Facebook, Twitter, Dailymotion…quel régime juridique applicable à ces nouveaux services ?

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Une chronique juridique d’Anne-Katel Martineau, Avocat au Barreau de Paris.

Dans un jugement du 26 mars 2008, le T.G.I. de Paris a reconnu la qualité d’éditeur de contenus à la SARL Bloobox.net qui mettait en ligne un site Internet contenant un agencement de liens hypertextes pointant vers d’autres sites Internet publiant des contenus portant atteinte à la vie privée d’un comédien français, Olivier Martinez.

Bien que les contenus n’étaient pas sur le site litigieux de ladite société, il a été jugé que le simple fait de mettre en ligne des liens hypertextes de manière organisée en faisant le choix de liens hypertextes et donc d’articles constituait un choix éditorial  qui mettait la société face à ses responsabilités d’éditeur.

Le second critère des revenus publicitaires, c’est-à-dire le fait d’insérer des espaces publicitaires sur un site Internet permet de générer des revenus au profit d’une société, a été retenu par le juge pour qualifier l’activité d’une société d’éditeur.

Ainsi, la société Tiscali a la double qualité, celle d’hébergeur pour ses prestations techniques de fournisseur d’hébergement et celle d’éditeur du fait qu’elle tire manifestement profit de publicités mises en ligne, elle a donc « le statut d’éditeur et doit en assumer les responsabilités » (Cour d’appel de Paris : 7 juin 2006).

Un jugement récent du T.G.I. de Paris du 22 juin 2007, opposant la société MySpace à Jean-Yves Lambert dit « Lafesse », a rappelé que ladite société ne limite pas ses fonctions aux fonctions techniques traditionnelles d’un hébergeur. En effet, elle diffuse à chaque internaute des publicités, elle en tire un profit manifeste qui permet de la qualifier d’éditeur et de lui appliquer le régime de responsabilité de droit commun.

Contrairement à cet arrêt, le critère des revenus publicitaires n’a pas suffit à qualifier l’activité de la société Dailymotion d’éditeur de contenus. En effet, la société Dailymotion a été qualifiée d’hébergeur bien qu’elle commercialise des espaces publicitaires (T.G.I. de Paris : 13 juillet 2007) puisque les « contenus sont fournis par les utilisateurs eux-mêmes, situation qui distingue fondamentalement le prestataire technique de l’éditeur, lequel, par essence même, est personnellement à l’origine de la diffusion, raison pour laquelle il engage sa responsabilité ».

Si le critère du choix éditorial est suffisant et essentiel pour qualifier l’activité d’une personne physique ou morale d’éditeur de contenus, celui des revenus publicitaires ne saurait être suffisant. Récemment le statut d’hébergeur de Dailymotion a été confirmé, dans une affaire l’opposant à Jean-Yves Lambert, le 15 avril 2008 par le T.G.I. de Paris. Il résulte de cette qualification que seuls les internautes sont responsables a priori du contenu des vidéos proposées sur son site et que la société Dailymotion n’a aucune obligation de surveillance a priori ou a posteriori des contenus publiés.

Toutefois, la qualification retenue n’a pas pour autant été favorable à Dailymotion qui a été condamnée à verser 5 000 euros au demandeur pour atteinte à son droit moral puisque Dailymotion n’a pas supprimé les contenus ayant un caractère manifestement illicite de sa plate-forme malgré la plainte des ayants droit s’estimant victime de contrefaçon.

La société Dailymotion, hébergeur, a donc l’obligation d’analyser la vraisemblance de la contrefaçon a posteriori résultant éventuellement de mentions portées sur les supports de diffusion et la titularité des droits au regard des documents transmis par les ayants droit. Après analyse, elle doit ensuite agir  promptement pour faire cesser cette atteinte en supprimant les contenus contrefaisants.

En cas de doute, il est conseillé aux hébergeurs de supprimer les contenus sur le seul fondement de la vraisemblance et ce, dans l’attente d’une éventuelle décision de justice.

Bien que jouissant d’un régime juridique plus favorable que les éditeurs, les hébergeurs ne bénéficient pas d’une exonération de responsabilité et leur inaction peut entraîner la mise en oeuvre de celle-ci. Les hébergeurs ne peuvent donc pas porter atteinte aux droits des tiers en toute impunité ! Ils doivent être extrêmement vigilants car les juges sont attentifs à leur(s) activité(s) réelle(s).

Les notions d’éditeur et d’hébergeur s’affinent au fil des affaires, s’adaptant ainsi aux nouveaux services offerts sur l’Internet, et les contours du régime de responsabilité fluctuent en conséquence.

Affaires à suivre… Anne-Katel Martineau
Avocat au Barreau de Paris – Cabinet MEDIAS TIC