Chez Deliveroo, le début d’année a marqué l’entrée en phase d’exploitation d’une nouvelle version de l’algorithme Frank. Implantée dans le back-end de la société FoodTech, elle a vocation à réduire les délais de livraisons des repas.
Elle inclut une dose de machine learning ; en l’occurrence, des mécanismes d’apprentissage renforcé, par lesquels le programme améliore ses paramètres en fonction d’objectifs à atteindre.
En s’appuyant sur son armada de « bikers » (livreurs en vélo essentiellement) et sur son algorithme, Deliveroo veut générer davantage de chiffre d’affaires grâce à une meilleure allocation des courses… et l’élimination des temps d’attente.
Les travaux sur Frank ont coïncidé avec l’arrivée, à l’automne dernier, d’un nouveau Chief Technological Officer : Mike Hudack, venu de Facebook (il avait notamment dirigé l’équipe chargée des offres publicitaires après l’IPO du réseau social).
L’algorithme a été mis sur les rails en janvier, après des tests avec des entreprises (dont on ne nous précise pas l’identité au cours du point presse organisé mercredi matin dans les locaux de la filiale française).
Frank a pris la suite du dénommé Louie dans un contexte de forte croissance dans l’Hexagone : Deliveroo revendique un nombre de commandes multiplié par 7 entre mai 2016 et avril 2017. Dans le même temps, le nombre de restaurants partenaires a triplé (3000); celui des livreurs, plus que quintuplé (7500).
Hugues Décosse, Directeur général de Deliveroo France, le reconnaît : sur le cycle que couvre Deliveroo, certains éléments sont difficilement compressibles, à l’instar du temps de préparation d’un plat et de la durée nécessaire à sa livraison.
Frank a pour mission d’optimiser les autres maillons de la chaîne, en répondant à des questions telles que « Quand pourrai-je solliciter tel livreur ? » ou « À quel moment tel restaurateur devrait-il commencer à préparer son plat ? ».
Ses décisions, il les prend sur la base d’un historique de données associées à des millions de commandes. Des informations complémentaires sont injectées par les équipes locales, en l’objet de la météo ou du trafic routier, « en attendant d’intégrer des sources de données ».
La dimension de machine learning s’illustre par la possibilité, pour Frank, d’améliorer sa compréhension de chaque marché au fil du temps, en se figurant par exemple que le délai de préparation des commandes s’allonge plus nettement le dimanche que le samedi si le lundi est un jour férié.
« Les livreurs ont vu une différence énorme », assure Hugues Décosse, en précisant que le temps de livraison, annoncé à 31 minutes en décembre 2016, est passé à 26 minutes.
Frank permet aussi, dans une moindre mesure, de combiner des livraisons. Il pourrait aussi servir à profiler les utilisateurs et leur faire des recommandations, mais une exploitation sous cet angle n’est pas à l’ordre du jour, nous glisse-t-on.
Même chose pour une éventuelle offre de click & collect où l’on viendrait chercher, au restaurant, les plats commandés.
L’heure est plutôt à Deliveroo Editions, dont le lancement en France est prévu pour le 2e semestre 2017, initialement dans la petite couronne de Paris.
L’idée est de monter, en marque blanche pour les restaurateurs partenaires, des cuisines spécifiques à la livraison, situées dans des zones caractérisées par une forte demande, mais encore mal desservies.
Plusieurs de ces espaces sont déjà installés à Londres, où se trouve aussi l’essentiel de l’équipe technique de Deliveroo. Pas de développeurs en France, où la société emploie environ 120 personnes dans le commercial, le marketing et les RH, avec quelques analystes.
Une centaine de collaborateurs sont localisés à Paris. Les autres sont répartis entre les antennes de Lyon et Bordeaux, ainsi que le « micro-bureau » de Lille.
Deliveroo se dit aujourd’hui en mesure de livrer 9 millions de personnes dans l’Hexagone, avec une vingtaine de villes couvertes – les dernières ouvertes étant Dijon, Angers et Clermont-Ferrand.
En France, Deliveroo prélève 2,50 euros par commande (avec un supplément de 2 euros pour des montants inférieurs à 15 euros), en plus des commissions négociées avec les restaurants.
« On commence à être rentable sur certains marchés clés », confiait récemment Hugues Décosse à France Info, sans entrer davantage dans les détails.
« Ils sont indépendants : c’est flexible pour eux, c’est flexible pour nous. »
Ainsi Hugues Décosse résume-t-il la relation que la société entretient avec les milliers de « bikers » sur lesquels se fonde son service de livraison de plats commandés en ligne auprès de restaurants partenaires.
Les rapports sont parfois tendus avec cette communauté qui a démontré, l’an dernier à Londres, qu’elle était capable de s’unir, dans le cas présent en réponse à des évolutions de modèle économique.
Le changement en question porte sur la rémunération des livreurs. Un temps payés à l’heure, ils le sont désormais à la course : 5,75 euros à Paris et 5 euros en région, avec un système de « minimum garanti » le week-end.
Tout en déclarant, sur le fondement d’une « enquête interne », que 80 % des intéressés « sont satisfaits » du système, Deliveroo insiste sur les avantages qui leur ont été fournis ces derniers temps, à l’image d’une assurance responsabilité civile gratuite lancée en mars avec une rétroactivité au mois de janvier.
Deliveroo en Bourse : Londres décidera |
Alors que le concurrent Delivery Hero et sa traînée de marques Foodpanda et Foodora (présent en France) vient de réaliser une introduction en Bourse à Francfort à presque un milliard d’euros, Hugues Décosse reste discret sur les intentions de sa société. « La décision [d’une éventuelle IPO] se fera à Londres », se contente de dire le DG France de Deliveroo. Rappelons que la start-up FoodTech est née en 2013 sous l’impulsion de William Shu et de Greg Orlowski sous la dénomination Roofoods Limited. Elle a levé 275 millions de dollars en 2016. A l’époque, la valorisation dépassait déjà le milliard de dollars. Ses services sont disponibles dans onze autres pays (7 en Europe, 3 en Asie et l’Australie) avec, au global, 20 000 restaurants, 30 000 livreurs et 1 500 employés dans la boucle. |
(Crédit pour les photos dans le corps de l’article : Deliveroo)
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