« On revient de vacances, puis on n’a plus de travail. On nous dit juste qu’on aura un nouveau contrat à signer pour reprendre le taf ».
Cette déclaration recueillie par France 3 Paris Île-de-France, on la doit à un livreur Deliveroo.
L’intéressé a récemment été averti, par e-mail, que les règles du jeu allaient changer à la rentrée : il sera rémunéré à la course.
Ce système s’applique déjà aux livreurs qui se sont enregistrés sur la plate-forme à partir de septembre 2016. C’est une autre paire de manches pour les plus anciens, qui touchent aujourd’hui encore 7,50 euros par heure de travail, avec un complément de 2 à 4 euros pour chaque livraison effectuée.
Cofondateur du Collectif des livreurs autonomes de Paris (CLAP) constitué au mois d’avril* pour « défendre les droits et les conditions de travail des livreurs », Jérôme Pimot fait depuis quelques jours la tournée de médias.
Il a dénoncé, ce matin au micro de France Inter, « une entente sur les prix institutionnalisée ». Puis invité, sur RMC, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) à se pencher sur le dossier, tout en précisant qu’une application « qui pourrait être utilisée par des structures collaboratives » est en développement depuis un an.
En début de semaine, son intervention dans un reportage de TF1 avait été l’occasion de dénoncer la « précarité sociale » créée par Deliveroo et consorts, qui « ont mis en place quelque chose de tellement prédateur que même des coursiers qui étaient volontaires […] se sont aperçus qu’ils se faisaient avoir ».
Dans la lignée de manifestations organisées à Bordeaux et à Lyon, un rassemblement est prévu ce vendredi à Paris, place de la République. Les restaurateurs, « qui payent les sacs que leur fournit Deliveroo », sont invités à se mobiliser aux côtés des livreurs, qu’on estime à 10 000 en France, toutes plates-formes confondues.
Du côté de Deliveroo, on considère devoir modifier les conditions de travail pour accompagner « la forte croissance » de l’activité.
L’an dernier, dans le cadre d’une enquête à plusieurs volets, Paris Mag s’était intéressé à la rémunération des coursiers, expliquant qu’elle restait leur principale motivation… et le sujet de conversation numéro un lors des entretiens d’embauche.
Les plates-formes n’utilisent pas ce terme, auquel elles préfèrent substituer, entre autres, la notion d’enrôlement (« onboarding »), les coursiers ne travaillant pas en tant que salariés, mais autoentrepreneurs.
« On est nos patrons », reconnaît Jérôme Pimot dans une vidéo reprise par le YouTubeur Harry JMG, spécialiste du domaine… Avant de poursuivre : « Mais on a les vêtements de la plate-forme pour laquelle on travaille ». Et d’affirmer : « Moi, j’ai notamment été viré de Deliveroo parce que je ne portais pas la veste ».
En matière de tarification, le niveau de transparence varie entre les plates-formes.
Chez UberEATS, un coursier à Paris touche 3,50 euros par livraison (2,50 euros à la prise en charge au restauration + 1 euro à la remise au client) et 1,40 euro par kilomètre parcouru, selon l’itinéraire conseillé par l’application.
Uber, qui prend une commission de 20 % sur les livraisons en scooter et 25 % en vélo, a mis en place des créneaux à revenu minimum garanti, sur lesquels la différence est versée aux coursiers qui n’atteignent pas un plafond de C.A. horaire.
Cette compensation est conditionnée à trois critères : sur la semaine calendaire considérée, obtention d’un taux de satisfaction moyen de 85 % au moins, remise aux clients d’a minima 85 % des commandes proposées par l’application et nombre moyen de livraisons par heure supérieur aux plafonds indiqués dans le tableau ci-dessous (cliquer pour agrandir).
Il existe aussi des primes, dont l’une accordée en cas de pluie, là aussi sous conditions. On la retrouve chez Stuart, qui explique, à l’article 5.3 de ses conditions générales, que « les prix sont déterminés automatiquement par l’application au terme d’un algorithme qui prend en compte une somme de variables ».
Parmi les variables en question figurent le type de procédé de transport, le poids ou la taille de la marchandise et la distance à parcourir entre l’adresse de prise en charge et de livraison.
Chez Foodora, rien n’est précisé ni dans les CGV, ni dans la FAQ. Le Monde indiquait, en juin dernier, 7,50 euros de l’heure et 2 euros par livraison.
Quant à Deliveroo, il affiche, sur sa page de recrutement, 5 euros par livraison, avec des « prix forfaitaires garantis jusqu’à 10 euros par heure selon les créneaux ».
* Dans un contexte de mobilisations qu’avait couvertes Libération.
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