Le Forum des Droits sur Internet, socle du futur Conseil national du numérique ?
Dans le cadre des Assises du numérique, le FDI a organisé une table ronde sur la régulation Internet. Une manière de mettre en valeur le travail accompli.
Sur les dix intervenants invités à prendre la parole au cours de cette manifestation qui s’est tenue à l’Echangeur, à Paris , il y avait trois membres du conseil d’orientation du FDI : Christophe Espern, de l’Association pour la promotion et la recherche en informatique libre (April), Patrice Martin-Lalande, député UMP et co-président du groupe d’études « Internet, audiovisuel et société de l’information » de l’Assemblée nationale, et Michel Vivant, professeur agrégé des facultés de droits, membre de la chaire « régulation » à Sciences Po Paris.
Les autres intervenants appartenaient à des organismes membres du Forum : Catherine Brel (responsable juridique senior chez eBay France), Jean-Marie Danjou (délégué général de l’Association française des opérateurs de mobile-Afom) et Véronique Fima-Fromager , présidente de l’association de défense des enfants Action Innocence France.
Pour terminer la présentation du panel, on y trouvait également des personnalités ayant participé à des groupes d’études au sein du FDI : Bertrand de la Chapelle, représentant du ministère des Affaires Etrangères (et par ailleurs membre français du Governmental Advisory Committee, auprès de l’ICANN). Et deux exceptions hors cercle du FDI : François Jaspart, inspecteur général de la Police nationale, et Hervé Nabarette, chef du département « Qualité de l’information », à la Haute Autorité de Santé (HAS).
Gouvernance : exemple et contre-exemple
Inutile de dire que les débats furent, certes d’assez haute volée, mais surtout extrêmement courtois et… consensuels ! Tout le monde s’est accordé à dire que la régulation d’internet et du monde numérique ne devait plus être l’oeuvre d’une seule instance de droit régalien, mais le fruit d’une véritable « gouvernance multi-acteurs ».
« La notion de gouvernance d’Internet a été approuvée par 185 pays, dont la France, lors du dernier Sommet mondial sur la société de l’information », a rappelé Bertrand de la Chapelle. Il s’agit de l’élaboration, par les Etats , le secteur privé, la société civile et les organisations internationales, des prises de décision, des règles, des programmes qui modèlent l’évolution d’Internet . »
Précisions de Patrice Martin-Lalande : « Nous sommes dans un domaine où, de plus en plus, nous avons besoin de faire précéder et de faire suivre le travail législatif par un travail de concertation. »
Un contre-exemple absolu de « contre-« , voire « anti-gouvernance » a été cité par plusieurs intervenants : la fameuse loi Droit d’Auteur et Droits Voisins dans la Société de l’Information (DADVSI), dont le texte a été publié au Journal officiel le 3 août 2006. « La DADVSI était mort-née et donc inefficace, car victime d’une erreur de méthode, a estimé Christophe Espern. Les représentants des usagés n’ont pas été suffisamment entendus et écoutés. Résultat, un des décrets de la loi interdit, selon les communautés d’utilisateurs de logiciels libres, de recourir à un logiciel libre pour regarder un DVD : c’est comme si l’on devait lire un livre avec une seule marque de lunettes ! »
Le FDI, un lieu exemplaire de concertation
Mais la réunion du 19 juin fut surtout intéressante par sa tentative de définition du futur Conseil national du numérique proposé par Eric Besson. Ce nouvel organisme serait chargé de réfléchir aux orientations stratégiques de l’économie numérique, de la concertation entre les différents acteurs et de la vérification de leurs engagements. Il regrouperait les attributions du Comité de la télématique anonyme (CTA), du Conseil supérieur de la télématique (CST), du Forum des droits de l’Internet (FDI), du Conseil Consultatif de l’Internet (CCI), du Conseil Stratégique des Technologies de l’Information (CSTI), du Comité de coordination des sciences et technologies de l’information et de la communication (CCSTIC)…
Bien sûr, le « Fan club du FDI » a laissé entendre que le Forum constituerait un parfait Conseil National du Numérique. « Le Forum est un lieu exemplaire de concertation pour les normes devant guider Internet, a insisté Patrice Martin-Lalande. Il faut mettre les moyens juridiques, budgétaires pour que des organismes comme le Forum puissent faire leur travail. »
Plusieurs sons de cloche similaires se sont fait entendre. « Le FDI correspond à un modèle d’instance de gouvernance que l’on voit émerger un peu partout dans le monde », a confirmé Bertrand de la Chapelle. « L’expérience du Forum est intéressante : c’est un lieu pour discuter, proposer, mais ne pas imposer », conclut Michel Vivant.
Isabelle Falque-Pierrotin, a, d’un côté, égratigné les autres instances (CTA, CST, CCI, CSTI, CCSTIC… ) que le Conseil National du Numérique devrait remplacer : le Forum est, selon elle, pratiquement le seul de ces organismes à s’être réuni régulièrement et à avoir fait des propositions concrètes. Mais, prudente, elle a, d’un autre côté, reconnu que la gouvernance était un travail complexe et que cette tâche pourrait être confiée à plusieurs organismes « travaillant en réseau ». Dont, bien évidemment, le Forum !