les industriels », accuse Laurent Chemla.
Moins radical, Stéphane Fermigier, président de l’Aful, se satisfait de la présence d’un représentant de son association même si « Mandrakesoft est avant tout une entreprise à vocation économique », précise-t-il. « Il y a toujours matière à débat sur les choix technologiques et l’absence d’un représentant du libre serait regrettable. » A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous n’avons pas réussi à joindre un porte-parole officiel du CSTI. Il nous est donc, pour le moment, impossible d’avoir leur avis sur la question de l’intérêt de cet organisme, ni sur le mode de sélection des membres et les fréquences éventuelles de renouvellement du bureau. A suivre, donc.
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