Le casse-tête des droits numériques
Microsoft a organisé ce jeudi 26 octobre une table ronde autour de la sécurisation des données audio sur Internet. L’occasion de constater que la distribution numérique d’oeuvres soumises au droit d’auteur et droits voisins pose toujours des questions sans réponse aujourd’hui. Petite sélection.
Comment simplifier l’emploi de solutions sécurisées ?
Prenez Napster d’un côté, ou mieux : Gnutella qui n’utilise pas de serveur central ; de l’autre, essayez d’imaginer un logiciel de Peer-to-Peer qui intègrerait une solution de gestion des droits numériques (« DRM », pour Digital rights management). Fatalement, la solution sécurisée fait appel à un plus grand nombre d’intervenants, ce qui ajoute des manipulations supplémentaires pour l’utilisateur ou tout du moins complique les manipulations. Le format de fichier employé pose aussi problème : il faut posséder un lecteur approprié. Pas de quoi donner envie d’utiliser des solutions sécurisées.
Comment lire un même morceau de musique sécurisé sur des machines différentes ?
Une solution sécurisée fait appel à une « clé numérique », stockée sur le disque dur, qui permet de décrypter le fichier protégé. Quand d’autres l’autorisent, certaines clés peuvent empêcher toute copie vers une autre machine, baladeur MP3 compris. Tout dépend du choix de l’éditeur. L’ennui est que le baladeur MP3 par exemple, doit être compatible avec le format sécurisé, ce qui n’est pas toujours le cas. Autre casse-tête : comment faire quand la même personne possède plusieurs ordinateurs ? Le problème se pose aussi après l’effacement de toutes les données du disque dur, car dans ce cas la clé est effacée avec le reste, même si les fichiers sécurisés sont bien précieusement copiés.
A-t-on le droit de copier pour un usage privé ?
La copie est autorisée dans le cadre d’un usage au sein d’un même « foyer ». Pour permettre une rémunération des ayants droit, aujourd’hui une somme est prélevée sur les supports d’enregistrement analogiques, à raison de 1,50 francs HT par heure de bande pour l’audio et 2,25 francs HT par heure pour la vidéo. Mais le calcul en temps d’enregistrement n’est pas applicable aux supports numériques et des discussions sont en cours pour trouver un accord entre les vendeurs de supports et les producteurs (voir édition du 7 septembre 2000).
Le streaming est-il une solution ?
Le streaming impose aux utilisateurs d’être connectés au réseau, c’est son principal inconvénient. Ce serait tout de même le choix de Universal qui opterait pour l’abonnement comme mode de distribution(voir édition du 24 octobre 2000). Il faut dans ce cas développer une solution permettant d’identifier l’abonné car on connaît les limites du mot de passe. Un autre problème est lié au « direct » : le fournisseur du contenu en streaming doit pouvoir offrir une solution en cas de « plantage » de la connexion ou de la machine de son client. De même, si le droit de la vente à distance s’applique, le client possèderait le droit de répudier l’acte… Gênant !
Qui va gérer les droits et à quel tarif ?
Internet crée une nouvelle problématique. L’exemple du webcast est très significatif (voir édition du 6 octobre 2000). Les sociétés d’auteurs cherchent à conserver leur légitimité, mais les modèles qu’elles proposent ne sont pas forcément adaptés.
Au final, sera-t-on réellement propriétaire de ce que l’on achètera ?
Dans le cas du streaming, la question ne se pose pas réellement. En revanche, une solution sécurisée implique de toujours conserver une relation avec l’éditeur ou le fournisseur de la clé de décryptage. On pourrait donc assimiler la situation à une location. L’autre pendant de cette relation concerne les données personnelles. La question est rarement évoquée par ceux qui fournissent des solutions, pourtant elle semble cruciale pour les consommateurs. En stockant ses morceaux, en donnant la version de son matériel, son numéro de carte bancaire, son adresse e-mail, on a du mal à croire que toutes ces données ne seront pas exploitées par la suite. Une contrariété qui n’existe pas quand on achète un CD…