L’idée de départ est simple : étendre à l’univers numérique les droits d’auteur déjà en vigueur. Mais en pratique, mettre en place une telle législation à l’échelle de l’Europe se révèle bien compliqué. Les autorités européennes s’y emploient depuis plusieurs années déjà. En début de semaine, la commission juridique du Parlement européen vient de franchir une étape décisive. Une session de vote d’une heure aura suffi pour rejeter la très grande majorité des quelque 200 amendements déposés. Le texte doit maintenant passer en deuxième lecture devant l’Assemblée mardi prochain, il sera voté le mercredi 14 février.
Quelle définition du droit à la copie privée ?
Nous avions déjà évoqué ce texte au sujet de la « taxe » sur les CD (voir édition du 12 janvier 2001). Le « complément de rémunération » est en effet appliqué au titre du droit à la copie privée. Un droit au centre des discussions de cette directive européenne « sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information » (disponible en ). Le sujet est polémique. Une fois de plus, on retrouve d’un côté les auteurs et surtout les éditeurs qui cherchent à défendre par tous les moyens leurs oeuvres contre le piratage. Face à eux, les industriels et les consommateurs craignent de voir leurs droits limités. Or la directive prévoit justement un droit à la copie privée, mais sa définition restait contestée. Finalement, ce sera une copie « par une personne physique pour son usage privé et pour des fins non directement ou indirectement commerciales ».
De manière un peu contradictoire, la directive incite les éditeurs à protéger les oeuvres pour se prémunir des copies illégales. Des protections qui peuvent empêcher la copie privée… Le texte prévoit aussi la condamnation des pirates qui détruiraient ces protections. En France, la copie privée est désormais compensée par un complément de rémunération des auteurs prélevé sur les CD, mini-disques et DVD vierges (et bientôt sur les supports numériques d’enregistrement intégrés). La directive intègre une mesure comparable tout en restant vague puisqu’elle ne réclame qu’une « juste compensation ».
Les Etats restent maîtres de l’application de la directive
Une fois votée, la directive devra encore être ratifiée par chacun des 15 pays de l’Union. De nombreux points restent à la discrétion des gouvernements, ainsi les exceptions au droit d’auteur pour les écoles ou les bibliothèques, la location ou le prêt par exemple, seront fixés par chaque Etat. Aujourd’hui, les auteurs se disent « déçus et très inquiets » comme l’affirme la porte-parole du Gesac (Groupement européen des sociétés d’auteurs et compositeurs), tandis que l’industrie paraît plutôt satisfaite. Les associations de consommateurs craignent pour le droit à la copie privée et les bénéficiaires des exceptions aux droits d’auteur pour leurs acquis. « Il vaut mieux une loi qui ne plaise pas à tout le monde que de ne pas avoir de protection pour les années qui viennent », estimait pour sa part Enrico Boselli, rapporteur de la directive cité par le Wall Street Journal, « mais ce n’est qu’une étape, bien qu’elle soit importante ». « A partir de ce moment l’assemblée de l’Union est souveraine », a-t-il déclaré à Reuters.
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