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IoT : quel impact sur les modèles économiques des entreprises ?

Dans quelle mesure l’IoT bouleverse le modèle économique des entreprises ? Celles-ci ne se contentent plus de vendre des produits mais des services. L’usage des objets connectés sera d’autant plus important que les services qui leur seront liés seront nombreux et pertinents.

Une onde de choc pour les grands industriels qui tâtonnent sur leur façon de produire et de commercialiser ces nouvelles offres et sur leur politique tarifaire.

Tels sont les autres constats de cette matinée de rencontres autour de Schneider Electric, Valeo, AXA et Accenture. Le 20 octobre, la Chaire IoT de l’ESCP Europe avait organisé une rencontre sur ce thème avec des représentants de ces quatre grands groupes.

Créée en mars dernier, elle a pour « vocation de nourrir la réflexion sur les enjeux business et managériaux liés à l’évolution digitale et notamment au développement des objets connectés » selon Sandrine Macé, Directrice de la Chaire IoT.

Schneider Electric et Valeo : deux équipementiers à l’assaut de l’IoT

Dès 2014, Schneider Electric lance Digital Services Transformation, une entité destinée à transformer ces équipements en objets connectés. Equipés de capteurs, tous les produits du constructeur fournissent un grand volume de données qui, analysées par des algorithmes, lui permettent de développer des solutions.

« Grâce à ces données nous développons toute une palette de services en ligne hébergés dans le Cloud et destinés à optimiser toute la gestion énergétique de nos clients que ce soit les professionnels du bâtiments, les industriels, ou nos  partenaires distributeurs », déclare Cyril Perducat, directeur général IoT et Transformation digitale de Schneider.

Pour mettre en oeuvre cette stratégie digitale, le groupe s’est ouvert sur l’extérieur. En effet la complexité de la technologie des objets connectés est telle, qu’elles sont contraintes de nouer des partenariats avec des entreprises, notamment des startups, pour s’appuyer sur des compétences qu’elles n’ont pas et pour développer au plus vite des solutions.

« Notre objectif est de créer tout un écosystème car un objet connecté n’a de valeur que s’il répond aux attentes du marché et que s’il délivre de nombreux services. Or ceci n’est possible qu’en s’associant avec des partenaires externes. D’autant qu’il nous faut être réactif car les géants de  l’internet comme Google ou Microsoft arrivent sur le marché », souligne Cyril Perducat.

Valeo n’est pas en reste. Là aussi la bataille est rude face à la force de frappe d’un Google avec sa voiture autonome. Mais Valeo propose déjà plusieurs offres.

« Avec Valeo InBlue le conducteur peut, via son Smartphone, verrouiller, déverrouiller et démarrer son véhicule. Nous proposons aussi des caméras pour remplacer les rétroviseurs ou encore une application mobile pour dégivrer et nettoyer le pare-brise à distance », illustre Derek de Bono, Directeur marketing Produit chez Valeo.

L’objectif de ces véhicules connectés est d’enrichir toute l’expérience de conduite en adressant de multiples offres verticales : GPS, tableau de bord de révision, paiement de parking à distance, stations services à proximité, places de parking partagées,  suggestion de restaurant à proximité, recommandation d’un nouveau trajet, conseils sur des contrats d’assurance, etc.

Mais tous ces services centralisés sur une plateforme nécessitent la collaboration de fournisseurs d’horizons très divers. « C’est là que tout se joue. Tous les géants de l’internet se positionnent sur ce marché des plates-formes avec d’ailleurs plus ou moins de réussite », souligne Olivier Ezratty, consultant indépendant spécialisé dans les nouvelles technologies.

Objets connectés : de nouveaux business modèles à inventer

Mais nouer des partenariats pour développer des plateformes riches en services impose aux entreprises une nouvelle façon de travailler, de nouvelles organisations et de nouveaux business modèles.

« En tant qu’assureur nous ne savons pas fabriquer des objets connectés, insiste Antoine Denoix, Chief Digital Officer d’AXA France. « Or l’évolution de nos offres vers des solutions de services comme la surveillance des habitations via des caméras, ou les contrats automobiles prenant en compte la pratique de conduite, nécessite la pose de matériels équipés de capteurs. Ce que nous ne savons produire. Par ailleurs, il nous faut des designers pour développer des applications ergonomiques enthousiasmantes pour les clients. »

Un constat partagé par Accenture qui a fait le choix d’acquérir Fjord une startup spécialisée dans le design pour développer son activité digitale.

« Le design dans une offre IoT est extrêmement importante, insiste Christophe Brasselet, senior VP Industry Service Group chez Accenture. L’usage de l’objet connecté sera en effet d’autant plus important qu’il séduira l’utilisateur au niveau de son ergonomie et de son intérêt.

« Autre élément déterminant dans un projet IoT : partir du besoin du client et non développer un produit sans se préoccuper du marché. Cette approche ‘service’ et non plus produit n’est pas sans bouleversé totalement notre business model », poursuit-il.

« Ainsi, nous nous engageons à nous rémunérer sur les revenus générés par les services IoT et non sur les ventes de prestation d’intégration et de licences logicielles. Nous sommes en full OPEX [dépenses d’exploitation, ndlr] là où nous étions en CAPEX [investissement] », commente explique Christophe Brasselet. Une transformation du business model qui impose de trouver des services générateurs de volume.

Chez AXA, l’IoT est un véritable choc culturel et organisationnel. « Choc dans notre relation client, sur nos contrats d’assurance et dans notre relation avec notre réseau d’agents», confie Antoine Denoix.

Structuré autour d’un réseau de revendeurs, l’entreprise n’avait, jusqu’à récemment aucun lien direct avec les clients. Or aujourd’hui avec internet les utilisateurs s’informent, comparent les offres des différents assureurs. La lisibilité des contrats et l’ergonomie des sites et des applis mobiles sont donc devenus de véritables enjeux pour l’entreprise.

«  Avec le digital nous devons repositionner notre réseau de revendeurs sur des offres de services plus personnalisés. Grâce aux données collectées de nos bases clients et des capteurs installés sur des objets présents dans voitures, les habitations ou les lieux de travail, nous pouvons personnaliser les offres en fonction des clients. Par exemple, un conducteur prudent verra son prix d’assurance décroître au fil du temps », poursuit Antoine Denoix.

Les contrats d’assurance automobile passent donc d’une tarification reposant sur une mutualisation des risques à une tarification à l’usage.

« Une véritable révolution car on évolue d’un statut de payeur en cas de sinistre à un statut de partenaire pour prévenir les dommages. Comment facturer cela ?, s’interroge t-il. De nouveaux business models imposés par l’IoT sont donc à inventer.

« L’IoT pose également des problèmes de protection des données personnelles », souligne Sandrine Macé. « Mais quelles que soient les impacts juridiques, économiques, industriels et organisationnels, l’IoT est en marche. »

(Crédit photo NetMediaEurope : Sandrine Macé, chaire IoT, ESCP Europe)

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