John Couch, l’homme qui valait 1 milliard
A la tête du département Education américain d’Apple, John Couch est l’homme du Lisa, mais surtout celui qui a fait passer Apple de 7 millions à 1 milliard de dollars de revenus au début des années 80. C’est aussi lui qui, avec l’aide de Jef Raskins, un autre vétéran du Mac, avait poussé Steve Jobs à se rendre au PARC pour assister à une démonstration sur l’un des tout premiers ordinateurs à interface graphique. Autant dire que Couch n’est pas à son poste par hasard !
John Couch tient depuis juin dernier le poste de vice-président pour l’Education d’Apple (voir édition du 11 juin 2002). Cette fonction, taillée sur mesure, réunit les ventes et le marketing de ce département d’Apple pour lequel le continent nord-américain représente le principal débouché. Mais ce n’est pas le seul : l’Europe commence également à faire bonne figure, sa part de marché passant de 4 à 8 %. Chahutées par la concurrence, principalement emmenée par Dell, les ventes à l’Education ont eu tendance à fléchir sur les dernières années, malgré l’expertise de Cherryl Vedoe. Mais la bataille continue et Apple pense sérieusement pouvoir changer la face du marché en imposant certains de ses produits. L’iBook d’abord : le petit portable a défrayé la chronique et apporté plusieurs gros contrats à la firme. Embarquée dans la classe mobile, la machine fait beaucoup parler d’elle (voir édition du 2 mai 2001). L’iMac à écran plat a également toutes ses chances. Il vient ainsi d’être adopté par l’université de Carnegie Mellon pour son écran articulé, l’Unix qui lui sert d’OS et son silence. « Auparavant, vous pouviez entendre la salle des ordinateurs à près de deux mètres de la porte », indique Mark Stehlik, assistant à l’Université.
Les eMac et iMac à écran cathodique font également partie des machines mises en avant pour le secteur de l’éducation. Certains de ces ordinateurs continuent de tourner sous Mac OS 9 et c’est John Couch qui souligne l’importance de ce point : « Pour permettre aux 25 % [de nos utilisateurs, Ndlr] qui désirent toujours acheter leur Mac avec Mac OS 9 comme système d’exploitation par défaut, Apple continuera à offrir à sa clientèle de l’éducation quelques configurations des lignes eMac, iBook, et iMac cathodiques jusqu’en juin 2003. » Le Xserve n’est pas en reste, puisque le serveur d’Apple est déjà considéré comme un véritable cheval de bataille pour les grandes institutions scolaires. Il faut dire que Couch en connaît un rayon sur le monde de l’éducation, ses attentes et ses choix technologiques : après avoir abandonné son poste chez Apple en 1985, pour s’occuper de sa famille, il a consacré son temps et son argent à un programme de réhabilitation d’une école privée de Santa Fe. Depuis, l’établissement est considéré comme l’un des plus avancés, un modèle d’utilisation réussie des technologies de l’information au service de l’apprentissage des élèves. Une expérience de terrain qui lui aura fait toucher du doigt les difficultés de l’utilisation de l’informatique à l’école et les arcanes des financements nécessaires. Car l’un des problèmes du secteur de l’éducation est bien là : l’Administration a commencé à se focaliser sur le coût d’achat des machines et non plus sur le coût total d’acquisition ou les apports pédagogiques de l’informatique. Les laboratoires informatiques des écoles tendent à se pourvoir de machines à bas prix, souvent de seconde main. « J’ai un laboratoire complet de 30 machines équipées de Pentium II tournant à plus de 400 MHz, dotés de 128 Mo de mémoire et d’écrans 17 pouces de seconde main pour 1 600 dollars », souligne Tim Merritt, du centre d’instruction technologique de l’Université de Georgie (ITC), et à ses heures perdues animateur du site DV for Teachers, centré sur l’audiovisuel numérique à l’école.
Dynamique et persuasif
De telles pratiques conduisent Apple à se dépasser. En fait, l’action entamée par John Couch pour qu’Apple ne se fasse pas tout bonnement éjecter du marché de l’éducation va bien au-delà de la ligne de conduite qu’elle s’est assignée depuis l’an 2000. Depuis, des ingénieurs ont été envoyés chez les développeurs de logiciels dédiés à l’éducation afin de faire sauter les verrous qui empêchent encore certaines institutions de franchir le pas. Les objectifs de John Couch – faciliter le passage des enseignants à Mac OS X notamment – doivent être atteints à l’été. L’homme a de la ressource et, sans doute, Apple va-t-elle grâce à lui reprendre du poil de la bête sur ce marché qui a tendance à lui échapper. John Couch est connu pour son dynamisme et c’est à lui que l’on doit les premières grandes réussites de la Pomme, au début des années 80. Il faisait la couverture des magazines avant même que Steve Jobs prenne le devant de la scène. L’individu est crédité d’un esprit de persuasion inaltérable. Le passage de Jobs au Palo Alto Research Center (PARC), c’est lui, aidé de Jef Raskins, l’inventeur du Macintosh ! La montée en puissance du chiffre d’affaires d’Apple, passant de 7 millions à plus d’un milliard de dollars, encore lui ! Le lancement du premier ordinateur à interface graphique, le Lisa, toujours lui… John Couch a eu un tel impact sur Apple qu’il est considéré comme l’un des quatre fondateurs de la firme, après Steve Jobs, Steve Wozniak et Ronald Gerald Wayne (un fondateur oublié de la société). John Couch est entré à Apple en 1978, après avoir travaillé chez Hewlett-Packard. Avant de revenir, en 2002 chez Apple, il a dirigé une société de recherche sur le génome humain.