Interview : comment SFR compte lancer son propre réseau de diffusion de contenus
SFR va dévoiler son propre réseau de diffusion de contenus (CDN) d’ici fin 2011. Ce qui va l’amener à proposer des « services gérés » aux éditeurs de contenus. Entretien avec Alexandre Wauquiez, Responsable des solutions réseaux chez SFR.
Les fournisseurs d’accès Internet cherchent des relais de croissance et de nouvelles pistes pour financer leur réseau.
Certains souhaitent désormais capitaliser sur leur base de clients pour se lancer dans la diffusion de contenus au plus près de ces mêmes utilisateurs et ainsi demander aux éditeurs de participer au financement de leurs réseaux.
Après le cas de BT au Royaume-Uni, c’est au tour d’un fournisseur d’accès français – SFR – de lancer son propre « CDN régional » (réseau de diffusion de contenus qui n’est destiné qu’à ses propres abonnés).
L’information a été dévoilée par Pierre-Alain Allemand, Directeur Général réseaux de SFR, lors d’une récente interview accordée aux Échos.
Interrogé par ITespresso.fr, Alexandre Wauquiez, responsable des solutions réseaux, confirme le lancement de cette plate-forme destinée aux éditeurs de contenus – essentiellement français – d’ici fin 2011.
(Entretien téléphonique réalisé le 18 avril 2011)
ITespresso.fr : Qu’est-ce qui justifie le lancement d’un CDN propre au réseau SFR ?
Alexandre Wauquiez : La structure des réseaux Internet est en train d’être modifiée et l’on constate depuis 12 à 18 mois une croissance exponentielle du trafic entrant liée à la croissance de la vidéo. Cela n’existait pas à ce niveau auparavant. Dans les cinq prochaines années, le trafic devrait être multiplié par dix à cause de la vidéo et les téléviseurs connectés. Nous devons donc répondre aux problématiques d’engorgement et de saturation… qui plus est, nous avons des contraintes sur les boucles locales mobiles dont nous ne pouvons pas étendre la capacité à l’infini. C’est pour cette raison que nous pensons que les opérateurs ont un nouveau métier à prendre en compte qu’est celui de diffuseur de contenus. De la même manière qu’il existe des diffuseurs sur les réseaux hertziens et satellites, il y a une place pour les opérateurs sur les réseaux « internet » à destination des boucles locales fixes et mobiles.
ITespresso.fr : Comment SFR veut s’installer sur ce marché ?
Alexandre Wauquiez : Si l’on passe d’une diffusion de TV sur IP multicast (un flux pour l’ensemble des abonnés, ce qui génère une bande passante faible) à une diffusion unicast (un flux par abonné, qui consomme beaucoup de bande passante puisque chaque personne va chercher le contenu), le risque est simple : si 10 000 personnes vont chercher un contenu, on consommera 10 000 fois plus de bande passante… aucun réseau ne peut supporter ce mode de diffusion. Il faut donc répondre à cette demande en optimisant la diffusion des contenus en les rapprochant au plus près de l’utilisateur final pour soulager l’infrastructure et c’est pour cela que nous travaillons sur une palette de services gérés à destination des éditeurs (serveurs de cache/CDN, adaptation dynamique du débit pour l’utilisateur, hand-over automatique entre 3G et Wi-Fi, multicast pour les flux en direct…).
ITespresso.fr : N’est-ce pas un risque pour la neutralité du Net que « d’enfermer » des contenus sur votre réseau à destination de vos seuls abonnés ?
Alexandre Wauquiez : Je me permets de rappeler que nous ne filtrerons et ne bloquerons aucun contenu qui vient de l’Internet. Nos réseaux sont ouverts… Nous ne sommes pas dans l’idée d’empêcher les utilisateurs d’accéder à un contenu mais nous avons l’ambition d’améliorer la qualité de diffusion des contenus. Nous proposons aux éditeurs qui souhaitent se différencier de leurs concurrents d’utiliser nos briques techniques pour optimiser leurs services et être assuré d’une qualité de diffusion de leurs contenus toujours optimale pour l’internaute. Pour nous, opérateur, c’est un modèle gagnant-gagnant qui cela contribue au financement de nos réseaux et à leur optimisation. Et pour l’utilisateur final, qui ne sera pas amené à payer plus cher son accès, cela permet une expérience de navigation améliorée.
(Lire la fin de l’interview page 2)