« Au Royaume-Uni, Amazon paye moins d’impôt que N’Golo Kanté. »
On a pu entendre cette déclaration à l’Assemblée nationale, dans le cadre de l’examen, en séance publique, du projet de loi visant à instaurer la « taxe GAFA ».
André Chassaigne a fait de ce déséquilibre l’une des bases de son argumentation en faveur d’un durcissement des mesures proposées par le gouvernement.
Le député PC du Puy-de-Dôme appelait à renvoyer le texte en commission avant de le soumettre au vote de ses collègues. Il soutenait, en ce sens, la motion déposée par le groupe Gauche démocrate et républicaine… et finalement rejetée.
Au sortir de cette première lecture, le texte cible des fournisseurs de services numériques pour lesquels les utilisateurs, du fait de leur « travail gratuit », sont considérés comme essentiels à la création de valeur.
Deux grandes catégories se détachent : l’intermédiation (sites de rencontres, places de marché…) et la publicité ciblée. Sur ce dernier point, les travaux en commission ont permis d’affiner le périmètre, pour en exclure certains acteurs, à l’image des bourses d’enchères dans le programmatique.
Le taux d’imposition envisagé est unique : 3 % sur le chiffre d’affaires numérique réalisé en France. L’assiette est déterminée en appliquant aux recettes mondiales « un coefficient représentatif de la part des utilisateurs français ».
Ne sont redevables de cette taxe que les entreprises qui réalisent un C.A. numérique annuel à la fois d’au moins 25 millions d’euros en France et d’au moins 750 millions d’euros dans le monde.
Le gouvernement affirme qu’en l’état, une trentaine de groupes sont concernés (dont un français : Criteo), pour un produit brut global estimé à 400 millions d’euros sur l’année 2019.
La mesure est annoncée comme transitoire. Dès qu’une solution internationale plus efficace sera disponible, elle s’y substituera, affirme Bruno Le Maire.
« À mes amis américains qui regrettent* que la France instaure une taxe nationale, je réponds que nos décisions sont libres et souveraines », n’a pas manqué d’ajouter le ministre de l’Économie et des Finances.
Le gouvernement entendait, à l’origine, trouver un accord au niveau européen. Mais des dissensions subsistent avec quatre pays (le Danemark, la Finlande, l’Irlande et la Suède) ; or, la règle de l’unanimité s’exerce en matière fiscale.
Margrethe Vestager l’a déploré lundi sur France Inter. La commissaire européenne à la concurrence s’est toutefois réjouie de l’impulsion donnée par la France.
* Washington manifeste une vive opposition à l’initiative française. De passage à Paris le mois dernier, le délégué américain pour les discussions fiscales internationales a dénoncé une « base théorique […] mal conçue […], extrêmement discriminatoire à l’égard des multinationales basées aux États-Unis ».
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