Luc Ferry et son analyse comparée des Anonymous avec les contestataires de la fin du XIXe siècle, Jean-Christophe Ruffin apportant son expertise d’ambassadeur pour expliquer la montée en puissance du terrorisme… Chaque année aux Assises de la sécurité, la plénière du second jour est réservée à des interventions « décalées » avec des personnalités issues d’autres univers que la cybersécurité.
Pour cette édition 2014, c’est le docteur Laurent Alexandre qui a tenu une conférence sur le hacking du cerveau. Pour cet entrepreneur multidiplômé et fondateur de Doctissimo, le cerveau, longtemps considéré comme un « sanctuaire regroupant notre pensée et notre conscience », va se retrouver au coeur de la cybersécurité avec le développement des neurosciences, d’Internet et de l’intelligence artificielle.
A une condition : être capable de collecter efficacement de l’information. Notamment via le séquençage ADN, qui renseigne sur la structure mentale : une analyse de l’ocytocine permet par exemple de définir le niveau d’empathie d’une personne. Les capteurs intégrés dans les prothèses (oculaires, auditives…) et les objets connectés liés à des solutions de santé/fitness comme HealthKit d’Apple donneront aussi des renseignements sur la façon dont le cerveau réagit. L’analyse big data, appliquée entre autres à des profils Facebook, pourra faire remonter encore d’autres éléments, tout comme les MooC (cours en ligne) dénoteront la volonté et la capacité d’apprendre.
Comme le note Silicon.fr, cette collecte nécessite une capacité gigantesque de traitement que Laurent Alexandre nomme Connectome et qu’il estime actuellement à 100 000 milliards de connexions. En langage HPC, ce besoin devrait atteindre le yottaflop pour l’ensemble du cerveau en 2040. A cette échéance, les connaissances sur le cerveau pourraient être exploitées pour anticiper des actes terroristes.
D’après Laurent Alexandre, les futurs « hackeurs du cerveau » sont les acteurs du Web. Google « mène la danse » avec une idéologie de transhumanisme articulée autour de plusieurs axes : l’intelligence artificielle, l’interfaçage de l’IA avec le cerveau biologique et l’allongement de la durée de vie. Le groupe Internet investit massivement dans la fusion de l’IT et de la neurologie avec, selon Laurent Alexandre, « des conséquences dans la modification du cerveau ».
Le scientifique se dit particulièrement perturbé par le discours de Raymond Kurzweil. Le directeur du développement de Google annonçait récemment : « Préparez-vous à la pensée hybride. »
La « neurorévolution » est attendue entre 2015 et 2050. Elle posera beaucoup de questions de sécurité, avec de nombreux dispositifs exposés au piratage : voitures autonomes qui intègrent de l’intelligence artificielle, prothèses médicales connectées… Autant d’objets qui pourraient modifier le comportement ou la perception s’ils étaient compromis.
« La neurosécurité va devenir le premier des droits de l’homme« , résume M. Alexandre. S’adressant aux acteurs de la cybersécurité, il conclut : « Vous allez avoir du business pendant de nombreuses années à condition de s’intéresser au cerveau et aux neurosciences« .
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