« Je préfère un texte applicable très vite plutôt que des négociations interminables. On l’améliorera par la suite. »
Ainsi Bruno Le Maire a-t-il commenté, pour le Journal du dimanche, une proposition de directive européenne qui doit être présentée « dans les semaines qui viennent » – possiblement à l’occasion de la prochaine réunion des ministres des Finances du G20, les 19 et 20 mars à Buenos Aires.
Le texte, élaboré sur la base d’une démarche commune de Paris, Berlin, Rome et Madrid, vise à réformer la fiscalité des entreprises et plus particulièrement celles du secteur numérique, ces « passagers clandestins du monde contemporain », pour reprendre les propos d’Emmanuel Macron.
L’idée générale est celle d’un système de taxation sur la base des revenus réalisés dans chaque État membre et non en fonction des profits, que les groupes en question ont tendance à rediriger vers des filiales établies dans des pays où les taux d’imposition sont bas.
Débattue lors de la réunion des ministres des Finances de l’UE organisée en septembre dernier à Tallinn (Estonie), cette approche n’avait pas remporté l’adhésion de tous les États membres. Chypre, Malte, l’Irlande ou encore le Luxembourg, qui tirent parti de la concurrence fiscale dans l’Union, avaient manifesté leur opposition.
D’autres s’étaient, comme le rappelle L’Obs, prononcés en faveur d’un traitement au niveau international. Sachant que l’OCDE prévoit de présenter une initiative en avril à Washington.
À en croire Bruno Le Maire, il s’agirait de taxer Google, Amazon, Facebook et consorts à hauteur de 2 à 6 % de leur chiffre d’affaires (« On sera plus près de 2 que de 6 », ajoute l’intéressé).
En toile de fond, un enjeu de transparence : chaque entreprise concernée devra faire la lumière sur son activité dans chacun des pays où elle est présente.
Une notion de droit européen prend toute son importance : l’« établissement stable », que le tribunal administratif de Paris a fait valoir l’an dernier pour annuler une procédure de redressement fiscal à plus d’un milliard de dollars intentée par la France contre Google au titre d’arriérés d’impôts sur la période 2005-2010.
Il a été considéré, dans cette affaire, que la société de droit irlandais Google Ireland Limited, passage incontournable dans le process de facturation du groupe américain en Europe, n’était pas imposable dans l’Hexagone.
On surveillera, en parallèle, l’évolution d’un autre projet objet d’un regain d’intérêt en réponse aux différents scandales fiscaux : le système d’assiette commune consolidée sur les sociétés (ACCIS).
Les multinationales ayant une activité dans l’UE et dont le chiffre d’affaires consolidé total dépasse les 750 millions d’euros auraient un « guichet unique » pour déclarer leurs revenus, avec une seule définition des bénéfices imposables, dans l’objectif d’une taxation « équitablement partagée » entre les États membres dans lesquels l’entreprise est active.
Le partage se ferait selon trois critères principaux : les effectifs du personnel, les actifs tangibles et le niveau des ventes. L’eurodéputé français Alain Lamassoure (PPE, droite) a suggéré d’y ajouter les volumes de données personnelles collectées et exploitées.
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