Avec Emmanuel Macron bientôt sur les marches du perron de l’Elysée, on scrute le programme numérique d’En Marche ! En attendant la formation du nouveau gouvernement (escomptée la semaine prochaine) et la nouvelle feuille de route sur la stratégie digitale au niveau national.
L’élection d’Emmanuel Macron à la Présidence de la République apparaît comme une bonne nouvelle pour le secteur du numérique.
En qualité d’ex-ministre en charge de l’Economie, il s’est plongé avec délectation dans la French Tech, la transformation numérique qui bouleverse la société française et européenne et l’industrie mais aussi l’innovation au sens large.
Logiquement, on a retrouvé ces grands thèmes du numérique dans le programme En Marche !
Mais le nouveau président devra se montrer plus efficace pour consolider la filière, dynamiser le secteur du numérique, favoriser l’émergence de nouvelles pépites et y intégrer une dose d’inclusion.
« Le numérique ne doit pas être réservé aux plus agiles ni aux plus favorisés, ni aux plus urbains. Chacun doit y trouver les moyens de gagner en autonomie, d’avoir la capacité d’agir, d’entreprendre et de choisir sa vie », peut-on lire dans la prose d’En Marche !
En endossant les fonctions de Président de la République, Emmanuel Macron devrait s’appuyer sur le diagnostic réalisé sur les usages et l’état du marché du numériques en France pour monter un socle de stratégie nationale.
Sous son quinquennat, la couverture nationale en très haut débit devra être achevée mais elle a pris du retard, estimait récemment la Cour des comptes. Va-t-on parvenir à l’objectif final de couvrir 100 % des logements en très haut débit fixe à horizon 2022 (et à 80 % en fibre optique) ?
En octobre 2016, Manuel Valls, alors Premier ministre, évoquait un cap de 50% de la population ayant accès au très haut débit [en termes d’éligibilité] qui devait être atteint à la fin de l’année 2016.
Une nouvelle impulsion devra être donnée par le sommet de l’Etat pour accélérer l’exécution du plan Très Haut Débit et renforcer le pilotage du programme (actuellement sous la houlette de l’Agence du numérique) qui nécessite une certaine coordination entre opérateurs télécoms et collectivités.
À ce titre, l’ARCEP a lancé en avril une consultation publique pour finaliser un cahier des charges pour les « zones fibrées » d’ici début juillet 2017, en vertu de la Loi pour la république d’Axelle Lemaire. Les contributions peuvent être déposés jusqu’au 24 mai 2017.
Si 85% des Français disposent d’un accès à Internet et plus de 65% d’entre eux sont équipés d’un smartphone, il demeure encore des déséquilibres profonds en termes d’aménagement numérique du territoire. Ne serait-ce que sous l’angle de la résorption des zones blanches qu’Emmanuel Macron promet « d’éliminer ».
La transformation numérique ne mobilise pas suffisamment les entreprises. Le mouvement En Marche! reprend le constat effectué par le Conseil national du numérique (son président Mounir Mahjoubi avait rejoint l’équipe de campagne d’Emmanuel Macron en début d’année) : en 2015, une PME française sur trois ne possède pas de site Web (en Allemagne, 87 % d’entre elles en ont un).
En matière d’e-commerce, le bond reste aussi à réaliser : seulement 15,8 % d’entre elles disposent d’un canal e-commerce.
Cette dimension de transformation numérique est abordée de deux manières par le mouvement d’Emmanuel Macron.
D’un côté, la question des compétences à acquérir (entrepreneurs mais aussi salariés) et des formations à suivre. De l’autre, la question d’investissement et de transformation des modes de production et de vente. Un thème plus compliqué à prendre en main en raison des niveaux de trésorerie souvent tendus des PME.
« Nous aiderons les TPE et les PME à réussir leur transformation numérique. Celles qui s’engageront dans des transformations ambitieuses exigeant de conduire sur une période de temps limitée une requalification de leurs salariés bénéficieront d’un accès privilégié à la formation professionnelle », assure le mouvement En Marche !
Le nouveau chef de l’Etat compte également dématérialiser toutes les démarches administratives d’ici 2022 (sauf première délivrance des documents d’identité officiels). Là aussi, le chemin est long pour proclamer une administration 100% électronique.
« Par-delà la dématérialisation des services publics, l’Etat doit devenir un « Etat plateforme », qui s’appuie sur les contributions de la multitude des usagers pour améliorer les services existants ou en créer de nouveaux », prône le mouvement d’Emmanuel Macron.
Les usagers disposeront d’un compte fédérateur « citoyen en ligne » (site et application), qui servira de point d’entrée unique pour regrouper tous les droits (santé, trajectoire professionnelle, formation, situation fiscale, droits civiques).
La poursuite de l’effort dans l’open data devra être approfondie pour créer « une banque de données numériques réutilisables ».
Un effort particulier sera fait sur les services de justice qui marque un certain retard dans la numérisation. « Nous créerons un service public numérique de la justice, avec portail unique d’accès (sur le modèle d’impôts.gouv.fr) », peut-on lire sur le site Internet d’En Marche !
D’autres domaines domaines devraient faire l’objet d’une attention particulière comme l’e-santé (télé-médecine, recours aux objets connectés pour les suivis médicaux…), l’éducation à l’ère numérique mais aussi l’exercice de la démocratie en prenant en compte des initiatives de type CivicTech à l’instar de Make.org.
Les organisations de start-up attendent aussi Emmanuel Macron au tournant sur la question de la fiscalité.
Le candidat d’En Marche ! avait déjà pris un engagement lors d’une session Hacking 2017 organisée à la fin du premier trimestre : « transformer en profondeur l’ISF afin de taxer uniquement la rente non productive, tout en favorisant la réussite par le travail, la transformation et l’inventivité et ce qui est ré-investi dans l’économie. »
Désormais au sommet de l’Etat, Emmanuel Macron devra également s’attacher à l’adaptation de la fiscalité française et européenne pour mieux prendre en compte le réel poids économique des GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) dans l’économie en écartant le recours aux montages favorisant l’évasion fiscale.
Il devrait également jouer un rôle moteur dans les nouvelles règlementations à adopter pour favoriser l’innovation dans des secteurs de pointe comme la mobilité (drones, conduite autonome) ou l’intelligence artificielle (une stratégie nationale venait d’être ébauchée par Axelle Lemaire, ex-secrétaire d’Etat au Numérique et à l’Innovation).
« Nous développerons le droit à l’expérimentation dans le respect des impératifs de sécurité, de protection du consommateur et de loyauté de la concurrence », peut-on lire sur le site Internet de campagne d’Emmanuel Macron. « Pour un temps limité et dans un cadre fixé par la loi, il sera possible de déroger aux dispositions en vigueur afin de tester de nouvelles solutions. »
Mais le nouveau Président exigera également des contreparties sur la protection des données personnelles, la transparence sur leur usage et déterminera « les enjeux pour le travail et l’emploi de demain ».
Car il ne pourra pas échapper à des brûlots comme l’ubérisation. Le dossier taxis vs VTC reste en suspens sur fond de tensions permanentes entre les parties.
Il faudra aussi trouver le bon curseur pour réguler l’économie de partage sans casser l’innovation des services ou des modèles économiques.
Son orientation pro-européenne est visible à travers des mesures pour « développer le potentiel économique du numérique », « réguler la concurrence internationale » et « défendre avec lucidité et souveraineté, comme le font les autres grandes puissances, nos intérêts économiques et industriels dans la mondialisation ».
Il suggère quelques pistes concrètes : instauration d’un Fonds européen de financement en capital-risque pour les start-up (« doté d’au moins 5 milliards d’euros »), renégociation du « Privacy Shield » d’ici 2018 (cadre de protection des données entre l’UE et les USA) et création d’une « Agence européenne pour la confiance numérique » au nom de la régulation des grandes plateformes numériques (protection des données personnelles, loyauté de leur fonctionnement).
Contexte.com vient de récapituler les sujets brûlants numériques qui attendent Emmanuel Macron au niveau de la Commission européenne au nom du « marché unique numérique » qui reste à concrétiser : droit d’auteur, règlement e-privacy, libre circulation des données…
Mais, a priori, d’autres sujets seront traités en priorité lorsque que le quinquennat d’Emmanuel Macron démarrera : emploi, éducation, transparence de la vie politique….
(Crédit photo : Hacking 2017 – mars 2017 : Les entrepreneurs interpellent les candidats à l’élection présidentielle – France Digitale + ACSEL + CroissancePlus + Grandir Ensemble + Syntec Numérique)
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