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Les ‘couacs’ de la Boucle Locale Radio

« Depuis l’attribution des licences (de boucle locale radio, ndlr) à l’été 2000, les choses ne se déroulent pas exactement comme prévu. Le processus est plus difficile, et le marché ne se développe pas aussi vite qu’espéré », lâchait Jean-Michel Hubert, président de l’ART, dans un entretien accordé au Figaro Economie en mars dernier. Et de rassurer le secteur en expliquant que le phénomène n’est pas une exception, mais que l’ensemble des pays européens ayant déployé un accès BLR connaissait des difficultés dans le déploiement et la commercialisation des offres. Sans pourtant remettre en question cette technologie, Jean-Michel Hubert explique que « c’est l’évolution de la conjoncture financière qui a été le facteur déclenchant de l’inflexion de la BLR ». Une des causes… car la BLR pourrait bien avoir souffert également d’un mauvais positionnement dès le départ qui a laissé croire que la technologie pouvait intéresser le grand public alors qu’elle était clairement conçue pour les entreprises. Sans compter que les opérateurs BLR n’avaient pour la plupart d’entre eux aucune base client sur le marché du haut débit. A cela s’ajoute le fait que la BLR est la dernière arrivée des technologies haut débit et peine à prendre position face au câble ou aux différentes versions catégories de liaisons DSL.

Et cela ne risque pas de changer. Le secteur est en pleine consolidation. Si généralement ce phénomène naturel permet souvent de structurer un marché en éliminant les plus faibles au profit des sociétés les plus capables, ce phénomène n’aurait pas du avoir lieu dans le secteur de la boucle locale radio. Car le secteur ne s’est pas constitué librement. C’est l’ART qui a, en effet, choisi des opérateurs – nouveaux, au détriment de groupes plus solides comme Cegetel ou Siris (voir édition du 11 juillet 2000) – selon leur profil et leur business plan. Forte de ses informations, l’ART avait donc octroyé des licences pour chaque région ainsi que deux licences nationales. Ainsi, croyait-elle, chacun avait un rôle à jouer dans le développement de cette technologie. Or lorsqu’un opérateur se fait avaler par autre, il est dans son intérêt de remettre à l’ART toutes les licences qui ne l’intéresse pas, ou qu’il a en double, remettant en cause le déploiement même de la BLR en France. Ainsi LDCom, suite à la prise de majorité du capital de BLR Services et du rachat de Belgacom, se trouvait avec un surcroît de licences régionales, notamment depuis qu’il est détenteur aussi d’une des deux licences nationales via l’opérateur Squadran (ex-Fortel) (voir édition du 29 novembre 2001). Ce sont ainsi près de 20 licences qui sont dorénavant à réattribuer.

Une concentration géographique

Mais la liste, depuis, ne cesse de s’allonger. Cegetel a annoncé de son côté qu’il abandonnait le marché de la boucle locale radio en Martinique et en Guadeloupe pour ne garder que celle obtenue pour le département de la Réunion (voir édition du 17 octobre 2001). Autre déconvenue pour le secteur, l’opérateur Broadnet, qui s’est lui-même fait racheté par Altitude Telecom, n’a commencé le développement de son réseau BLR que dans une seule des 15 régions pour lesquelles il avait obtenu des licences. Broadnet ne compte aujourd’hui que quatre stations de base dans Paris et une quarantaine de clients. Résultat, il y a de fortes chances qu’Altitude Telecom remette dans l’escarcelle de l’ART ces 14 régions en préférant s’appuyer uniquement sur l’Ile de France, « tellement proche et interactive avec la Normandie », comme le souligne son PDG, Jean Paul Rivière. Altitude revendique actuellement 250 clients en Haute et Basse-Normandie et évalue le potentiel en Normandie à 600 clients alors qu’il est cinq fois plus élevé en Ile-de-France, qui ne manque pourtant pas d’offres haut débit en tout genre…

Un seul opérateur national de BLR ?

L’ART risque de nouveau de se retrouver avec un autre problème. Si, jusqu’ici, l’Autorité de régulation se voyait retourner des licences BLR, il ne s’agissait que de licences régionales. Or elle pourrait très bien dans les jours qui viennent avoir sur les bras une licence nationale. Le groupe Suez, qui souhaite se recentrer sur ces trois métiers de base que sont l’eau, l’énergie et la propreté, serait sur le point de se séparer de FirstMark, opérateur BLR qui détient une licence nationale. Or, même si l’information n’est pas encore confirmée, l’opérateur LDCom, celui-là même qui possède déjà une licence nationale, serait sur les rangs pour racheter FirstMark. Et Jean-Michel Hubert de rappeler « qu’un acteur ne saurait détenir deux licences nationales ». Dans le même temps, le président de l’ART considère que le retour au bercail de toutes ces licences ne saurait remettre en question la concurrence sur le marché du haut débit en France et notamment entre les opérateurs. Selon lui, la différence se fera « sur l’émulation entre technologies, dont la BLR, et sur la différenciation des services« .

L’ART prise à son propre piège ?

Pourtant le constat est sévère : sur les 12 opérateurs retenus par l’ART en juillet 2000 (voir édition du 11 juillet 2000) pour le déploiement de la BLR, seuls 7 acteurs sont encore présents. Et sur ce nombre, peu ont à ce jour respecté le calendrier de déploiement imposé par l’ART. Ce dernier estime que le processus est enclenché, même s’il juge qu’il est effectivement un peu lent. Afin d’accélérer le déploiement des infrastructures BLR, l’ART a décidé d’adresser des mises en demeure à certains opérateurs de boucle locale radio, les menaçant d’un retrait de licence s’ils ne respectent pas leurs engagements. Il s’agit des sociétés Landtel France, qui n’a déployé une offre que sur une région sur sept, Broadnet France, avec seulement une région sur 15, et enfin deux opérateurs Outre-Mer, XTS Network Caraïbes et XTS Network Ocean Indien. Le délai est aujourd’hui passé. Du côté de l’ART, aucune décision ne semble avoir été prise. Mais il semble difficile au gendarme des télécommunications de retirer aux quelques opérateurs restants leurs licences, qui ne trouveraient a priori pas de repreneur…

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