Après le report de son introduction en Bourse survenu fin octobre, Deezer repart en mode financement privé.
La société française exploitante de la plateforme de musique en streaming a bouclé un tour de table de 100 millions d’euros emmené par son actionnaire principal.
En l’occurrence, Access Industries, dont la participation sur la base du capital dilué s’élevait à 26,9 % avant l’opération, selon le prospectus d’IPO communiqué en septembre dernier à l’Autorité des marchés financiers*.
À la tête de ce fonds qui a également mis ses billes dans Spotify, on trouve Len Blavatnik. Cet homme d’affaires d’origine ukrainienne s’était distingué dans l’industrie du disque en rachetant, en 2011, la major Warner Music, pour 3,3 milliards de dollars.
Un autre actionnaire reste en état de vigilance et participe activement à ce nouveau tour de financement « post-report » : Orange, qui détenait 10,66 % du capital au dernier pointage.
Le groupe télécoms s’était associé à Deezer à partir de 2010, intégrant son offre de streaming premium à plusieurs forfaits mobiles et d’Internet fixe. Il avait, par la même occasion, pris une « participation minoritaire » (on évoquait 20 % du capital à l’époque).
À plusieurs reprises, le partenariat avait semblé s’essouffler. Notamment lorsque le 2 octobre 2014, l’inclusion de Deezer Premium + dans certaines formules Origami (mobile) et Open (ADSL/FTTH + mobile) avait pris fin.
L’accès au service de streaming n’était pas supprimé, mais d’un bonus gratuit, il devenait une option payante, à 9,99 euros par mois.
Du côté d’Orange, on affirmait que l’alliance n’était pas remise en cause. Sans préciser si cette décision était liée à la pression de Qobuz (à l’époque, le concurrent de Deezer songeait à saisir l’Autorité de la concurrence au sujet de cette offre).
La flamme a finalement été ravivée en novembre dernier avec le lancement d’une offre « spécial famille », dans la lignée des déclarations du CEO Hans-Holger Albrecht, selon lequel les partenariats avec les opérateurs télécoms allaient revêtir « une dimension stratégique » dans ce qui devait alors être l’après-IPO.
Les chiffres communiqués à l’AMF parlent en ce sens : sur les 6,3 millions de souscripteurs premium que revendique Deezer, près de 5 millions le sont via leur forfait téléphonique.
Selon la communication officielle, les 100 millions d’euros tout frais levés contribueront à « accroître les efforts d’acquisition client dans le monde », tout en accélérant le développement de nouveaux produits et fonctionnalités.
Contacté par ITespresso.fr, Deezer ne précise pas dans quelle mesure la répartition de son capital évolue avec ce nouveau tour de table. Mais, selon nos informations croisées, l’équilibre entre les actionnaires les plus influents serait préservé.
Deezer compte notamment développer son offre de radios, qui comprend actuellement 40 000 émissions, podcasts et livres audios. Un complément aux « 40 millions de titres » revendiqués dans le catalogue principal (c’est la première plate-forme de streaming à annoncer ce cap).
La feuille de route communiquée par l’équipe dirigeante fait aussi état d’une extension de l’offre dans le secteur de l’automobile, avec BMW en tête de liste. Des jonctions se font par ailleurs avec des fabricants d’équipements audio comme Sonos.
Dans l’absolu, les perspectives sont grandes sur un marché en nette progression : en 2013, les services de musique exploités sous la forme d’abonnements ont dépassé pour la première fois le seuil du milliard de dollars de chiffre d’affaires annuel, selon la fédération mondiale des producteurs de disques.
Mais Deezer doit faire preuve d’agilité, tout particulièrement après l’arrivée d’Apple Music et ses 10 millions d’abonnés payants recensés en début d’année.
Difficile aussi d’éclipser Spotify et ses 70 millions d’utilisateurs, dont 25 millions d’abonnés premium (650 000 en France). La société Internet d’origine suédoise vient de procéder à une double acquisition : Soundwave (réseau social de découverte musicale) et Cord Project (envoi de « micro-messages vocaux »).
* Les indicateurs financiers de Deezer restent dans le rouge pour l’année 2014 : perte d’exploitation de 22,6 millions d’euros, pour une perte nette de 23,3 millions sur un chiffre d’affaires de 142 millions (+ 53 % sur un an).
Crédit photo : Deezer
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