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Interview Credit.fr : « Conforter notre place dans le crowdlending »

Dans le portefeuille FinTech des start-up soutenues par Truffle Capital, Credit.fr sert de référence dans le domaine du crowdlending (prêt participatif entre particuliers ou de particulier à une entreprise).

Un update de ses activités a été réalisé dans le cadre de VIVA Technology lors d’une présentation globale des sociétés rattachées à ce fonds d’investissement actif dans l’univers du logiciel et plus globalement du numérique.

Credit.fr a été co-fondée en septembre 2014 par Thomas de Bourayne et Laurent de Bernède mais l’activité a réellement commencé en mars 2015. A la fin de cette même année, Credit.fr a bouclé  une levée de fonds de trois millions d’euros auprès de Truffle Capital*.

Elle est désormais accompagnée par Geoffroy Roux de Bézieux (ex-Virgin Mobile) qui a pris la présidence du conseil de surveillance de Credit.fr, tout en injectant à titre individuel 900 000 euros dans le capital de la société.

La plateforme de crowdlending dispose d’un agrément ORIAS en tant qu’intermédiaire en financement participatif (IFP) depuis octobre 2014. Après avoir démarré ses activités en se concentrant sur les prêteurs particuliers, Credit.fr a commencé à s’ouvrir aux personnes morales à partir de septembre 2015. Et bientôt les organisations institutionnelles vont arriver. Sa communauté de prêteurs dépasse désormais les 4000 membres.

Les dirigeants de Credit.fr se montrent satisfaits de l’accélération de l’activité en nombre de dossiers, en montant moyen par dossier, ainsi qu’en encours de production. Mais il faut se montrer « extrêmement sélectif » dans les dossiers retenus (les sociétés doivent notamment disposer d’une existence de plus de 4 ans pour éviter un risque de taux de défaillance important avant cette échéance).

« Nous travaillons avec une distribution indirecte avec des courtiers, des conseillers en patrimoine… », précise Laurent de Bernède lors de son pitch de la session Truffle Capital organisée sous l’égide de VIVA Technology. Mais aussi des banques dans des opérations de co-financement alors que l’on aurait pu imaginer une certaine concurrence entre les réseaux d’emprunts traditionnels et alternatifs.

Le marché du crowdlending démarre en France mais il est en voie d’accélération. Il tournait autour de 31,5 millions d’euros en 2015 mais il va passer à 120 millions d’euros en 2016. D’ici deux et ans, on peut imaginer un business à un milliard.

(Interview réalisée le 1er juillet 2016)

ITespresso.fr : Quel bilan d’étape peut-on effectuer de Credit.fr ?

Laurent de Bernède : On a fêté notre premier anniversaire fin mars. En 15 mois d’existence, nous avons financé 70 projets [sur plus de 12 000 dossiers reçus, ndlr] et collecté 3,5 millions de financement pour les TPE-PME.

Notre collecte moyenne par mois se situe entre 500 000 et 600 000 euros par mois. Nous observons une accélération notable : sur les 3,5 millions d’euros recensés en cumul, les deux tiers de ce montant ont été collectés depuis le début de l’année.

La société dispose d’un effectif d’une dizaine de personnes.

ITespresso.fr : Avec Credit.fr, vous vous positionnez sur le podium du crowlending en France. Comment dépeindre le marché ?

Laurent de Bernède : Lendix est en tête en termes de production parce que la société est sur un modèle qui ressemble plus à de l’intermédiation de financement bancaire. Elle dispose d’un fonds qui abonde les collectes avec l’argent de la banque Wormser et d’autres investisseurs. On se rapproche ou on se chevauche pour la deuxième position avec Unilend et Lendopolis en fonction des mois.

Lendosphère fait aussi des très bon mois avec des projets entre 500 000 euros et un million d’euros mais la plateforme est nichée sur le thème du développement durable avec des sourcing de projets plutôt grands groupes.

De leur côté, Bolden et Prexem grandissent bien et poursuivent leur chemin. Mais le problème du financement en capital va se poser pour les plateformes affichant un niveau de croissance moindre. Sachant que le point d’équilibre se situe aux alentours de 100 millions d’euros en production par an.

Les plus grands financiers vont venir financer le top trois voire cinq des plateformes. La route sera compliquée. Il y aura certainement des mouvements de consolidation et des acteurs qui vont disparaître.

ITespresso.fr : Quel est l’intérêt de demander un nouvel agrément auprès de l’AMF pour obtenir le statut de Conseiller en investissement participatif (CIP) ?

Laurent de Bernède : C’est en vue de la nouvelle règlementation qui entre en vigueur normalement au 1er octobre 2016. Elle est liée à une ordonnance publiée en avril qui a monté les plafonds des « minibons » à 2,5 millions d’euros sur douze mois (au lieu d’un million d’euros). Tandis que le plafond d’investissement des particuliers est passé de 1000 à 2000 euros par projet.

L’ordonnance va permettre notamment l’intermédiation de bons de caisse particuliers (minibons) via les plateformes de financement participatif. Mais il faut obtenir le statut de Conseiller en investissement participatif (CIP, c’est le statut du crowd equity). Il va pouvoir être étendu aux intermédiaires en financement participatif (IFP), comme Credit.fr.

On émet déjà des bons de caisse mais nous ne prenons pas en charge la partie intermédiation/mise en relation. En fait, nous exploitons une plateforme technique mise à disposition des emprunteurs pour qu’ils puissent émettre eux-même des bons de caisse s’ils ont trouvé des personnes morales qui acceptent de souscrire à leurs plans de collecte. Nous sommes plutôt dans la situation d’une SSII qui met à disposition des emprunteurs une plateforme technique.

Avec ce nouvel agrément, nous pourrons nous positionner en tant qu’intermédiaire et nous serons en mesure de conseillers nos prêteurs (personnes physiques ou morales) pour qu’ils souscrivent à ces bons de caisse. Le tout dans un cadre règlementé. Nous pourrons réaliser un travail commercial dans ce sens. Nous n’avons pas le droit de le faire en l’état actuel.

La souscription de bons de caisse va aussi permettre à des sociétés de gestion qui ont des fonds de dettes de venir souscrire directement sur les plateformes. Aujourd’hui, elles ne le font pas vraiment parce qu’il n’existe pas de véhicules appropriés.

ITespresso.fr : Etes-vous intéressés par les prêts inter-entreprises, une autre évolution règlementaire en cours de gestation ?

Laurent de Bernède : Pas vraiment. On reste sur notre positionnement initial. C’est à dire le financement des TPE-PME avec trois sources : les prêts entre particuliers (P2P), les personnes morales qui ont beaucoup de trésorerie (qui peuvent être des holdings patrimoniaux ou des sociétés commerciales) et, demain, l’argent institutionnel qui va venir souscrire à ces fameux minibons par le biais de fonds communs de titrisation (FCT), des fonds de dettes ou des fonds professionnels spécialisés (FPS).

Ils peuvent arriver avec leurs propres véhicules ou les plateformes pourront créer leurs propres fonds (un peu sur le modèle de Lendix) pour maîtriser cette forme de financement par le biais des organisations institutionnelles.

ITespresso.fr : Quelles organisations institutionnelles vont bondir sur le sujet ?

Laurent de Bernède : Les assureurs ont goûté au financement des TPE-PME à travers les fonds de prêts à l’économie (FPE), qui existent depuis quelques années. Ils étaient dotés d’un budget global de 50 milliards d’euros, fédérant l’ensemble des acteurs de l’assurance. Ils ont déjà injecté 20 milliards dans l’économie. Maintenant, ils vont se tourner vers les plateformes de crowdlending pour placer de l’argent.

Le modèle que l’on a vu apparaître chez Lendix est une prise de participation dans le capital et de l’apport de fonds sur la plateforme à travers des fonds. CNP Assurances et Matmut ont pris position dans ce sens.

On a vu aussi Aviva France et AG2R La Mondiale s’engager respectivement à hauteur de 50 millions d’euros et 20 millions d’euros dans un fonds commun géré par Eiffel Investment Group (baptisé Prêtons Ensemble).

Une vingtaine de plateformes européennes de crowdlending seront sélectionnées dans ce sens mais on trouvera beaucoup d’acteurs français dans le lot. On pense que l’on en fera partie, grâce à la rigueur de notre sélection d’entreprises et notre bonne maîtrise du risque.

*Full disclosure : Truffle Capital est l’actionnaire majoritaire de NetMediaEurope, éditeur d’ITespresso.fr

Credit.fr propose aux prêteurs des taux « attractifs » allant de 3,40% à 8,70% (source : slide société, juillet 2016)

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