Où en est l’Europe dans son chantier d’harmonisation des dispositions réglementaires encadrant l’usage des drones civils ?
L’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA) estime que le gros des travaux sera bouclé fin 2016… à condition que les industriels, les opérateurs et les utilisateurs de ces « aéronefs sans passager » – UAV, terme interchangeable avec « drone » – soient force de proposition.
L’autorité, responsable entre autres de la gestion du trafic aérien et de la sécurité des aérodromes, a profité d’une conférence organisée la semaine passée avec son homologue américaine (la FAA) pour réitérer son appel à un « consensus technologique ».
L’enjeu est grand : rester, sur ce marché en croissance, compétitif face aux États-Unis, où la réglementation est plus avancée ; tout du moins sur les drones légers volant à basse altitude, selon le Wall Street Journal.
Fin 2015, le Parlement européen avait établi des lignes directrices à destination des États membres et des acteurs de la filière. Une initiative inscrite dans la lignée de la déclaration de Riga (« Encadrer le futur de l’aviation ») et d’un rapport de la chambre haute du Parlement du Royaume-Uni (House of Lords) sur « l’usage civil des drones dans l’UE ».
Les eurodéputés souhaitent notamment un assouplissement de la loi selon laquelle les drones ne sont du ressort de l’EASA que s’ils pèsent plus de 150 kg.
Cette flexibilité devra permettre aux autorités de se concentrer sur d’autres aspects, dont la reconnaissance mutuelle des législations nationales.
En l’état, 18 pays de l’UE ont défini un cadre*. Certains régulateurs ont avancé plus vite que d’autres, allant jusqu’à certifier des écoles de pilotage, comme au Danemark ou au Royaume-Uni. Mais ces autorisations ne sont généralement pas reconnues au-delà des frontières. Ce qui, pour le Parlement européen, entrave la compétitivité du secteur à l’international et limite les leviers de financement pour les PME de la filière.
Du côté de l’EASA, on mise sur la « volonté ferme » des opérateurs de drones de parvenir à un consensus dans les prochains mois. Un premier texte est attendu pour juillet. La version définitive pourrait être votée fin 2016, si Bruxelles donne à l’Agence européenne de sécurité aérienne les pouvoirs nécessaires.
Il s’agira cependant d’éviter le « syndrome de l’œuf et de la poule », où l’industrie est réticente à investir dans le développement de technologies par incertitude sur leur régulation future, tandis que les régulateurs refusent de pousser des standards si l’industrie ne propose pas de technologies.
À ces fins, l’EASA envisage de monter des équipes transnationales chargées de développer des prototypes qui permettront d’ouvrir la voie à de futurs standards. L’idée étant de « promouvoir l’innovation » sans se contenter de transposer le système déjà en place pour les aéronefs « habités » (ULM, avions planeurs, CPL…).
Un groupe de travail a également été monté au mois de mai pour étudier les risques associés à la cohabitation des drones et des aéronefs habités. Des conclusions doivent être rendues fin juillet, tout particulièrement sur la fragilité des moteurs, des hélices et des fuselages en cas de collision.
L’EASA organisera sa conférence annuelle les 25 et 26 octobre prochains à Bratislava, à l’heure où la Slovaquie prendra la présidence tournante de l’UE. On y discutera transformation numérique (entre autres via l’impression 3D), cybersécurité, big data et nouveaux modèles économiques.
* En France, la réglementation a évolué au 1er janvier 2016. L’Assemblée nationale doit par ailleurs examiner une proposition de loi adoptée en mai par le Sénat sur le renforcement de la sécurité de l’usage des drones civils. Un texte qui trouve son origine dans un accident évité de justesse au mois de mars à l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle.
Crédit photo : Alexey Yuzhakov – Shutterstock.com
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