C’est une histoire à rebondissements qui pourrait avoir des conséquences fâcheuses sur la communauté du Web. L’Office américain des brevets (U.S. Patent and Trademark Office) a confirmé, mercredi 28 septembre, la validité d’un brevet (n° 5 838 906) déposé en 1998 par Eolas, une émanation commerciale des travaux du chercheur Michael Doyle de l’Université de Californie, portant sur le concept des plug-in (des modules applicatifs qui permettent d’enrichir les fonctions du navigateur). Un brevet qui décrit des technologies que Microsoft a, consciemment ou non, intégré dans Internet Explorer (IE).
C’est cette intégration que conteste Eolas en portant plainte contre Microsoft dès 1999. En 2003, la justice américaine reconnaît l’éditeur de Windows coupable et le condamne à verser 520,6 millions de dollars à Eolas (voir édition du 1er septembre 2003). Comme à son habitude, l’entreprise de Redmond fait appel et menace de réécrire son navigateur afin de se passer des technologies décrites dans le brevet d’Eolas. Autrement dit, IE se couperait des services mis en oeuvre par des millions de pages Web, que ce soit le support du Flash, de la vidéo et du son et autres applications multimédias. Un désastre pour la communauté Web.
Eolas s’acharne
Le W3C s’en émeut et intervient auprès de l’Office des brevets pour lui demander de vérifier la conformité du brevet d’Eolas, tout en envisageant une refonte du code HTML comme réponse technique à cette problématique juridique (voir édition du 25 septembre 2003). La démarche du W3C paye.
Un vice de procédure pour absence de recherche d’antériorité invalide le brevet d’Eolas (voir édition du 9 mars 2004). Microsoft s’apprête alors à demander une révision du jugement de 2003 et renonce à apporter les modifications évoquées pour son navigateur. L’éditeur obtient d’ailleurs gain de cause lors du jugement de l’affaire en appel en mars dernier (voir édition du 3 mars 2005). C’était sans compter sur l’acharnement d’Eolas qui fait appel de la décision de l’Office des brevets… et obtient aujourd’hui gain de cause en faisant confirmer la première décision de justice.
Une histoire sans fin
Mais l’histoire n’est pas terminée. Si Microsoft a été lavé de tout soupçon lors du dernier procès en appel, le juge a demandé le renvoi de l’affaire devant les tribunaux à une date encore non précisée pour vérifier la validité du brevet d’Eolas. Lequel se fera fort de mettre en avant la récente reconnaissance de son brevet par l’Office des brevets américains. Quel que soit le résultat de ce futur jugement, cette histoire illustre bien la difficulté qui entoure la gestion des brevets logiciels. Alors que tout le monde s’accorde à dire que le principe du plug-in est antérieur au brevet d’Eolas, il n’en reste pas moins que, juridiquement et selon les règles américaines, ce dernier n’en est pas moins le propriétaire. Et qu’à ce titre, il pourrait faire payer le prix fort aux éditeurs de navigateurs, du moins aux Etats-Unis.
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