« Et qui s’en est servi depuis le début de la session ? »
À cette question d’Ulku Rowe, de nombreuses mains sont restées levées dans l’amphithéâtre au Palais des Congrès de Paris qui accueillait, ce jeudi, la plénière d’ouverture du Google Cloud Summit.
La directrice technique et financière du « Bureau du CTO » – équipe qui gère les problématiques des grands comptes utilisateurs de la plate-forme cloud du groupe américain – avait d’abord demandé qui, dans l’assistance, utilisait au moins un service parmi Gmail, Google Search, Chrome, Google Maps, YouTube, Android et le Play Store.
Cet écosystème dont toutes les composantes réunissent plus d’un milliard d’utilisateurs actifs fait office de vitrine. Notamment en matière de sécurité, entre Gmail qui « filtre 10 millions de spams par minute » et Chrome qui, dans le même laps de temps, « émet environ 6 000 messages d’avertissement sur des logiciels potentiellement indésirables ».
Google a ajouté des briques au niveau de l’infrastructure, en dotant des serveurs et des cartes réseau d’une puce baptisée Titan. En cas de changements non autorisés, elle est capable d’empêcher le (re)démarrage d’un équipement.
La sécurité, c’est aussi des API comme « Data loss prevention ».
Destinée à détecter et à masquer des éléments « sensibles » allant des visages aux numéros de sécurité sociale, elle a été, pour l’occasion, mise en œuvre sur la messagerie collaborative Slack, au travers d’un bot.
Un Wi-Fi instable au démarrage de la démonstration nous aura un instant rappelés à la réalité du cloud, avant que le responsable produit David Thacker n’enchaîne sur le volet collaboratif… et sur les technologies d’apprentissage automatique (machine learning).
Google en a injecté dans Gmail pour suggérer des réponses avec la fonctionnalité Smart Reply, dans son tableur (Sheets) pour l’analyse de données ou encore dans Drive pour mettre en avant les fichiers que les utilisateurs sont le plus susceptibles d’ouvrir.
La firme propose également, dans le domaine de l’intelligence artificielle, six modèles « prêts à l’emploi » pour la traduction, la reconnaissance vocale, le traitement naturel du langage, la reconnaissance de formes, la recherche d’emploi et l’analyse de vidéos.
Pour ceux qui souhaitent entraîner leurs propres algorithmes, il y a l’offre Cloud Machine Learning, sortie de bêta au mois de mars. Elle s’appuie sur le framework TensorFlow, placé en open source fin 2015, avec des puces dédiées venues ultérieurement : les TPU (« TensorFlow Processing Units »).
En l’état, seule l’une de ses composantes est disponible dans les datacenters européens de Google – en Belgique en l’occurrence.
Le groupe n’émet pas de commentaire à ce sujet, mais assure ouvrir « actuellement un datacenter par mois » et œuvrer pour être en conformité avec le règlement européen sur la protection des données (RGPD), qui doit entrer en vigueur en mai 2018.
Affirmant que seulement 5 % des charges de travail en entreprise ont basculé dans le cloud, Sébastien Marotte fait l’analogie avec le marché des terminaux mobiles, dominé il y dix ans par Nokia et BlackBerry sur le segment BtoB.
« Ce qui va se passer dans les 3 à 5 prochaines années sera totalement différent de ce qui s’est passé sur les 3 à 5 dernières », veut croire le responsable Google Apps for Work pour l’EMEA.
Google ne donne pas d’indicateurs financiers sur son activité cloud, dont on estime que les revenus annuels ne dépassent pas le milliard de dollars, quand ils avoisinent les dix milliards chez Microsoft et Amazon.
L’aspect « flexibilité » est vu comme un levier compétitif, aussi bien au travers de la facturation à la seconde (récemment élargie à davantage de services) que des VM « préemptibles ».
La société Amadeus, qui fournit des solutions informatiques à l’industrie du tourisme et du voyage, fut l’une des premières utilisatrices de ces instances de calcul à courte durée de vie (jusqu’à 24 heures). Elle estime avoir, en un an d’exploitation, réduit ses coûts « jusqu’à 50 % » sur ce volet.
Répartie sur trois régions géographiques (Amérique, Europe, Asie), son infrastructure compte 2 000 vCPU. Elle accompagne la prise d’importance des canaux digitaux dans le parcours des clients finaux.
Le ratio de conversion pour les billets d’avion témoigne de cette tendance : d’une réservation pour dix consultations il y a quelques années, on est passé à une pour mille, selon le directeur R&D « Airline IT » Christophe Dufayet.
Du côté de La Redoute, on utilise Google Cloud Platform depuis 18 mois. Il en a résulté un « Wikipedia de la data » en interne et un outil de recherche vocale qui doit encore être intégré dans les applications mobiles Amadeus.
Selon le CDO François Nguyen, c’est aussi « un moyen de se rendre plus attractif auprès des talents » dans les métiers du numérique, à l’heure où le groupe réalise 91 % de son chiffre d’affaires en ligne.
Témoignage moins attendu : celui de Dailymotion, à la fois concurrent de Google (propriétaire de YouTube)… et client BtoB sur le volet cloud.
Après des années d’exploitation de sa propre infrastructure pilotée par Iguane Solutions (société dont elle s’était émancipée en 2005), la plate-forme vidéo a fait la bascule « en quelques semaines », d’après son responsable data Thomas Achache.
Elle a pu, entre autres, améliorer la recommandation de contenus (audio, vidéo) et la détection des fraudes publicitaires.
Parmi ces clients, Amadeus est celui qui présente le plus gros effectif, avec quelque 15 000 collaborateurs.
Les retours d’expérience de grands groupes, qui permettront réellement de se faire une idée des capacités du cloud de Google, attendront, comme l’aura fait remarquer une analyste présente dans la salle.
Photo d’illustration de l’article : Sébastien Marotte
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