L’attaque terroriste des Twin Towers et du Pentagone risque fort d’avoir un impact non négligeable sur la tenue du marché de l’informatique. Les analystes du Crédit Suisse First Boston, cités par Reuters, sont formels : « Au moins 70 % des consommateurs devraient mettre à jour leur système informatique pour faire tourner XP. Cette décision peut être facilement reculée, compte tenu des événements actuels mondiaux. En fonction du déclin de la confiance des consommateurs, nous croyons maintenant que l’introduction de XP ne stimulera pas les ventes de PC à court terme. » Dans le même temps, la firme d’études stratégiques AG Edwards entonne son couplet sur le pendant de XP, Mac OS X, déjà sur les étalages mais dont la version optimisée et fonctionnelle est attendue dans les tout prochains jours : « Apple est différente, parce que ses clients sont matériellement désintéressés des alternatives PC existantes. Deux choses deviennent claires : Apple se retrouve face aux marchés de l’éducation et du grand public comme jamais auparavant. » Et les observateurs du marché informatique de mesurer les différences majeures qui séparent encore plus les deux plates-formes : l’alliance matériel/logiciel d’Apple, qui permet à la firme de poursuivre sa politique de prix justifiés par la valeur de l’intégration, et la destruction de valeur côté PC, induite par la guerre des prix féroce que doivent se livrer les constructeurs et leur absence d’offre logicielle capable de les démarquer (voir édition du 11 juin 2001). Si elle se justifiait avant le 11 septembre, l’arrivée de Windows XP, attendue comme du pain béni par les constructeurs mais pas très chaudement par les clients, n’a plus la même importance depuis les événements : le marché des PC ne se redressera pas dans l’immédiat, faute de confiance. Les ventes des machines équipées de XP risquent de ne pas s’envoler et seule la boîte contenant le logiciel pourrait être un succès. Les analystes, qui avaient prévu une augmentation de 10 % de ventes en unités, n’y croient plus : « Microsoft ne peut plus prévoir comment les consommateurs ou le marché vont réagir. »
Pour Apple, l’équation est plus complexe : les clients de la firme attendent le nouveau système d’exploitation pour profiter des énormes avantages qu’il doit leur fournir. Leur fidélité légendaire et la patience dont ils ont dû faire preuve pendant quatre années ne semblent pas faillir. Les attentats du 11 septembre ne devraient pas empêcher les clients d’Apple de passer à Mac OS X en raison des gains de productivité importants que celui-ci doit leur fournir. Le nouvel OS induit également de disposer de machines permettant de le faire tourner : un processeur G3 et 128 Mo de mémoire au minimum, un processeur G4 et plusieurs centaines de Mo pour faire bonne mesure. Une bonne part du parc installé nécessite une mise à niveau. Atout supplémentaire pour les utilisateurs : presque toutes les applications dont ils disposent tournent désormais dans Mac OS X sans nécessiter de dépenses supplémentaires, et certaines leur permettront même de profiter des avantages technologiques de la mémoire protégée, du multitâche et des autres sauts techniques réalisés, pour un coût qui ne sera pas nécessairement très élevé. Mac OS X est de plus livré avec quelques applications de base qui suffisent déjà à en profiter.
Deux modèles de création de valeur
Le marché informatique est donc bien marqué aujourd’hui, à la lumière de la perte de confiance des consommateurs créée par les attentats aux USA, par une frontière très claire entre deux modèles de création de valeur : celui d’Apple, un constructeur de matériel autant qu’un éditeur de logiciels spécifiquement adaptés l’un pour l’autre, et celui de la plate-forme PC où la complémentarité ordinateur/logiciel fait la valeur de l’offre, mais où l’absence d’avantages spécifiques apportés par les constructeurs, hors le prix des machines, induit son érosion ! Comparativement à celle de Mac OS X, l’arrivée de Windows XP n’apporte pas pour les utilisateurs de PC un avantage réel capable de relancer les ventes de matériels (une nécessité pour faire de XP un succès). En revanche, l’arrivée d’un système « moderne » chez Apple change si radicalement la donne que ses machines et ses solutions soulèvent à nouveau l’intérêt. La façon dont Apple s’adressera au marché pour profiter de cet avantage fera beaucoup dans sa capacité à reprendre des parts de marché. Mais sa position actuelle est meilleure que jamais.
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