Le vote sur le brevet logiciel européen reporté au 22 septembre
Face aux dissensions qui agitent le groupe socialiste au Parlement européen, les dirigeants politiques ont préféré différer le vote du projet de directive sur les brevets logiciels.
Le vote sur la proposition de directive du Parlement et du Conseil européen concernant la « brevetabilité des inventions mises en oeuvre par ordinateur » n’aura pas lieu le 1er septembre comme initialement prévu (voir édition du 26 août 2003). Face aux contestations en tout genre et aux divisions internes, les présidents des groupes politiques du Parlement ont préféré reporter le vote à la session qui se déroulera du 22 au 25 septembre 2003. Rappelons que, pour de nombreux acteurs de l’informatique européenne, la Directive sur la brevetabilité des programmes tuerait l’innovation en imposant des coûts financiers liés aux procédures de dépôts et de gestion insurmontables pour les petites et moyennes entreprises, sans parler des développeurs indépendants. A raison de plusieurs milliers d’euros par brevet, seules les grandes firmes, essentiellement américaines, ont les moyens de gérer un portefeuille de brevets.
Si les associations de défense du logiciel libre, telles EuroLinux et la FFII (Foundation for a Free Information Infrastructure), ont su attirer l’attention sur le sujet, le report est avant tout dû à des dissensions au sein du groupe parlementaire des députés socialistes européens (PSE) qui manque d’unité et de cohésion pour valider le projet face à l’opposition libérale, majoritaire au Parlement. Défendu par Arlene McCarthy, députée britannique travailliste (New Labour), le projet de Directive sur les brevets logiciels rencontre une opposition du côté des socialistes français, notamment de Michel Rocard qui préside la commission de la culture. L’ancien Premier ministre ne s’oppose pas à la directive dans son ensemble mais à la brevetabilité des logiciels « en tant que tels », c’est-à-dire les programmes informatiques qui n’exercent aucune interaction sur des dispositifs physiques. Cela concerne notamment tous les logiciels de gestion type base de données, gestion de clientèle, etc. La commission de la culture avait proposé une série d’amendements en ce sens, purement ignorée par Arlene McCarthy de la commission juridique, chargée du dossier. Dans ces conditions, à la veille du vote, le projet de directive n’avait donc aucune chance de passer.
Un danger pour les PME
Les socialistes français, soutenus dans leur initiative par les Verts notamment, vont s’employer à convaincre les eurodéputés d’adopter les amendements s’opposant à la brevetabilité des logiciels « en tant que tels ». Et particulièrement les socialistes allemands du SPD, plus mitigés sur la question que leurs homologues français. En collaboration avec la section virtuelle du SPD allemand, ils ont notamment envoyé, jeudi 28 août 2003, une lettre à l’ensemble des députés européens du PSE pour les alerter sur les dangers de la brevetabilité. Ils seront indirectement soutenus dans leur démarche par un groupe d’économistes internationaux (y compris américains) issus de prestigieuses universités qui, dans une lettre datée du 25 août 2003, exposent les risques liés au brevet logiciels pour les PME. « Tandis que quelques PME survivront dans ce nouvel environnement [économique], beaucoup ne pourront pas », peut-on lire. « Particulièrement, valider les brevets sur les standards viendra assombrir la croissance de l’industrie européenne des logiciels libres et Open source tout en préservant la dominance des leaders actuels. »