Dimanche, elles étaient 96. On en recense désormais 128*.
Trente-deux sociétés technologiques américaines se sont associées, dans la journée de lundi, à la requête que leurs pairs avaient déposée, ce week-end, auprès de la cour d’appel fédérale de San Francisco.
Cette dernière avait été saisie samedi 4 février par le gouvernement U.S., qui l’enjoint d’annuler une décision rendue la veille par un tribunal de Seattle.
Le jugement contesté par l’administration Trump a pour effet de suspendre, au niveau national, l’application du décret sur l’immigration que le président avait signé le 27 janvier.
D’Adobe à Zynga, on dénonce le caractère « illégal » et « anticonstitutionnel » d’un texte « nuisible au commerce américain, à l’innovation, à la croissance ».
« Dans un contexte si incertain, ils ne viendront plus », déplorent les 128 parties prenantes en parlant de ces immigrants « qui ont fait l’Amérique » en créant notamment des « symboles de l’identité nationale » comme le basket-ball (James Naismith), le blue jean (Levi Strauss) et le hot dog (Charles Feltman).
La requête n’a pas valeur de plainte. Elle prend la forme d’un mémoire, comme en ont déposé l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), le Korematsu Center, un collectif d’enseignants en droit, ainsi qu’un certain nombre d’États (Massachusetts, Californie, Nouveau-Mexique, Delaware, Illinois…).
Une approche qui a fini par convaincre Tesla et SpaceX, dont le fondateur Elon Musk avait jusqu’alors privilégié la piste de la conciliation avec l’administration Trump.
Autre soutien inattendu : HP. Toujours pas, en revanche, d’Oracle et d’IBM, en relation contractuelle avec les services du gouvernement. Quant à Amazon, son absence est justifiée par le soutien déjà apporté à l’État de Washington dans une procédure similaire.
L’issue de cette procédure – ainsi que celle d’une affaire de la même teneur en cours dans le Minnesota – conditionnera d’ailleurs le verdict de la cour d’appel fédérale de San Francisco.
Du côté des groupes high-tech, on estime que le décret relève de « l’irraisonnable » en touchant potentiellement « des millions d’individus sans aucun lien avec le terrorisme ». Et d’en appeler à des mesures « ciblées […], comme ce fut le cas à plusieurs reprises dans l’histoire des États-Unis ».
Le texte « s’éloigne considérablement des principes d’égalité et de prédictibilité qui régissent le système d’immigration aux États-Unis depuis plus de 50 ans », peut-on lire en introduction du mémoire. Assez, selon Apple, Google et consorts, pour « rendre plus difficile et plus onéreuses l’embauche et la rétention des meilleurs employés du monde », non sans « menacer la capacité des entreprises à attirer […] des investissement sur le territoire ».
La principale mesure du décret interdit, pour 90 jours au minimum, l’entrée, sur le sol américain, de ressortissants de 7 pays (Iran, Irak, Libye, Somalie, Soudan, Syrie, Yémen), exception faite des porteurs de la carte verte. Il suspend par ailleurs, pour au moins 120 jours, l’admission de réfugiés ; et réserve au gouvernement la possibilité de prioriser, a posteriori, les demandes en fonction du critère de religion.
Assez pour que le « club des 128 » évoque une double discrimination, établie sur la base de la nationalité et du culte, et jugée contraire à l’Immigration and Nationality Act signé en 1965 sous la présidence de Lyndon Johnson.
L’argumentaire est aussi fait de chiffres tirés d’études sociologiques : un quart des Américains auraient au moins un parent né à l’étranger et ils seraient près de 50 % si on remonte au niveau des grands-parents. Ou encore : depuis l’an 2000, plus d’un tiers des récipiendaires américains des prix Nobel en chimie, médecine et physique étaient des immigrés.
* On nous en avait annoncé 97 à l’origine, mais Turn Inc. avait été compté deux fois. Sur les 32 sociétés qui se sont ajoutées (Brocade, Coursera, Evernote, MobileIron, Pandora, Slack, TripAdvisor, Zendesk…), Groupon l’a fait à quelques heures d’intervalle.
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