Dix ans d’histoire du PowerPC

Mobilité

Le 14 mars 1994, le trio Apple-IBM-Motorola lançait la première puce PowerPC. Dix ans plus tard, le processeur se présente comme l’une des architectures les plus prometteuses.

Pour les dix ans du Mac, en 1994, Apple décidait de participer à une alliance étonnante : AIM. Ce sigle cache en fait l’association d’Apple avec IBM et Motorola, pour le développement d’une architecture de processeurs RISC, le PowerPC (ou PPC). L’histoire de cette architecture commence avec John Cocke, l’inventeur des processeurs à jeux d’instructions réduits (voir édition du 6 novembre 2000). Mais c’est IBM, avec son processeur Power, qui va lancer un renouveau des puces RISC : Big Blue réalise en 1990 qu’il lui est nécessaire de disposer d’un processeur destiné à animer sa ligne de machines RS/6000, de l’entrée au haut de gamme. Début 1991, l’entreprise s’aperçoit que ses travaux pourraient donner lieu à un processeur vendu en grandes quantités et approche donc Motorola. Pour ce dernier, c’est une aubaine : son processeur RISC, le 88000, a du mal à se vendre. La firme en fait part à Apple, son plus gros client consommateur de puces pour ordinateurs, qui se joint à l’équipe. Le développement de l’architecture PowerPC (pour Power Performance Computing) s’avère en gros une fusion du bus frontal du processeur 88000 de Motorola et de l’architecture Power d’IBM. L’alliance AIM est un pari gagnant : Apple obtient le processeur RISC le plus puissant du marché, IBM fait main basse sur une nouvelle puce industrialisable en grandes quantités, et Motorola accède à une architecture RISC dernier cri.

Tout tourne bien de 1991 à 1999. Apple lance son premier Mac équipé de processeurs PPC le 14 mars 1994. Dès 1995, la firme est devenue le premier vendeur d’ordinateurs à base de puces RISC. Les PowerPC 601, puis 603 et 604, tournent aux mêmes fréquences que les processeurs Intel mais fournissent jusqu’à deux fois plus de puissance. Le tournant de l’alliance a lieu à la moitié des années 90 : IBM entend développer des processeurs 64 bits utiles pour ses gros serveurs, tandis que Motorola veut intégrer une unité de calcul SIMD (Single Instruction Multiple Data) permettant un traitement rapide des instructions multimédias. Le pacte AIM s’étiole peu à peu, donnant naissance à deux séries de puces cousines : le PowerPC 750, alias G3, et le PowerPC 7400 ou G4. IBM va alors faire cavalier seul, améliorant sans cesse son architecture Power. Apple choisit Motorola, séduite par la perspective d’exploiter les G4, mais ce choix montre rapidement ses limites : Motorola rencontre des difficultés dans le processus d’industrialisation de son processeur. Apple reçoit les G4 aux fréquences escomptées avec des mois de retard. Les Mac restent coincés pendant un an et demi, entre l’été 1999 et janvier 2001, sous la barre des 500 MHz, alors que les PC franchissent allègrement le cap du gigahertz ! Aujourd’hui, le G4 est arrivé à son plafond, autour de 1,5 GHz (voir édition du 4 mars 2004).

IBM reprend la main

Des tensions entre Apple et Motorola se font sentir dès 2000 : la Pomme est obligée de communiquer sur le « mythe du mégahertz » pour combattre l’idée reçue que ses machines ne parviennent pas à concurrencer les PC. Mais vers 2002, les résultats sont clairs : le PowerMac se fait battre par des PC lors de comparatifs (voir édition du 23 juillet 2002). Une seule alternative : passer au G5. Ce processeur aura été en travaux en premier lieu chez Motorola, qui propose son modèle en 2001. Mais c’est IBM qui va dévoiler son PowerPC 970. Big Blue comprend également courant 2001 qu’Apple n’a plus qu’une seule possibilité pour sauver ses investissements et tous ses développements sur PowerPC : adopter massivement les nouveaux processeurs. En s’alliant à Apple, IBM peut ainsi disposer d’un débouché massif (les Mac nécessitent près de 3 millions de processeurs PowerPC par an). Les puces 64 bits d’IBM pourraient être utilisées dans tous les Mac dès 2005. Début 2004, les tenants du PowerPC se séparent donc en deux branches : Motorola se prépare à faire cavalier seul. Mais l’entreprise aux ailes d’argent dispose de nombreux débouchés, dont l’industrie automobile où le PowerPC se place en excellente position (voir édition du 3 décembre 2001). IBM et Apple se concentrent désormais sur la distribution en masse du 64 bits, envisagée par IBM dès 1994 avec son PowerPC 620. Pour ses dix ans, le PowerPC dispose de débouchés prometteurs grâce au G5, devenu l’un des processeurs les plus en vue du marché.