Le ROI transforme les projets informatiques en projets d’entreprise
Dans les grands groupes, aucun projet informatique ne reçoit plus l’aval de la direction générale sans la garantie d’un retour sur investissement rapide. Qu’en est-il dans les PME-PMI, qui sont en phase d’informatisation accélérée ? Ernst & Young fait le point…
Pour les grandes entreprises, tout démarrage d’un nouveau projet informatique est désormais suspendu à un calcul de retour sur investissement (ou ROI) apportant la preuve que le projet sera bénéfique pour l’entreprise. Mais qu’en est-il dans les PME, réalisant moins de 150 millions d’euros de chiffre d’affaires ? Car il est connu que ce sont ces entreprises qui ont à présent le plus de progrès à faire pour se doter d’un système d’information (SI) compétitif. Le cabinet Ernst & Young estime ainsi que le taux d’équipement des PME-PMI en PGI n’est que de 50 %. Dans les mois à venir, bon nombre d’entreprises du mid-market seront donc amenées à améliorer leur informatique. Aussi est-il intéressant de voir comment elles appréhendent ce chantier qui les attend et si elles ont, à l’instar des grands groupes, la culture voire l’obsession du ROI.
C’est pour répondre à ces questions qu’Ernst & Young a réalisé à la fin de l’année 2002 une enquête auprès de 200 dirigeants de PME-PMI françaises. Elle porte sur l’importance stratégique qu’ils accordent à leur système d’information, sur les évolutions qu’ils comptent lui faire subir dans les années à venir et, le cas échéant, la façon dont ils évaluent le retour sur investissement de leurs projets informatiques. Ce sont à 43 % des PMI et à 10 % des entreprises de la distribution. Plus de 60 % réalisent moins de 75 millions d’euros de chiffre d’affaires. Enfin, moins de 35 % sont des filiales de grands groupes, dont les choix informatiques sont souvent dictés par la maison mère. Ces proportions indiquent un des partis pris de cette enquête, celui de privilégier les moyennes entreprises, au détriment des entreprises du haut du mid-market qui ont des problématiques proches de celles des grands groupes.
Une organisation et une gestion de l’informatique inadaptéesPremier constat : l’organisation informatique des PME ne place pas le système d’information en position de jouer un rôle stratégique. Ainsi, une PME sur deux n’a pas de directeur informatique. Et parmi celles qui en ont un, il n’est membre du comité de direction que dans 50 % des cas. Pourtant, plus de 3 entreprises sur 4 s’interrogent sur la contribution du système d’information à la stratégie de leur entreprise. Elles sont donc conscientes de l’impact de l’informatique sur la performance de leur entreprise, même si l’organisation de l’informatique ne traduit pas cet état de fait.
Autre carence : la fonction informatique n’est pas gérée de façon tout à fait professionnelle. Ainsi, 70 % des entreprises n’ont pas de tableau de bord de suivi du SI, évaluant sa performance ou la satisfaction interne ou externe. Et 55 % des entreprises n’ont pas de schéma directeur, c’est-à-dire un plan d’évolution du SI sur les deux ou trois prochaines années. Pour autant, cela ne signifie pas que leur SI n’évolue pas, il évolue même en permanence. Ainsi 89 % des entreprises l’ont modifié au cours des deux dernières années et parmi celles-ci, les trois quarts pensent le faire dans les deux prochaines années.
La nature des projets envisagés porte en premier lieu sur l’ajout de modules applicatifs, relatifs au métier de l’entreprise : gestion commerciale, gestion de production, gestion de la logistique ou encore CRM, qui est en forte progression… Par ailleurs, 45 % des entreprises envisagent des déploiements destinés à ouvrir l’entreprise sur ses partenaires et à améliorer la communication interne, par la mise en place d’intranet et d’extranet. Autre tendance : elles s’intéressent de plus en plus (37 %) au domaine du pilotage, c’est-à-dire à l’exploitation des données produites par le système d’information afin d’anticiper les prises de décision.
Quant aux motivations qui président aux évolutions du SI, elles reflètent bien le rôle stratégique que les PME tendent à vouloir faire jouer à leur SI puisque les deux catalyseurs sont l’optimisation de la performance et la production en temps réel d’informations de pilotage. Mais un système informatique, constitué au fil des ans de l’empilement de modules applicatifs plus ou moins bien intégrés, est-il en mesure de leur donner satisfaction sur ces points ? Un travail d’urbanisation s’impose à l’évidence, note l’étude. Leur SI évolue également en réaction à l’évolution de l’écosystème de l’entreprise. Et là, les principaux moteurs sont l’amélioration de la satisfaction des clients (68 %) et l’organisation en entreprise étendue (44 %).
Les vertus managériales du ROILes entreprises se lancent donc dans des projets informatiques à caractère stratégique. Les considèrent-elles comme réussis ? La réponse est oui à près de 90 %. Cette réussite est massivement évaluée (90 %) sur le critère de la satisfaction des utilisateurs, ce qui est contradictoire avec les objectifs qu’elles assignent à leurs projets informatiques. Si elles estiment, comme elles le disent, qu’une des raisons principales qui les a poussées à faire évoluer leur informatique est d’optimiser la performance de l’entreprise, en toute logique, elles devraient évaluer la réussite de leurs projets au regard de cet objectif. Si ce n’est pas le cas c’est parce que, le plus souvent, elles n’ont pas mis en place des indicateurs factuels de suivi de l’amélioration des processus concernés. Mais surtout, la principale difficulté à laquelle elles se heurtent dans la réalisation d’un projet informatique est la résistance des utilisateurs.
C’est là qu’Ernst & Young fait intervenir le ROI, lequel n’est pas calculé par près de deux entreprises sur trois. En effet, dans son optique, le ROI ne se réduit pas à un calcul de coût associé à la mise en place de métriques mais est plutôt considéré comme un outil de management qui aurait la vertu de transformer le projet informatique en un projet d’entreprise, fédérant l’ensemble des acteurs impliqués sur un objectif commun, le ROI, et réglant au passage les problématiques de gestion du changement…
Voir le ROI sous cet angle est intéressant. Observons toutefois qu’il s’agit d’un plaidoyer pro domo puisque, évidemment, Ernst & Young propose les coûteux services de ses consultants afin d’aider les PME à adopter cette démarche dans le cadre de leurs projets informatiques.