« Ce qui s’est passé prouve qu’ils sont capables involontairement ou pas de bloquer l’ensemble de l’écosystème . »
La tension qui règne entre Google et l’industrie française de la publicité en ligne transparaît dans cette déclaration de Jean-Luc Chetrit relayée par l’AFP.
L’intéressé est directeur général de l’UDA (Union des annonceurs). Cette dernière est l’un des signataires d’une lettre ouverte adressée au groupe américain. L’Udecam (Union des entreprises de conseil et achat média), le Geste (Groupement des éditeurs de services en ligne), le SRI (Syndicat des régies internet) et l’IAB France (Internet Advertising Bureau) l’accompagnent dans cette démarche.
Les cinq organisations dénoncent une mise en œuvre « subite et sans concertation » du nouveau règlement européen sur la protection des données (RGPD). Elles évoquent « un impact majeur sur les revenus et les coûts […] à tous les niveaux de la chaîne de valeur publicitaire ».
Google est plus particulièrement pointé du doigt pour les nouvelles règles imposées à travers les conditions d’utilisation de sa plate-forme programmatique DoubleClick Bid Manager.
Le SRI s’en était déjà alarmé fin mai, parlant d’une « baisse très inquiétante » des achats via ce canal. La lettre qu’il cosigne va plus loin : il y est question d’une « coupure massive » liée également à des problèmes d’interopérabilité.
Entré en application le 25 mai 2018, le RGPD a abrogé la directive 95/46/CE en tant que nouveau règlement européen relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données.
Il établit notamment une distinction entre les responsables de traitements de données (qui en déterminent la finalité et les moyens) et les sous-traitants (qui exécutent lesdits traitements).
Sous le régime du RGPD, les responsables de traitements doivent obtenir le consentement « libre, spécifique, informé et explicite » des internautes avant de procéder auxdits traitements.
Pour obtenir ce consentement, Google se repose sur les éditeurs*. Tous ceux qu’il considérait ne pas offrir suffisamment de garanties en la matière se sont vu fermer les vannes de la DoubleClick Bid Manager. Ils sont ainsi devenus inaccessibles aux annonceurs.
La firme a, en parallèle, ouvert sa propre plate-forme pour vendre des espaces publicitaires non ciblés destinés aux internautes qui n’ont pas donné leur consentement. La transition a donc été sans douleur pour les médias dont la régie utilise exclusivement les outils de Google.
Les auteurs de la lettre ouverte notent que Google « a indiqué clairement vouloir trouver les solutions pour éliminer les effets collatéraux de ses décisions d’ici à la fin de l’été ». Ils estiment cependant nécessaire d’« accélérer le calendrier ». Des entretiens ont été sollicités, dans cette optique, avec l’Autorité de la concurrence et le secrétaire d’État au numérique Mounir Mahjoubi.
* Google considère agir en tant que sous-traitant, pour le compte d’éditeurs responsables de traitement, pas nécessairement parce qu’ils en déterminent la finalité et les moyens, mais en vertu de la « possibilité technique » qu’ils ont de ne pas transmettre les données collectées.
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