« Je pourrais vous faire attendre 6 ou 7 minutes, comme font les opérateurs… » A l’occasion de la conférence de presse sur « les pratiques inacceptables des fournisseurs d’accès », Alain Bazot, le président de l’UFC/Que Choisir, donne le ton. Droits bafoués, explosion du nombre de litiges, pratiques commerciales déloyales, tentatives de découragement, manque de transparence… Le porte-parole de l’association de consommateurs n’a pas de mots assez durs pour qualifier l’attitude des FAI.
Le principal reproche fait aux prestataires Internet concerne le coût de la hotline. Selon l’enquête de l’UFC réalisée auprès d’un échantillon de 400 abonnés et des résultats fournis par 170 associations locales, le montant de l’assistance téléphonique facturé sur les 12 derniers mois aux clients s’élève à près de 112 millions d’euros. Une somme dont près de la moitié (54 millions), trouve son origine dans les temps d’attente. Ceux-ci sont en moyenne de 6,7 minutes, pour un appel moyen de 15 minutes. Seuls 18 % des appels sont décrochés immédiatement. Enfin, moins de la moitié (45,5 %) des démarches téléphoniques aboutissent à une solution lors d’un premier appel. En moyenne, il faut 3,1 appels au service technique pour résoudre le problème.
70 % de la facture injustifiée
L’UFC pousse l’incrimination un peu plus loin. Sur les plus de 57 millions d’euros restants, 25 millions concernent un problème relevant directement de la responsabilité du FAI (absence de connexion, panne de modem, etc.). « Ce sont au total près de 79 millions d’euros qui sont injustement facturés au consommateur », souligne l’association, « on peut donc estimer à plus de 70 % de la facturation les prélèvements non justifiés ». Les problèmes de mise en service et les interruptions de service sont les principales causes d’appels de la hotline. Ils représentent plus de 42 % des raisons de décrocher son téléphone. Le reste concerne des problèmes liés au PC (17 %), des questions commerciales et d’abonnement (27 %) et techniques (12,5 %).
Ces communications facturées gonflent d’autant le prix du service. Selon l’association, cela revient en moyenne à 1,5 euro supplémentaire par mois et par abonné. Et, selon les cas, le prix réel de l’abonnement est entre 8 et 114 % plus cher que celui affiché lors de la souscription. Pour l’UFC, « la facturation abusive est incontestable », tout comme la « stratégie de dissimulation des coûts ». D’autant qu’elle induit des effets pervers : « Plus la qualité de service se dégrade et plus le fournisseur d’accès a de chances de rentabiliser son service. »
Augmentation du nombre de plainte
Le plus inquiétant est de constater que les problèmes n’ont pas de corrélation directe avec l’arrivée des nouveaux abonnés. Sur les 12 derniers mois, le nombre de litiges ayant fait l’objet d’une plainte a augmenté de 56 % alors que la population des internautes abonnés a progressé de 7 %. Cinq FAI concentrent 77 % des litiges : Free (30 %), Tiscali (15 %), Neuf Télécom (11 %), Cegetel (10 %) et AOL (7 %). Des taux trompeurs que l’UFC a préféré rapporter en « c?fficient d’insatisfaction » par rapport à leur part de marché. Du coup, Tiscali concentre le plus d’insatisfaits (avec un c?fficient de 2,72), suivi de Cegetel (2,5), Free (1,76), Neuf Télécom (1,57) et AOL (0,93). Wanadoo arrive dernier avec un c?fficient de 0,23. L’absence de câblo-opérateur s’explique par le manque d’abonnés représentatifs.
Si Free n’est pas le plus « mauvais » FAI en matière de litiges avec ses abonnés, « c’est celui qui cristallise le plus les mécontentements », estime Alain Bazot. C’est donc « à titre d’exemple » que l’UFC a assigné le FAI le 20 mai dernier sur le principe du manquement à l’obligation de service. Si Free risque de payer pour les autres, il pourrait être vite rejoint par ses confrères. L’association « n’exclut pas à court terme d’assigner d’autres fournisseurs d’accès en l’absence d’améliorations rapides et significatives ». L’UFC définira sa stratégie après la présentation des 10 mesures que le ministre de l’Industrie, Patrick Devedjian, devra présenter le 16 juin prochain dans le cadre de la consultation sur le service public des communications électroniques.
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