France Télécom épinglé par le Conseil de la concurrence
Neuf Telecom a obtenu ? en partie ? gain de cause dans le cadre de son recours en justice contre France Télécom concernant la télévision par ADSL. Free a, lui, été débouté.
« Le Conseil a considéré que le déploiement des matériels ADSL-vidéo dans les salles de dégroupage était une demande légitime, et que tout retard dans l’installation de ces matériels par les opérateurs alternatifs était de nature à porter atteinte à la concurrence pour l’offre de services audiovisuels sur l’ADSL. » C’est en ces termes que, dans un communiqué rendu public jeudi 15 avril 2004, le Conseil de la concurrence a donné raison à Neuf Telecom (ex-LDCom). Le groupe de télécommunications demandait à installer dans les salles de répartition de France Télécom ses propres équipements (commutateurs Ethernet « vidéo ») afin de pouvoir déployer une offre technique de diffusion de programmes audiovisuels sur les lignes téléphoniques bénéficiant de l’ADSL. Une offre de télévision par ADSL concurrente de celle de France Télécom qui, avec TPS, a lancé le service TPSL à Lyon en fin d’année 2003 (voir édition du 17 décembre 2003). L’opérateur historique avait jusqu’alors refusé d’accéder à la demande de son concurrent. Le Conseil de la concurrence enjoint donc France Télécom à « autoriser la société Neuf Telecom à installer, dans les répartiteurs, les matériels de vidéo ADSL nécessaires au déploiement de son offre de télévision par ADSL et à procéder à la migration des lignes dégroupées sur ces nouveaux matériels ».
Par ailleurs, France Télécom et TPS devront « informer sur tous leurs supports publicitaires les consommateurs de l’incompatibilité de l’offre MaLigne TV/TPSL avec le dégroupage par un opérateur alternatif de la ligne de l’abonné pour l’accès à Internet haut débit ». Autrement dit, les deux acteurs devront clairement préciser aux futurs abonnés de TPSL que le service est intrinsèquement lié à l’offre ADSL de Wanadoo et, donc, incompatible avec une demande de dégroupage de la ligne téléphonique en vue du choix d’un FAI concurrent. « La commercialisation de l’accès à un service audiovisuel peut donc permettre de gagner des parts de marché dans le secteur de l’accès à Internet au détriment des opérateurs pratiquant le dégroupage de la boucle locale », justifie le Conseil de la concurrence. Conséquence logique, France Télécom devra facturer de façon distincte le transport des flux audiovisuels, depuis la régie des chaînes jusqu’aux points de livraison, et la desserte locale des abonnés. Ces deux services pouvant être « rendus par deux opérateurs différents », les sages du Conseil demandent à France Télécom « de modifier les contrats en cours en distinguant la facturation ».
La Freebox toujours privée de TF1 et M6
En revanche, la société Iliad (Free) a été déboutée de sa demande. Le fournisseur d’accès, qui propose également une offre audiovisuelle par ADSL dans le cadre de son forfait (voir édition du 27 novembre 2003), avait eu recours au Conseil de la concurrence pour obtenir l’autorisation de diffuser les programmes des chaînes TF1 et M6, présentes dans TPSL. Si « le Conseil a considéré qu’il n’était pas exclu que l’exclusivité de diffusion de TF1 et M6 sur TPSL constitue une pratique restrictive de concurrence, [il n’a] pas jugé qu’il existait, à la date de la séance, une atteinte à l’intérêt des consommateurs et l’économie du secteur suffisamment grave et immédiate pour justifier une injonction de reprise des deux chaînes hertziennes gratuites par tous les opérateurs proposant une offre de télévision par ADSL. » Il n’est toutefois pas exclu de voir un jour les chaînes concernées dans le bouquet de Free puisque l’institution « a relevé que TPS s’affirmait prêt à reprendre de bonne foi des discussions avec les opérateurs autres que France Télécom sur la diffusion des chaînes payantes du bouquet TPSL ».
Enfin, le Conseil s’est prononcé sur les autres griefs des plaignants. Il a bien noté que le tarif fixé pour le service « MaLigne TV » – indispensable pour bénéficier de TPSL – ne permettait pas à la concurrence de s’aligner sans consentir des pertes. D’autre part, l’alignement du tarif de TPSL sur celui de TPS constitue bien « une entente anticoncurrentielle horizontale et/ou verticale entre les sociétés France Télécom et TPS ». Pour finir, le Conseil note le « comportement abusif » de France Télécom qui profite de sa position dominante (91 % des accès ADSL) et de son exclusivité avec TPS pour adopter une « attitude dilatoire dans ses relations avec les fournisseurs d’accès Internet ». Malgré ces griefs reconnus, « le Conseil n’a pas considéré que des mesures conservatoires étaient justifiées ».