Dans le film La rose pourpre du Caire de Woody Allen, un acteur crève l’écran de cinéma pour aller rejoindre une admiratrice dans le public. Quatre dirigeants de groupes multimédias (SFR, TF1, Lagardere Active Media et M6) se sont livrés hier à un exercice assez proche, quoique nettement moins romantique. A l’occasion d’une table ronde sur les groupes multimédia organisée par l’EBG (Electronic Business Group), chacun a été invité à sortir de son « pré-carré » respectif pour se pencher sur la nature des « autres » médias et sur les « synergies » éventuelles avec son métier historique. Internet et VoD (Video on Demand) étaient au coeur de leurs discussions.
« L’histoire est en train de se déplacer », résume Didier Quillot, président de Lagardere Active Media (et ex-PDG d’Orange France). « Si on regarde la vidéo communautaire, je suis convaincu que la vague est là et qu’il n’est pas possible de l’arrêter. Il reste deux problèmes majeurs. 1. Les acteurs seront-ils capables de monétiser leurs audiences ? 2. Un modèle basé sur la fraude et le piratage ne tient pas ». Il rappelle que Google a pour cela négocié des accords avec des grands fournisseurs de contenus en France, dont Europe 1, dans le cadre du lancement de YouTube en France.
La vraie bagarre va se faire sur les droits
« Nous sommes tous d’accord sur un point : la vraie bagarre va se faire sur les droits », insiste d’ailleurs Nicolas de Tavernost. Pour lui, la question consiste à trouver un moyen de diffuser les mêmes contenus « avec les mêmes droits dans différentes séquences ».
« Il y a bien un moment où quelque chose se rectifiera et où il faudra admettre de payer un prix pour une oeuvre », renchérit Patrick Le Lay, ex-président de TF1, connu pour son « franc-parler ». Avant de s’offusquer : « Il est surprenant de constater que des entreprises qui ont pignon sur rue basent leurs activités sur le vol ». Pour lui, regarder une vidéo sur internet reviendrait dans certains cas au même que « d’aller au Relay H du coin pour voler un magazine Hachette ». Et « YouTube et Dailymotion vont bien être obligés de rentrer dans le rang ».
Les modèles économiques en question
La question des revenus associés a également été posée. « Chacun anticipe tellement sur la consommation que l’on a l’impression que la télévision a disparu », s’étonne Nicolas de Tavernost, président de M6. « Or, personne ne connaît les modes de rémunération sur les contenus en ligne, qui se basent souvent sur nos contenus et ne sont pas toujours payés », regrette-t-il.
Même son de cloche à l’antenne de TF1. Patrick Le Lay entend là encore » mettre les pieds dans le plat ». De la même manière qu’à la télévision ? où quatre grandes chaînes engrangent d’après lui 90% des revenus publicitaires – une concentration des investissements publicitaires sur cinq grands sites serait en cours, posant la question de la survie économique de nombreux autres.
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