PGR, une jeune société néerlandaise, propose une solution originale qui pourrait partiellement résoudre les problèmes générés par les réseaux d’échanges de fichiers. En effet, même si aucune étude sérieuse n’a été publiée sur les causes des récentes baisses de revenus de l’industrie musicale (une baisse de 9 % en 2002 selon l’association lobbyiste américaine la RIAA), les maisons de disques, soutenues par Hollywood, accusent le peer-to-peer (P2P) de tous les maux. PGR propose donc tout simplement d’échanger du téléchargement de fichiers soumis à des droits d’exploitation contre du temps de calcul. Autrement dit, l’utilisateur met une partie des ressources processeur de sa machine à disposition de PGR, lequel commercialise cette puissance de calcul mutualisée et rémunère ainsi directement les artistes. Du calcul partagé à la manière de Seti@home (voir édition du 24 janvier 2000) appliqué au P2P. Il suffisait d’y penser.
PGR ne se contente pas d’y penser. La société applique son idée sous forme d’un service d’échange intitulé « The Honest Thief » (le voleur honnête) servi par ThankYou, le logiciel proposé pour gérer le calcul partagé et les échanges de fichiers. Pour le moment disponible en version 1.0 à titre d’évaluation, il se destine aux éditeurs de solutions P2P comme Kazaa ou Grokster. Une version 2.0 est attendue pour le deuxième trimestre. Apparemment, seuls les utilisateurs de Windows bénéficieront de la solution, aucune version pour Linux ou Mac OS n’étant à ce jour prévue.
PGR en profite d’ailleurs pour enfoncer le clou et parle de rémunérer directement les musiciens sans évoquer les maisons de disques. De là à inciter les artistes à se défaire des majors, il n’y a qu’un pas que le fondateur de la société n’hésite pas à franchir. « Nous sommes les premiers, mais certainement pas les derniers, à éliminer les maisons de disques de l’équation », déclare Pieter Plass. Il est vrai que dans le schéma où les artistes mettent directement leurs oeuvres à disposition des internautes, les intermédiaires auront tendance à disparaître, même si la réalité n’est pas aussi simple. D’autant qu’aucun détail sur les droits à télécharger qu’ouvrirait telle ou telle puissance de calcul n’est formulé.
Le P2P protégé par les Pays-Bas
PGR ne risque-t-il pas d’être classé dans le camp des pirates et, à ce titre, d’être menacé de poursuites ? Apparemment non, bien au contraire. La société profite du droit néerlandais, seul pays au monde où le P2P bénéficie d’une jurisprudence favorable depuis que Kazaa y a gagné un procès en appel (voir édition du 29 mars 2002). « C’est une invitation ouverte aux services de partage de fichiers à venir s’installer aux Pays-Bas », peut-on lire sur le site Web. Pour défendre le P2P, PGR n’hésite pas à lancer le débat. « Débattre du partage de fichiers, c’est débattre de la liberté », estime son fondateur qui ajoute que « restreindre la possibilité de partager est une menace pour nos libertés civiles et nous rapproche d’une société encore plus surveillée. »
Au delà de l’approche intellectuelle d’un service pour le moins commercial, le chemin est encore long avant l’avènement du « voleur honnête » comme solution au problème du P2P. Comme toutes les bonnes idées, celle-ci ne s’imposera qu’avec la participation du plus grand nombre, à savoir les éditeurs de solutions P2P, les artistes et les internautes. Et les maisons de disques, quoi qu’en pense PGR.
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