Benoît Thieulin est venu prêter main forte à la délégation du Groupe Open présente au salon ROOMn (marketing et mobilité) de Monaco.
Mercredi soir, le dirigeant fondateur de l’agence interactive Netscouade (désormais rattachée au groupe Open) a co-animé une session keynote avec Stéphane Messika (CEO de Kynapse, une autre branche d’Open, en photo à droite) sur le thème de la « boîte à outils d’une Transformation Digitale réussie ».
En marge de la conférence, Benoît Thieulin a précisé les contours de ses nouvelles fonctions de directeur de l’innovation au sein du groupe IT.
Difficile de ne pas parler des liens entre la politique et le numérique avec la course à l’Elysée qui est engagée sur l’année 2017.
Dix ans plus tôt, il avait contribué de manière active à la campagne de Ségolène Royal en créant une plateforme de communication et d’organisation et un réseau social pour la candidate PS.
(Entretien réalisé le 8 mars 2017)
ITespresso.fr : Comment s’est passée l’intégration de la Netscouade au sein du groupe Open ?
Benoît Thieulin : La Netscouade a bientôt 10 ans. Elle a suivi la révolution numérique avec l’émergence du Web social. Elle a aidé les marques à y prendre pied. Elle a accompagné le foisonnement des contenus et la communication digitale.
De mon côté, j’ai beaucoup travaillé sur la question de la transformation numérique, à travers la Netscouade mais aussi notamment en occupant les fonctions de président du Conseil national du numérique [période 2013-2016, ndlr].
Fondamentalement, trois métiers convergents sont au cœur de cette transformation numérique : communication, conseil et l’IT. Mais, une petite agence de 50 personnes ne peut pas couvrir ce vaste sujet. Il faut une offre de bout en bout.
Le groupe Open permet cette agrégation d’articulation autour de thèmes porteurs comme la data, la mobilité, l’Internet des objets (IoT) et les plateformes e-commerce. La Netscouade intervient de manière transversale dans ses domaines et s’intègre au final dans l’offre d’Open.
ITespresso.fr : Ton poste de directeur de l’Innovation consiste en quoi ?
Benoît Thieulin : Je reste directeur général de La Netscouade et j’accompagne son intégration dans le groupe et je contribue à la gestion des grands comptes.
Simultanément, je réfléchis avec le groupe Open et Stéphane Messika [CEO de Kynapse by Open, ndlr] à l’élaboration d’un dispositif d’innovation pour évangéliser en amont de la mise en place de réflexions stratégiques et des offres digitales.
Il s’agit de moissonner ce bouillon de culture de l’innovation à l’ère numérique en croisant les expériences secteur par secteur. Pourquoi ne pas transférer une expérience de design dans l’e-commerce dans la sphère bancaire par exemple. C’est toute l’histoire des disrupteurs depuis 20 ans.
Il s’agit de mettre le germe de l’innovation à l’intérieur des grands groupes. FastLab est une nouvelle brique de ce dispositif d’innovation. Ce programme pour accélérer les projets digitaux sera présenté la semaine prochaine.
ITespresso.fr : Les organisations des SSII traditionnelles (ou ESN dans la terminologie du Syntec Numérique) sont perçues comme monolithiques alors que l’ubérisation les affecte aussi. Comment réagit le groupe Open ?
Benoît Thieulin : Le groupe Open s’est appliqué à elle-même cette transformation numérique. A la fin de l’année 2015, une stratégie dans ce sens a été communiquée.
Elle est fondée sur une approche d’une culture digitale forte renouvelée avec des opérations de croissance externes comme Kynapse ou La Netscouade.
Tous les fournisseurs de services informatiques sont entrés dans une ère de transition numérique mais elle n’est pas achevée.
ITespresso.fr : Lors de la keynote de clôture de mercredi sur ROOMn, tu citais deux modèles renversants dans l’assurance : Lemonade et Oscar. Comment peut-on sensibiliser les clients du groupe Open au risque de disruption dans leur secteur de prédilection ?
Benoît Thieulin : Je pense que l’on a trouvé un point de bascule il y a quatre ans. On regardait avec fascination les grands géants du Web comme Google ou Amazon et les nouvelles licornes comme Uber ou Airbnb. De grands groupes sectoriels (transport, énergie, banque, assurance) estimaient que ces mouvements les affecteraient guère.
Aujourd’hui, ce discours est mort. Plus personne n’imagine qu’un secteur puisse être épargné. Le sujet n’est plus s’il faut se transformer à l’ère numérique mais comment.
C’est un sujet de top management à prendre au sérieux car, à la base, les employés ont peur du phénomène d’ubérisation.
Alors il faut s’inspirer des expériences relevées ailleurs. Inutile de faire des exercices théoriques de prospective. Il faut regarder ce qui se passe ailleurs et tester.
C’est ça le Web, une leçon permanente de faisabilité.
ITespresso.fr : Changeons de registre. Tu es aussi un spécialiste de la communication politique à l’ère numérique. Quelles enseignements tires-tu de l’élection présidentielle américaine ?
Benoît Thieulin : Primo, on a changé de dimension en termes de propagation de fake news. C’est dans les profondeurs des communautés de Facebook que cela se passe. L’endroit principal où les gens se forgent une idée pour aller voter, c’est à l’intérieur de micro-communautés difficiles à évaluer.
Secundo, des services secrets de renseignement sont intervenus pendant le processus électoral. On évoque l’incursion de la Russie mais sans vraiment disposer de preuves.
C’est un vrai sujet de sécurité IT. On l’a vu avec le piratage de la boîte mail de John Podesta [Directeur de campagne d’Hillary Clinton dans la course à la Maison Blanche]. La fuite d’éléments stratégiques peut fragiliser une campagne.
Tertio, Donald Trump a exploité la data comme Hillary Clinton, même s’il est difficile d’analyser l’impact. Mais on l’avait déjà vu lors de la deuxième campagne présidentielle de Barack Obama en 2008 mais, cette fois-ci, les outils sont parvenu sa maturité.
Trump s’est surtout distingué par sa capacité de mobiliser ses militants sur les médias sociaux. Son usage de Twitter en particulier est phénoménal.
Trump, c’est le plus grand troll de l’histoire du Web. C’est vraiment surprenant qu’il continue de tweeter après son investiture à la présidence des Etats-Unis.
ITespresso.fr : En France, quels regards portes-tu sur la campagne présidentielle ?
Benoît Thieulin : Globalement, c’est une drôle de campagne qui n’a pas vraiment commencé. Y compris sur le Web.
Je trouve cela cela frappant mais on ne le dit pas assez : le parcours d’Emmanuel Macron a été capable de structurer un quasi-parti politique en moins d’un an en partant de rien.
Il a organisé sa campagne à partir du numérique comme Obama l’avait fait en 2008 et, dans une moindre mesure, Ségolène Royal pour sa campagne en 2007. La démonstration de force est impressionnante.
Parallèlement, dans l’usage des médias sociaux, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen font preuve d’une dextérité pour prendre la parole sur les réseaux communautaires.
Il est vrai que ce sont en premier lieu de bons orateurs en public et des bateleurs de campagne. Des qualités anciennes qui redeviennent centrales à l’ère numérique.
En général, tous les hommes politiques se dotent de la panoplie de base des outils numériques (site Web, présence sur les médias sociaux, collecte en ligne…). Mais il est vrai qu’il y des candidats qui les utilisent mieux que d’autres. Leur personnalité y est pour beaucoup.
ITespresso.fr : Quel candidat soutiens-tu dans cette campagne ?
Benoît Thieulin : Je suis un observateur totalement neutre cette année et garder ma liberté d’analyse sur les politiques numériques des candidats.
Le problème, c’est que le numérique n’est pas un sujet de campagne. Sauf peut-être Benoît Hamon qui a parlé de robots à taxer. Je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure solution mais, au moins, la discussion est engagée.
La politique continue de m’intéresser au plus haut point. Je voudrais pousser le sujet du numérique plus haut mais je ne m’implique pas dans une campagne en particulier.
Je réserve mon choix à titre individuel lorsque l’on se rapprochera du premier tour de l’élection présidentielle.
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