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Industrie du futur : esquisse des forces et faiblesses de la France

A l’ère du numérique qui s’étend dans tous les domaines, il ne faut pas que la France baisse les bras. Et encore moins qu’elle s’autoflagelle sous forme de French bashing.

Dans le cadre de la première édition du forum Entreprise du Futur qui s’est déroulé le 14 janvier à la Cité Internationale de Lyon, une table ronde avec des dirigeants d’entreprises de premier plan a permis d’esquisser la feuille de route de l’industrie face aux défis de la transformation numérique.

Dans leurs discours respectifs, tous les intervenants s’accordent à placer le numérique au cœur des opportunités à saisir mais pointent aussi des contraintes en lien avec le cadre législatif.

« Les Américains sont épatés par la capacité des entreprises françaises à se réinventer et à rebondir », selon Pascale Dumas, Présidente HP Inc en France.

« Ils reconnaissent la grande qualité de notre système éducatif universitaire et la valeur des diplômés des grandes écoles. Ils citent aussi l’efficacité du financement public de la recherche par le crédit d’impôt recherche. »

Mais la représentante française de la firme IT américaine (désormais scindée en deux) dresse aussitôt un bémol : « Notre aptitude à l’auto-dénigrement reste toujours une surprise pour eux. L’Américain est aux antipodes de cette manière de s’exprimer. Le cadre légal qui bouge constamment en France est aussi un sujet de préoccupation. »

Pascale Dumas résume en quelques phrases le regard que portent les observateurs américains sur les entreprises françaises.

« Dans un cadre de compétition internationale aiguë, il faut apprendre à laver notre linge sale entre nous », insiste-t-elle. Notre aptitude à nous plaindre publiquement – prétendûment française – dessert nos intérêts.

Un travers que ne reprend pas à son compte Bruno Bonnell. Le président de Robolution Capital et d’Awabot estime que la France est « lente à adopter des évolutions techniques mais rapide pour rattraper ses retards ».

Il poursuit : « La France a suivi trop fidèlement le modèle anglo-saxon avec l’essor du numérique. La génération des futurs cadres sont nés après 1997, ils baignent dans le numérique de manière naturelle. Pour les autres, même des gens comme moi, c’est un effort d’adaptation. »

De son côté, Philippe Darmayan, Président d’ArcelorMittal France et Président de l’Alliance de l’Industrie du Futur, rappelle que la part de l’industrie dans le PIB est passée de 35% en 1970 à 13 % aujourd’hui. Une baisse drastique qu’il prendre en compte dans l’évaluation de la politique industrielle à mener en France.

Guy MAUGIS, ancien P-DG de Bosch France et Président de la Chambre Franco-Allemande de Commerce et d’Industrie, évoque l’admiration dont font l’objet nos ingénieurs en Allemagne.

Mais il fustige en parallèle les sérieuses carences de notre système d’apprentissage qui ne peut être dissocié de l’écosystème de notre pays. « En Allemagne, les entreprises sont au cœur du dispositif », observe-t-il.

François Bichet, Chief Technology Strategist de Dassault Systèmes, semble plus optimiste sur les capacités de la France à s’adapter.

« Aujourd‘hui, l’utilisateur a pris le pouvoir. La transformation numérique des entreprises a  simplifié la hiérarchie. Chez Dassault Systèmes, c’est un système en réseau et transversal qui pousse la hiérarchie à changer tous les ans. »

Une assertion qui étonne Bruno Bonnell : « Je voudrais voir de près comment vous procédez. »

Financement : « Les fonds d’amorçage manquent »

Le financement des activités d’une start-up jusqu’à celle de l’industrie constitue toujours un problème en France.

Emile Di Serio, Président de Saint-Jean Industrie (important équipementier automobile) déclare :

« Par rapport à l’Allemagne, nous avons une démographie plus dynamique. C’est une chance mais les banques françaises sont frileuses. Lors de notre dernier investissement, seuls 8 % des fonds provenaient de banques françaises. »

Un diagnostic partagé par Bruno Bonnell. « Le financement est problématique. Aux Etats-Unis, les fonds proviennent des VC (capitaux-risqueurs). Après la phase d’amorçage, le stade suivant, c’est une société plus grosse qui va  absorber la boîte en rachetant des parts, avec un profit. »

Tout en poursuivant : « Pour les plus gros, ce sont des fonds d’investissement comme Sequoia capital et parfois des GAFA [club Google – Amazon – Facebook – Apple]. Ils absorbent les structures et les intègrent dans une stratégie mondiale. »

Quid en France ? « Il n’y a pas de fonds d’amorçage. Robolution Capital est un des rares fonds d’amorçage. Il est plus facile de recourir au capital-développement et, dans ce domaine, Bpifrance fait un travail extraordinaire », analyse Bruno Bonnell.

L’arrivée de Side Capital sur le marché vient donc combler en partie cette lacune.

Besoin d’une vraie politique industrielle

Quelle serait leur principale recommandation à adresser à la classe politique alors qu’une élection présidentielle arrive en 2017 ?

Tous s’accordent à dire que la France peut être une grande puissance digitale en Europe. Mais Emile Di Serio souligne le besoin essentiel « d’une vision politique sur le futur de l’industrie ».

Pour tous les intervenants de la table ronde, la transformation économique, en train de se dérouler dans le monde, est majeure. Elle appelle des actions vigoureuses en France.

Par exemple, il faut laisser de la flexibilité pour autoriser des expérimentations et accorder davantage d’attention aux problèmes rencontrés par les groupes industriels.

Vue générale du Forum Entreprise du Futur – Lyon, 14 janvier 2016

(Crédit photo illustration : Shutterstock.com – Droit d’auteur : Thissatan Kotirat)

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