Cela pourrait être un nouveau pan d’Armageddon, qui devient une réalité chez Free. Le projet évoqué en avril 2006 lors de la présentation de la Freebox HD par Xavier Niel, co-fondateur du groupe Iliad occupant les fonctions de vice-président du conseil d’administration et Directeur général délégué à la stratégie, vient de prendre forme ce jeudi 28 juin 2007 sous l’appellation TV Perso.
C’est un nouveau service offert par Free à ses abonnés équipés d’une Freebox HD. Comme son nom l’indique, TV Perso permet de faire sa propre télévision. C’est à dire produire ses propres contenus audiovisuels et les diffuser sur le réseau télévisé haut débit de Free (sur le canal 13 précisément). Le principe est simple. L’internaute exploite sa Freebox HD comme passerelle pour mettre à disposition des autres abonnés Free les contenus qu’il souhaite diffuser.
En pratique, il suffit de connecter un caméscope ou l’ordinateur (s’il est équipé d’une sortie vidéo) sur les entrées analogiques (composite ou, pour une meilleure qualité, S-vidéo) du décodeur vidéo de la Freebox HD. Celui-ci se charge d’encoder (en MPEG-2) le flux vidéo et de l’envoyer sur la plate-forme d’hébergement du fournisseur d’accès. Tout cela piloté à la télécommande sans avoir à saisir une seule adresse Web.
Diffusion en direct
Ce sont évidemment les capacités avant-gardistes de la Freebox HD qui autorisent un tel service. Le décodeur vidéo de Free est actuellement la seule « boxe » du marché à disposer de fonctionnalités d’encodage. Lesquels pourront prochainement servir à des fins purement personnelles. En revanche, si la Freebox HD est indispensable pour envoyer du contenu vidéo sur le réseau de Free, les versions antérieures du modem/décodeur (V4 et même V3) suffisent pour visionner le contenu des « Freenautes » au même titre qu’une chaîne de télévision traditionnelle. A condition que les abonnés bénéficient techniquement des services de télévision ADSL.
Perso TV offre deux modes de diffusion : le différé et le live. Si le différé est désormais monnaie courante grâce aux développements des plates-formes de diffusion vidéo comme DailyMotion et YouTube, la diffusion en direct s’inscrit comme une véritable révolution dans les usages. Jusqu’à présent, seule une régie professionnelle avec outils d’encodage et de diffusion pouvait prétendre à proposer du direct sur Internet. Avec Perso TV, un simple caméscope et une Freebox HD suffit pour transformer tout internaute en producteur d’émission télé.
On regrettera cependant qu’il soit impossible d’utiliser une simple webcam (via l’interface USB de la Freebox) plus simple d’utilisation et moins onéreuse qu’un caméscope. Mais les fonctionnalités sont amenées à évoluer et cette possibilité pourrait s’ouvrir dans un avenir plus ou moins proche.
Le mode « Live » permet soit d’enregistrer (sur les serveurs de Free) les contenus diffusés, soit de les supprimer aussitôt la diffusion terminée. L’utilisateur, lui, n’aura pas la possibilité d’enregistrer les émissions, au-delà de la simple fonctionnalité de time shifting (qui permet l’arrêt temporaire d’une réception et sa reprise ultérieure sans rien rater du programme). Free offre une journée complète de diffusion Live.
Le mode différé se limite à 6h50 de contenus par utilisateur. Mais sans limite de temps en termes d’hébergement. La qualité est meilleure que le mode Live. Restreint par la bande passante limitée, en ADSL à 1 Mbit/s, ce dernier compresse les flux vidéo en conséquence. Le mode différé est encodé pour une diffusion à 3,5 Mbit/s. Mais l’envoi du fichier vidéo sera d’autant plus lourd que le programme audiovisuel sera long. Une situation qui évoluera avec l’arrivée de la fibre optique qui offrira un débit symétrique (de 50 Mbit/s au début) partagé entre la diffusion et la réception.
Pas de monétisation du service ou de l’audience
« Cette innovation est un grand pas pour nous », soutient Maxime Lombardini, le nouveau directeur général qui succède à Michaël Boukobza démissionnaire. « TV Perso est le premier étage d’une télévision délinéarisée, destructurée. » Pourrait-on parler de télévision de demain? Transfuge de TF1, le nouveau dirigeant est convaincu que les diffuseurs nationaux auront toujours leur rôle à jouer en tant que premier média de masse. Mais il est clair qu’Internet et les services comme TV Perso vont s’imposer dans le nouveau paysage audiovisuel.
Pour l’heure, « nous n’avons pas de projet de monétisation du service ou de l’audience », insiste Maxime Lombardini, « aux Freenautes d’imaginer un modèle ». Free laisse ainsi en roue libre un service appelé à évoluer autour de solutions techniques ouvertes. Il n’est pas difficile d’imaginer le type de programmes et services qui pourraient être proposés à travers un système payant accompagné de la voix sur IP : productions télévisuelles sur mesure, cours d’enseignement particuliers, programmes pornographiques ou pire.
Le FAI est conscient des risques de dérive. Mais, que ce soit du côté des droits d’auteur et du contenu illicite, Free se retranche derrière l’aspect privé de son réseau et la connaissance de ses abonnés. « Qui se risquerait à poster du contenu pédophile sachant que nous possédons ses coordonnées? », réplique le directeur. En outre, un système d’auto-modération a pos teriori par les Freenautes permettra de faire le ménage dans les contenus litigieux voire carrément illicites. Quand au droit de regard du CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel), « selon nous, la réglementation au diovisuelle ne paraît pas s’appliquer à notre service », répond Maxime Lombardini.
Une logique propriétaire ?
Si TV Perso est une innovation majeure dans l’offre haut débit en France, il n’en reste pas moins qu’il s’éloigne de l’esprit du Net à travers le partage universel et mondial pour s’enfermer dans un réseau national propriétaire, certes utilisé par environ 2,5 millions d’abonnés. Un choix que Maxime Lombardini justifie par la difficulté à gérer les éventuels problèmes techniques subis par les non abonnés. Le dirigeant ne s’interdit pas, cependant, de lancer une plate-forme de diffusion ouverte sur Internet à terme.
D’autre part, TV Perso se distingue par la diffusion des contenus sur l’écran de télévision (et non pas le « simple » moniteur du PC) et la qualité exceptionnelle du service, bien supérieure à celle offerte par YouTube et autre DailyMotion. Surtout, le mode de diffusion en direct, même au sein d’un réseau fermé, reste, à notre connaissance, une première mondiale… qui pourrait bien faire des émules. En attendant, Free espère avec TV Perso attirer à lui toujours plus d’abonnés. C’est aussi l’un des objectifs (peut-être le principal) de ce nouveau service qui a nécessité deux ans de développement
La fibre optique pour la rentrée |
Alors que la presse attendait l’annonce du lancement officiel de l’offre fibre optique de Free, le fournisseur d’accès Internet a à peine abordé le sujet. » Tout se passe bien », a assuré Maxime Lombardini, « nous ne rencontrons pas d’obstacles imprévus ». Quand l’offre sera-t-elle effective? « Nous ferons des annonces dans le courant de l’été sur l’avancée de l’offre. « Sans plus de précision. Free ne risque-t-il pas de prendre du retard face aux offres concurrentes de Neuf Cegetel et Orange. « Il faut rapprocher la fibre optique de la construction du réseau en paire de cuivre. » Autrement dit, il ne sert à rien de se presser face à un tel enjeu industriel. |
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